E&Dlaïcité

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LA LAÏCITÉ

Pourquoi ouvrir un dossier sur ce sujet ?

 La laïcité est un principe constitutionnel en France ( le Portugal l'a aussi retenu).  Ce principe est une obligation qui contraint les citoyens, la société, le pouvoir politique. Sa justification a priori est superflue sinon inopportune. Elle est cependant actuelle : les conséquences de son application soulève des discussions alors qu'elle est établie pour garantir les libertés individuelles et collectives de pensée, d'expression, d'associations, de croyances philosophiques ou religieuses dans nos sociétés plurielles, composites et diverses,

La société rassemble croyants ou incroyants, religions organisées ou non, mouvements matérialistes, agnostiques ou libres penseurs, spiritualistes ou non. Parmi les communautés de croyants l'Eglise catholique est historiquement liée à la nation et le christianisme qui l'inspire a imprégné la civilisation et la culture française entre autres. Elle imprime toujours sa marque dans les mentalités, les genres de vie, les structures de pensée, la démarche éducative même.

La laïcité a franchi des seuils (gallicanisme, révolution, concordat, loi de séparation de l'église et de l'Etat), a marginalisé le pouvoir temporel de l'Eglise rendant à" César ce qui appartient à César et à Dieu ce qui appartient à Dieu ".

Aujourd'hui la société s'est diversifiée, est sortie pour partie de la religion traditionnelle sinon du désir de croyance. La juxtaposition et la présence de courants différents, les uns dominants ( catholicisme, islamisme) les autres minoritaires mais souvent influents (protestantisme, judaïsme, libre pensée, agnosticisme, bouddhisme) font de la société une mosaïque de pensées et de croyances qui donnent au principe de laïcité la primauté, en font une nécessité absolue.  Le pouvoir politique est à l'image d'une société diversifiée: sans s'immiscer dans la gestion de chaque organisation ou association, il a avec chacune une obligation de relation et doit offrir à toutes un accès aux services communs dont le service d'éducation indispensable à la cohésion nationale.

 

Quelle éducation pour tous ?

Le service public engage l'avenir et ne s'arrête pas à la scolarité obligatoire . C'est un service d'éducation et pas uniquement de formation professionnelle.  Il est présent à toutes les étapes de la vie : il a pour but la transmission des savoirs, du savoir-faire et débouche sur le savoir-être avec soi-même, avec les autres.

Il a institué la nation, cet objectif reste vrai même si la nation est aujourd’hui une communauté ouverte qui s'engage avec d'autres communautés nationales.

Le service d'éducation reste celui qui gère les lieux de rencontre que sont les établissements. Ici se forge la solidarité dans le travail qui doit limiter la compétition individuelle; ici s'acquiert la rationalité, l'esprit critique, la croyance ou la capacité d'autocritique et de création de l'être humain.

L'école est le lieu où doit être magnifié l'effort, où le maître s'adresse des êtres différents sans heurter les sensibilités et les croyances individuelles, où le principe de laïcité est absolu, souverain préalable.  Une autonomie de projet est nécessaire à chaque établissement pour une capacité d’innovation. L'Etat reste souverain dans la définition des programmes, d'objectifs, la délivrance des diplômes et les cadres d'organisation, recrutement et 1a formation des maîtres.

 

Société – individu - religion

La communauté des hommes s'organise, gère ses intérêts , et les pouvoirs qu'elle se donne dépendant de l'évolution morale, intellectuelle et culturelle des individus qui la compose.  La démocratie vit avec des êtres humains parfaits mais perfectibles s'ils sont libres. Leurs droits sont reconnu valeur des droits de l'homme évolue vers l'universel : la déclaration universelle de 1948 est aujourd'hui le pacte qui lie les organisations, les Etats, les individus.

Les religions révélées ont imprégné les civilisations et les cultures.  Ainsi catholicisme en France a prévalu dans l'organisation politique et sociale du pays ; il reste influent dans les esprits, il a perdu ce pouvoir prééminent qui fut le sien : les forces de contestation l'ont emporté y compris dans son propre sein.  Les courants de pensée minoritaires - agnostique ou libre-penseurs, protestants chrétiens - ont imposé un idéal laïque et proposé aussi d'autres types de spiritualité. Chaque église, chaque organisation doit composer avec les autres : ces relations impliquent pour toutes, autocritique et regard sur elle-même, éliminant toute volonté de prosélytisme.

Le pouvoir politique et démocratique s'est laïcisé; le partage entre courants différents ne dépend plus du religieux même s'ils s'en inspirent parfois ; les lignes de fracture sont d'ordre social ou économique d'abord : la République et la démocratie tentent de rassembler, de lutter contre les intérêts liés à des appartenances communautaires, la démocratie laïque seule peut le  permettre : elle offre un exemple aux nations qui refusent de se livrer seule idéologie, une seule religion et d'obérer l'avenir de ses enfants, de leur capacité de choisir.

La laïcité suppose des esprits libres qu'elle protège.  Elle exige écoute de l'autre et respect absolu de sa liberté de conscience.

"Puis-je vraiment m'occuper des attitudes d'autrui, des croyances d’autrui,  des sentiments d'autrui, sans m'interroger sans cesse sur moi-même, me demander pourquoi je pense ce que je pense, pourquoi je comme je pense ? "Alfred Grosser.

Georges ROCHE

Académie de Lyon

 

Courrier d'E&D n° 4 Avril 2002