Cahier 9 Que sont les élèves aujourd'hui ?

 

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Au Sommaire Les cahiers d'Education & Devenir n° 9 (nouvelle série)

 

Qui sont les élèves aujourd'hui ?

Croiser les regards en vue de la réussite scolaire

Colloque de Rouen - 31 mars, 1er et 2 avril 2006

 

 

En complément sur le site :
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Croiser les regards, croiser les actions, croiser les sens

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Croiser les regards : un atout pour la réussite des élèves (P. Meirieu)

 

 

 

  Accueil Gérard Duchemin, directeur du CRDP de Rouen  
  Ouverture du colloque Jean-Jacques Pollet, recteur de l'académie de Rouen

CONFÉRENCES D'OUVERTURE

 
 
bullet Regards croisés sur l'école
Anne Barrère, sociologue, professeure à l'université de Lille III
 
bullet  Croiser des modèles de la motivation en contexte scolaire

Jean-Paul Broonen, professeur de psychologie et des sciences de l'éducation à l'université de Liège

TABLE RONDE

 
  Présentation. Jean-Yves Langanay, IPR-IA EVS
 
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Chantal Blanchard, professeure de lettres, académie de Rouen

 
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Jacques Bornic, ingénieur, usine Renault de Cléon (Seine-Maritime)

 
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Sophie Hébert, conseillère principale d'éducation, académie de Rouen

 
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Thierry Volck, FCPE Paris

 
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Joseph Dion, proviseur, académie de Rouen

 
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Camille Pigny, élève de BTS, académie de Rouen

COMPTE RENDU D'ATELIER

 
 
bullet Croiser les regards et coanimer l'activité pédagogique

Isabelle Klépal, proviseure adjointe, académie d'Amiens

ATELIERS : CONTRIBUTIONS

 
 
bulletCroiser les regards: une approche par les situations marginales
Maryan Lemoine, professeur de sciences de l'éducation à l'université Lille III
 
bullet Regards réciproques : l'élève nous regarde aussi. Le regard et la relation.
Dominique Ginet, professeur à l'institut de psychologie de l'université Lyon II

CONFÉRENCES

 
 
bullet L'évaluation du lycée   
Roger Establet, professeur émérite de l'université de Provence
 
bulletComment peut-on être lycéen aujourd'hui ?
Jean-Luc Fauguet, maître de conférences en sociologie à l'ILJFM d'Aix-Marseille et à l'université de Provence

CONFÉRENCE CONCLUSIVE

 
 
bullet Croiser les regards pour une école plus juste et plus efficace: les enjeux dans le contexte français
Alain Michel, inspecteur général, président de l'institut européen d'éducation et de politique sociale
 
bullet Conclusion
José Fouque, président d'Éducation & Devenir

Croiser les regards, croiser les actions, croiser les sens

 

  José Fouque, président d'Éducation & Devenir
   

Aujourd'hui, il s'agit d'accueillir la quasi-totalité de la population pendant douze ou treize ans après le cours préparatoire dans le système primaire et secondaire, puis de permettre à 50 % de cette population une scolarité réussie dans le supérieur.

Il ne sera pas possible de relever durablement ce défi sans tenir compte des différences, des particularités, des caractéristiques de chacun.

 

S'adresser au sujet et seulement au sujet abstrait de la raison, de la rationalité scientifique, est déjà une déformation positiviste de l'esprit français des Lumières. Cette entrée a permis ou a suffi à la réussite de la scolarisation du plus grand nombre, a permis le passage de la campagne à la ville. Aujourd'hui, il s'agit d'accueillir la quasi-totalité de la population pendant douze ou treize ans après le cours préparatoire dans le système primaire et secondaire, puis de permettre à 50 % de cette population une scolarité réussie dans le supérieur.

Il ne sera pas possible de relever durablement ce défi sans tenir compte des différences, des particularités, des caractéristiques de chacun.

On voit bien la difficulté de l'école, des maîtres, à prendre en considération des différences qui crèvent les yeux, qui sont par ailleurs des évidences dans la vie sociale et familiale. On peine dans l'école à repérer les différences et à agir en conséquence. La diversité socioculturelle des élèves, Les différences de maturation physique ou intellectuelle, les différences psychologiques et les diverses formes d'affectivité, les différences de rythmes ou de mode d'apprentissage avec La variété des démarches cognitives: tout cela reste difficile à prendre véritablement en compte.

Nous devons abandonner la Lunette monoculaire cartésienne, construire un regard multiple, appréhender Les élèves dans Leur plurivocité, dans leur complexité. Il importe donc de croiser Les regards.

 

Croiser les regards sur les élèves et sur l'école elle-même. Il faut construire des lieux et des méthodes d'expertise et se doter d'une certaine déontologie pour ces expertises comme pour leur publication. Croiser les regards entre la recherche, les professionnels de l'enseignement et l'ensemble des autres services et institutions. Croiser les pratiques autour des modes d'apprentissage et des technologies du travail scolaire (les temps de transmission et de recherche, les temps de production et d'entraînement. Les temps de correction et d'aide, etc.). Croiser le regard des enseignants et des disciplines, à l'instar de ce qui se passe dans les TPE et dans divers nouveaux dispositifs qui permettent de porter un autre regard sur les élèves qui apprennent. Accueillir la nouveauté, faire varier dans l'évaluation le calibrage des mesures, placer les élèves dans des contextes variés. Croiser les regards en délimitant les champs de compétences et d'intervention:

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quelle place pour les parents, quelle place pour les autres institutions et pour les collectivités ?

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comment sortir du discours compassionnel concernant les «difficultés»? Que ce soit pour les problèmes familiaux, sentimentaux, pour les handicaps, il faut imposer un plus grand professionnalisme en amont pour identifier les besoins et mieux définir en aval les méthodes différenciées de prise en charge.

 

Croiser le regard des élèves et celui des enseignants. Chacun travaille séparément, les moments communs ne sont pas toujours les plus forts ni les plus passionnants. Croiser le regard des élèves qui nous regardent. Que nous dit ce regard ? Ne faut-il pas poser un droit de regard des élèves sur ce qui advient ?

 

Croiser enfin le regard sur le devenir: croisement, interpénétration des modes d'intervention, pour renforcer La mise en perspective de la scolarisation et l'expérience adulte, et pour prévoir des modes de formation non-scolaire. Il convient sans doute de sortir de l'idée restreinte de socle commun. Croiser les regards, prendre en compte la complexité, suppose que l'on ne se sente pas otage de tel ou tel changement de ministre, et que les débats ne soient pas l'occasion d'affrontements politiciens, mais qu'on s'attache à traiter les questions éducatives, les questions de formation du point de vue des enjeux de société.

Mieux connaître les élèves pour les conduire vers la réussite, accueillir la diversité et la conduire vers une communauté, produire de l'universel, cela ne correspond plus tout à fait à la définition traditionnelle de la laïcité. Il ne s'agit plus de revendiquer de la laïcité a priori, mais de travailler à une laïcité en construction, en chantier permanent.

 

Dans sa richesse, ce vingt-deuxième colloque appelle une réflexion.

Le grand courant de la démocratisation quantitative de l'école est quasiment achevé. Mais on constate que la démocratisation qualitative, elle, ne l'est pas du tout. Les grandes évolutions se sont appuyées sur trois grands thèmes :

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l'élève au centre du système, c'est-à-dire l'élève actif et acteur dans les apprentissages, un ajustement du système aux besoins, l'émergence de nouvelles pratiques et de nouvelles compétences;

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le projet d'établissement nouant, dans un ensemble cohérent autour de quelques objectifs clairs, tous les fils des actions éducatives ;

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la décentralisation et l'autonomie relative des établissements.

 

Il me semble que l'on peut dire que cette époque, sans être achevée - rien n'est jamais terminé- se clôt sur elle-même et correspond à un moment de l'histoire où l'institution scolaire restait encore refermée sur elle-même. Il me semble que poursuivre le mouvement de démocratisation suppose une espèce de retournement de la périphérie vers le centre et une redéfinition du partage des compétences entre l'école et ses partenaires. On ne peut faire comme s'il était naturellement évident que les enseignants, par une «douce révolution culturelle», aillent bientôt prendre en charge à la fois La formation. Le partenariat, le copilotage. En rester à cette vision, c'est ne pas choisir.

D'une certaine façon, il s'agit de prendre Le système de plus haut, de plus loin, mais aussi de se brancher sur d'autres systèmes et sous-systèmes. Nous proposons une réflexion sur ce changement de visée et nous souhaitons faire un ensemble cohérent de propositions claires et limitées, susceptibles de servir de levier à la poursuite de la démocratisation qualitative du système scolaire. Ces propositions qui seront d'abord travaillées par le conseil d'administration d'Éducation & Devenir, puis approfondies pendant les journées d'automne, seront proposées à nos partenaires du groupe dit des « Quatorze » et enfin présentées aux futurs candidats à la présidence de la République.

 

Nous proposons d'orienter notre travail autour de quatre axes:

• L'école et son environnement. Les familles, le quartier, les groupes sociaux. Quels nouveaux rôles pour les partenaires, les autres institutions et pour les collectivités ?

• La logique des pratiques professionnelles, des comportements des élèves et des professionnels de l'école. Comment créer les conditions du croisement et l'optimisation de ces effets ?

• Quelle marge de progression se donner? Fixer quelques cibles atteignables et en même temps anticiper les conséquences sur le travail des élèves, des enseignants et de l'ensemble des autres corps de métier gravitant autour des établissements scolaires.

• Quelles méthodes adopter pour accompagner ce processus d'amélioration à tous les niveaux de l'État et des hiérarchies?

Pour réussir dans notre entreprise, nous pensons qu'il est nécessaire de nous donner quelques principes et d'accepter quelques points de méthode:

• Partir des pratiques éprouvées qui fondent la légitimité des actions entreprises.

• Définir les valeurs, les notions qui fondent notre réflexion.

• Nous entourer des garanties qui nous permettent de sortir des discours idéologiques.

• Travailler à générer des consensus autour des objectifs leviers.

• Travailler à l'échange d'informations et de pratiques et à la diffusion de notre travail à travers le réseau des mouvements associatifs, des syndicats et des institutions.

Croiser les regards, croiser les actions, croiser les sens dans tous les sens.