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ORDINA 13  

Jean-Noël GUERINI

Président du Conseil Général des Bouches-du-Rhône, Sénateur

 

Le Conseil général des Bouches-du-Rhône s’est résolument engagé dans la voie du progrès en décidant de doter les collégiens de 4ème d’ordinateurs portables dès cette rentrée scolaire 2003-2004.

Ce dispositif, qui concerne l’ensemble des collèges du département, sera étendu aux élèves de 3ème pour la prochaine rentrée scolaire.

Adaptation au monde d’aujourd’hui et égalité de chance face à cette évolution, c’est le double objectif que poursuit le Département en lançant cette initiative.

 

Toutes les familles de collégiens ne disposent pas des ressources suffisantes leur permettant d’accéder à l’informatique et aux moyens de communication qui lui sont liés, puisque seuls 40% des foyers français disposent aujourd’hui d’un ordinateur à domicile.

Le Conseil général des Bouches-du-Rhône a décidé de ne pas ignorer cette réalité, d’autant plus présente dans une société où l’ordinateur est devenu un outil de travail quotidien, et où l’utilisation des Technologies de l’Information et de la Communication est très largement répandue.

 

Qu’il s’agisse des entreprises ou des administrations,  des associations ou des particuliers, l’utilisation des réseaux informatiques, et en particulier du réseau mondial de l’Internet, offre une source inépuisable d’informations et d’échanges en temps réel.

Une partie des collégiens du département ne pouvait rester en marge de cette évolution. La mise à disposition d’un ordinateur en et hors cadre scolaire permet à chaque élève de s’approprier l’outil et d’en faire bénéficier son entourage.

 

Le dispositif ORDINA 13 n’est donc pas né du hasard et s’inscrit dans le cadre de la politique d’informatisation des collèges et des collégiens développée depuis de nombreuses années par l’Institution Départementale.

Il accompagne, sur le plan pratique, le renforcement du plan d’informatisation des collèges en postes fixes qui vise à atteindre progressivement le ratio d’un ordinateur pour cinq élèves dans l’ensemble des établissements des Bouches-du-Rhône.

Il s’accompagne également, et c’est une première mondiale, d’un programme de câblage et d’équipement en bornes WI-FI de l’ensemble des collèges publics du département.

Chaque collège bénéficie par ailleurs de la présence d’un Assistant Technique Informatique (ATI), recruté et encadré par la Fédération des Amis de l’Instruction Laïque, et chargé de guider les utilisateurs dans le bon usage des équipements mis à leur disposition.

 

Ces initiatives sont conduites sereinement, sans grever les autres budgets consacrés à l’éducation et sans augmentation d’impôts.

Elles ont d’ailleurs fait l’objet d’une concertation élargie qui s’est trouvée renforcée par la constitution, en septembre 2003, d’un Comité de Concertation ORDINA 13 qui réunit une fois par trimestre l’ensemble des partenaires éducatifs.

 

Le dispositif ORDINA 13 est mené avec la volonté d’offrir au plus grand nombre la possibilité d’accéder à de nouveaux champs de connaissances et de compétences.

Car l’éducation est notre avenir.

Et le choix du Conseil général des Bouches-du-Rhône est qu’il soit chaque jour meilleur, meilleur pour chacun de nos enfants.

Premières impressions sur l’utilisation de l’outil informatique (dont Ordina 13) par les élèves de collège

Brice Teissier

ATI au collège Louis Leprince Ringuet

La Fare Les Oliviers

 

Les adolescents présentent une très grande affinité vis à vis de la technologie et des ordinateurs, la vitesse d’appropriation de ces outils est bien plus importante que celle des adultes au point que 75% des adolescents sont familiers avec les ordinateurs (c’est à dire qu’ils n’ont aucune « peur » de l’ordinateur, considérant ce dernier par rapport à ce qu’il peut leur permettre de faire de manière directe ou indirecte) contre un adulte sur trois.

Le plan « Ordina 13 » représente à la fois une accélération de tendance et un fantastique outil permettant aux familles modestes d’avoir accès à un matériel à jour ainsi qu’aux réservoirs de connaissance (Internet, ENS…).

 

Trois mois après le début du plan Ordina 13, il est déjà possible d’en tirer quelques enseignements :

 

v      Les adolescents ont très rapidement perçus les notions de réseau, de compte et de pouvoirs, certains tentent de contourner les limitations pour accéder au contrôle de l’ordinateur dans le but d’installer jeux, logiciels personnels mais aussi, plus marginalement, pour avoir accès aux ressources partagées. La plupart des adolescents perçoivent l’ordinateur comme un « cadeau » mais cette appropriation n’est pas forcément négative dans la mesure où la plupart font tout leur possible pour minimiser les pannes, les dégâts…

v      Si l’aspect ludique prédomine (jeux, musique…), les élèves se dirigent vers une vue multi-usages du PC portable, créant une hiérarchie des tâches (les devoirs avant les jeux), reflétant ainsi une partie de leur éducation mais aussi développant leur conscience « sociétaire » en intégrant les problèmes de civisme.

v      L’utilisation en cours se développe de deux manières : une voie « interne » (le portable est utilisé pour faire des exercices en classe) et une voie « externe » (les élèves font des recherches sur l’encyclopédie ou sur le net pour des travaux du type exposé, devoirs…), encore balbutiante, cette utilisation est appelée à se développer dans les années à venir (intégration de l’outil à la méthodologie des cours, stages de formation offerts aux enseignants…). 

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Morceaux choisis

 

Michel Serres de l’académie Française

Philosophe

 

Résumé d’une audition au Sénat (rapport NTIC 1998)

 

Ce qui se passe aujourd'hui est une révolution très fondamentale : lorsque a été inventée l'écriture, tout un temps culturel a basculé, on a inventé les premières Sciences et le monothéisme ; quand on a inventé l'imprimerie a été inventée la physique.

Or arrive aujourd'hui une révolution de ce genre et cette révolution renverse complètement toutes nos idées concernant la Science. Nous vivons donc une fracture et cette fracture demande qu'on n'ait plus la même idée sur la pédagogie, sur les disciplines. Il faut donc tout repenser : la classe, le lycée, l'architecture, la bibliothèque, le campus.
Ainsi, si le système de conservation du savoir au premier millénaire avant Jésus Christ était de l'ordre du temple, que si, à la Renaissance, avec le livre, il devient de l'ordre de la banque, ce qui caractérise la façon dont le savoir s'organise maintenant, c'est qu'au-delà même du réseau, il fait espace.

Le plus important n'est pas tant le tuyau, c'est-à-dire l'interconnexion, mais bien plutôt d'imaginer des systèmes de circulation, ainsi que de cartographie de l'espace : les premiers permettant d'aller très vite d'un savoir à l'autre, les seconds permettant de s'y " retrouver " sur un territoire.

Le problème de l'éducation est d'abord un problème pédagogique, ensuite un problème de formation professionnelle ; enfin un problème de citoyenneté. Les trois missions se recouvrent l'une l'autre.

Il faut donc inventer un nouveau type d'enseignant; le nouvel enseignant doit être un réel pédagogue, et non plus un simple instructeur ; une sorte d'accompagnateur. L'Education nationale fourmille d'initiatives locales. Il faut donc partir de la base et imaginer une structure en réseaux libre avec le moins de hiérarchies et contrôles possibles

 

Pierre Lévy

Le Journal du net 25/08/03

 

L'intelligence collective existe dès les sociétés animales, des fourmilières aux hardes de babouins. Elle accomplit un saut fantastique avec l'humain du fait du langage, de la technique et des institutions complexes qui caractérisent notre espèce.

Le langage oral porte l'intelligence collective de la tribu, l'écriture porte l'intelligence collective de la ville, et le futur Web sémantique exprimera l'intelligence collective de l'humanité mondialisée interconnectée dans le cyberespace.

Les trois modalités classiques de l'esprit… et de l'action : savoir (représentations), pouvoir (compétences), vouloir (intentions).

Sans finalités fortes et convergentes l'action est incohérente. Sans représentations de soi et de l'environnement, elle est aveugle. Sans coordination des compétences, elle est impuissante. Ma théorie de l'intelligence collective veut expliquer l'interdépendance pratique de ces trois modalités de la cognition humaine.

Les écritures idéographiques, l'alphabet, l'imprimerie et les médias électroniques ont joué un rôle important dans cette évolution culturelle vers une intelligence collective plus efficace. Dans ces derniers cas, il s'agit d'une augmentation de la puissance du langage. Il est clair qu'une bibliothèque ou un fichier manuel partagé est déjà un dispositif de mutualisation du savoir.

Le Web accomplit trois grandes mutations :
1) tous les documents et tous les types de représentation sont virtuellement interconnectés.
2) tout document présent en un point du réseau est virtuellement présent partout dans le réseau.
3) les signes ont acquis une capacité d'action et d'interaction autonome grâce au logiciel. 

Alain BOUVIER

Résumé d’une audition au Sénat (rapport NTIC 1998)

 

Pourquoi les nouvelles technologies n'ont elles pas pénétré suffisamment l'école ? Pourquoi n'ont-elles pas bouleversé les pratiques pédagogiques ?

Un enseignant a toujours eu et a toujours tendance à enseigner comme il a lui-même été formé ; or, même si il a la connaissance du maniement de l'outil informatique, il a tendance à le mettre sur le même plan que la diapo que, dans en temps en temps l'on projette, ou encore à le considérer comme le labo, là, à côté, que l'on utilise de temps à autre ; même si les enseignants ayant beaucoup d'idées novatrices sont très nombreux, reste présente l'idée, ancienne, qu'il ne faut surtout pas laisser le " pouvoir " aux informaticiens. L'idéal serait d'agir à la fois sur la formation initiale et sur la formation continue dans le milieu enseignant : il faut trouver le moyen de proposer des activités de formation qui amènent naturellement à travailler autrement qu'avec du papier et un crayon. 

Bernard Cornu

Directeur d’IUFM

Résumé d’une audition au Sénat (rapport NTIC 1998)

 

Les nouvelles technologies ne sont pas simplement

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un outil supplémentaire pour l'enseignement. Elles influent sur les savoirs eux-mêmes, sur les disciplines elles-mêmes. On est en train de passer :
d'un savoir papier à un savoir numérisé,
d'un savoir statique à un savoir dynamique, évolutif.

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le métier d'enseignant va évoluer : de distributeur de savoir, l'enseignant va devenir conseil, tuteur,

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l'élève change lui aussi bien sûr,

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au sein des établissements d'enseignement, il faudra sans doute un meilleur partage des responsabilités et des compétences avec d'autres métiers (ingénieurs, techniciens) ;

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l'établissement scolaire devra s'adapter à toutes ces évolutions : nouvelle organisation, nouveaux modes de travail (plus de flexibilité, plus de travail en équipe,....).

Il n'y aura sans doute pas un modèle unique d'établissement. 

Luc Ferry

Président du Conseil National des Programmes

Résumé d’une audition au Sénat (rapport NTIC 1998)

 

Le milieu intellectuel a toujours fait preuve d'une certaine réticence à l'égard de tout ce qui est nouvelles technologies ; la France offre d'ailleurs une assez longue histoire de la critique de la modernité.

Dans un certain milieu enseignant, on retrouve la même réticence à l'égard de l'entrée de ces nouvelles technologies à l'école. Chez les littéraires, cela correspond à " faire entrer le loup dans la bergerie ", avec l'idée que les enfants regardent déjà suffisamment la télévision, qu'on va tuer le livre, privilégier tout ce qui est de l'ordre de l'émotion contre la réflexion, que c'est contraire à la distanciation nécessaire pour véritablement apprendre les savoirs fondamentaux...

Le risque de créer une atomisation du social est réel, le rôle fondamental de la télévision étant de créer une sorte " d'espace public privé ", tout au moins un espace commun. Souvent on discute, le lendemain, d'une émission vue à la télévision la veille : il se crée ainsi un espace de sens commun autour de cet objet télévisuel. 

Roger-François Gauthier

Directeur général du CNDP

Résumé d’une audition au Sénat (rapport NTIC 1998)

 

Les questions qui nous arrivent par les nouveaux supports, principalement Internet, sont pour l'école, extrêmement dérangeantes : jadis, une fois les programmes élaborés, ils " passaient " dans les manuels et la porte de la classe se refermait sur ces savoirs qui étaient figés pour quelques années ; aujourd'hui, on est confronté à une profusion documentaire, un contact, à portée de clavier, avec des savoirs savants qui étaient jusqu'ici tenus à distance, filtrés, transformés en savoirs scolaires. Le public des enseignants est très spécifique, segmenté. Chacun se reconnaît plus dans sa discipline que dans le métier d'enseignant commun à tous ; c'est un secteur où les généralisations sont très difficiles.

Si on veut que les choses avancent, il faut certes former les enseignants mais aussi être disponible pour les aider partout où ils se trouvent ; il faudrait ainsi multiplier les lieux et les ressources : il n'y a pas aujourd'hui assez d'endroits où, de façon simple, immédiate, les enseignants peuvent consulter des produits numériques, consulter Internet. Il faut aussi leur faciliter la tâche en leur montrant des usages. 

André Hussenet

Directeur de l’INRP

Résumé d’une audition au Sénat (rapport NTIC 1998)

 

L'utilisation d'Internet à des fins pédagogiques peut constituer une révolution si l'accès à la toile est offert massivement, à l'école et à domicile, aux maîtres comme aux élèves.

La pratique généralisée du cours magistral, l'utilisation assez faible du manuel au collège et au lycée ont des racines profondes. Nous agissons souvent comme si la compréhension du monde par les élèves n'était possible que par la parole du maître.

[La] proposition d'équiper rapidement et massivement les écoles d'ordinateurs reliés à l'université revient :
à généraliser la possibilité pour les élèves d'accéder, directement, au savoir ;
à proposer aux maîtres un changement majeur, quand bien même l'incitation ne serait pas nouvelle, qui consiste à organiser, si possible en l'individualisant, le travail intellectuel de l'élève et à faciliter le cheminement de tous et de chacun.

Or les enseignants n'ont pas, aujourd'hui, adopté massivement cette posture.

Nier la difficulté des enseignants à modifier leurs attitudes serait se condamner à l'immobilisme. Ils ont besoin d'être accompagnés pour maîtriser l'usage des technologies pour aider les élèves à mieux apprendre et plus efficacement. 

Alain Prestat

Ancien Président de Thomson Multimedia

 

La révolution vient du rapprochement de trois mondes qui, jusqu'à présent, étaient distincts : l'électronique grand public, les télécommunications et l'informatique ; c'est une révolution d'une ampleur tout à fait considérable ; c'est la porte entre-ouverte par Gutenberg sur le savoir qui est en train de s'ouvrir en grand. Dans le millénaire, il y aura ainsi eu deux transformations fondamentales au niveau du savoir : l'imprimerie et la révolution actuelle.

   
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Des pyramides du pouvoir aux réseaux de savoirs

Rapport d'information 331 - 1997 / 1998

http://www.senat.fr/rap/r97-331-t1/r97-331-t151.html

René Trégouët, Sénateur

Extraits

Une polémique s'est développée dans les colonnes du quotidien Le Monde, à partir de la publication d'un point de vue de M. Robert Redeker selon lequel " Internet en milieu scolaire ne revêt aucun intérêt tant qu'on s'en tient fermement à la conception républicaine et humaniste de l'école ".
Pour ce professeur de philosophie, fabriquer des internautes ou instituer des citoyens est, pour l'école, une alternative antithétique (on ne voit pourtant pas, a priori, pourquoi l'un empêcherait l'autre). Selon lui, la pauvreté d'Internet s'oppose à la richesse de la " haute culture livresque ", et l'école de la République à celle de Microsoft. De sorte qu'il serait bien plus important d'étudier les humanités que de se laisser apprivoiser par l'idéologie de Bill Gates, car " sur le web (qui n'a pourtant pas été inventé par la firme de Seattle) on ne communique pas, on échange essentiellement des informations et des banalités ". " Ne faisons pas de l'enfant - conclut-il - un agile animal informaticien (il aura toujours le temps d'apprendre, plus tard, à se servir des outils correspondants) avant d'en faire un homme ".
Face à cette thèse, M. Redeker parle de " fanatisme technologique ". Tandis que l'auteur d'un des articles du numéro d'octobre 1997 du " Monde de l'Education ", Luc Cedelle, évoque, pour sa part, une prétendue vague actuelle de " technolâtrie " selon laquelle " tout ce qui est estampillé "nouvelle technologie" serait beau, bon et juste par nature ". Dénonçant le méli-mélo pédagogique, incitation au zapping, de certains sites web, il estime que le multimédia ne doit être ni un dérivatif (pour faire diversion au chômage), ni une utopie (comme l'industrie lourde dans la mythologie communiste). Mais il ne dénigre pas pour autant ce " formidable outil de courrier électronique et de recherche documentaire... premier espace planétaire de communication " que constitue Internet et dont toutes les conséquences ne peuvent pas encore être discernées.
Répondant à Robert Redeker dans un numéro postérieur du Monde, Bernard Maître, directeur général de CDC Innovation, fait valoir que " Tenir Internet en dehors de l'école est évidemment le moyen le plus sûr, le plus efficace et le moins coûteux, de livrer des générations entières de jeunes au modèle de la soumission ". De sorte qu'il se livre à l'éloge de " la croyance dans les vertus de l'échange " qui permet d'instituer les communautés sur Internet.
Pour autant, il faut le souligner : tous les débats relatifs aux usages pédagogiques des nouvelles techniques d'information et de communication ne sont pas aussi manichéens.
Certes - et c'est sans doute le principal -, les enfants adorent manier cet outil et se montrent aussi enthousiastes que motivés à son endroit. Le problème, selon le reportage intitulé " l'illusion informatique ", est de savoir ce qu'ils apprennent vraiment.
Par ailleurs, l'apprentissage logiciel et la plongée dans le virtuel finissent par donner aux enfants un mode de pensée non séquentiel qui les conduit - selon l'enquête de Todd Oppenheimer - à mal discerner les liens de causalité ou à considérer la réalité comme importune.
Enfin, l'usage du couper-copier-coller inciterait les élèves, d'après Oppenheimer, à faire des montages de textes plutôt qu'à élaborer une réflexion personnelle.
Il ressort de ces réflexions, pour la plupart nuancées, des conclusions de bon sens, auxquels les personnes sensées, ni technolâtres ni technophobes, ne peuvent que souscrire. En tout état de cause, elles ne remettent pas en cause l'usage des nouveaux outils concernés dans l'enseignement.
Il existe, tout d'abord, une forte adéquation entre les possibilités offertes par les nouvelles techniques et ce que doivent être, à mon sens, de tout temps, les objectifs essentiels de la pédagogie :
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susciter le désir d'apprendre chez l'élève ;

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respecter son individualité.

Joie d'apprendre, plaisir de découvrir par soi-même, en s'amusant, y-a-t-il de meilleures façons de susciter le désir de savoir ?
La deuxième priorité éducative de base que les moyens informatiques permettent de satisfaire, consiste à replacer l'élève ou l'étudiant au centre du système éducatif. " La technologie permet non seulement l'abondance du savoir - souligne Antoine REVERCHON dans " Le Monde de l'Education " - mais aussi l'individualisation de sa transmission. "
Cet objectif de recentrage sur l'élève, désormais inscrit dans la loi, implique un travail plus autonome dans les cycles de base, suppose des dispositifs de soutien et des parcours différenciés au collège, et sollicite le télé-enseignement de matières à option au lycée.
En même temps que l'individualisation de ses modes d'acquisition, la technologie permet également l'abondance du savoir. Le réseau est d'abord un démultiplicateur puissant de l'accès aux ressources.
L'interactivité définie par Louis CHAMMING'S, chercheur à l'INA, comme la possibilité offerte à l'élève d'ajuster en temps réel sa relation à son environnement éducatif, est - selon lui - " un des apports les plus incontestables des outils pédagogiques, notamment dans le cadre de la formation à distance ".
Le multimédia offre également d'autres possibilités intéressantes : Selon le numéro des dossiers de l'audiovisuel de septembre-octobre 1997, ses deux principaux atouts sont la multimodalité (appel simultané à plusieurs fonctions sensorielles) et le principe de contiguïté (qui permet de présenter textes, sons et images de façon associée plutôt que séquentielle).
Le lien social se crée d'abord dans la communauté de base qu'est la classe, entre les enfants et avec le monde des adultes, représenté par l'encadrement pédagogique.
L'ouverture sur la société, celle de son pays et des autres nations, se fait à travers les activités d'éveil et de découverte.
De ces différents points de vue, l'apport des technologies d'information et de communication peut être précieux. Le travail en équipe tout d'abord devrait s'en trouver favorisé.
" Le réseau n'est pas seulement un démultiplicateur puissant de l'accès aux ressources - est-il rappelé dans les dossiers de l'audiovisuel - c'est aussi un outil de communication horizontale entre élèves, entre classes, entre établissements... ".
L'utilisation de l'ordinateur, loin d'isoler l'élève, développe au contraire, par l'interactivité, ses relations et provoque une sorte de mutualisation de l'apprentissage.
" On ne peut pas apprendre simplement en recevant - souligne Joël de ROSNAY - comme l'a montré PIAGET depuis longtemps, on apprend en recréant. Une éducation moderne doit être à la fois personnelle et recréée dans un environnement changeant. "
Les activités éducatives, pour être créatrices, supposent que soient donnés aux enfants des moyens d'expression : aujourd'hui, le vieux journal scolaire du mouvement Freinet devient création de pages multimédias sur le Web. Le but poursuivi, dans ce cas, est aussi la communication ; il s'agit donc, en même temps, d'une contribution à la mission éducative de socialisation.

Un nouvel espace de savoir se crée, souligne les dossiers de l'audiovisuel. " Le savoir devient un continuum multidimensionnel de représentations dynamiques et interactives... Notre approche essentiellement analytique doit être complétée, maintenant, par une approche systémique ".
" Il faut - estime Joël de ROSNAY - arrêter d'ajouter des disciplines et de fragmenter les connaissances en petits territoires juxtaposés... Faire des synthèses et avoir une vision plus globale qui, bien entendu, n'est pas incompatible avec la vision analytique traditionnelle ".

Le professeur est, vis-à-vis de l'élève, un médiateur par rapport au savoir. Il lui propose un abrégé consistant qui lui évite la lecture effective de tous les ouvrages constitutifs d'un savoir disciplinaire quelconque. Cette médiation, contrairement à celle du livre ou des moyens multimédia, est humaine, proche et vivante. Et les outils pédagogiques, traditionnels et modernes, ne constituent qu'un complément de cet autre support de savoir, essentiel, qui est le maître lui-même.
Médiateur vis-à-vis du savoir, l'enseignant est aussi un accompagnateur de l'élève, dans son processus d'apprentissage de plus en plus autonome et individualisé.
" L'enseignant, - est-il écrit dans le numéro précité des dossiers de l'audiovisuel, demeure le régulateur, le prescripteur et l'évaluateur de l'autoformation de l'apprenant. "
Joël de ROSNAY considère que le rôle de l'enseignant devient fondamental dans la mesure où il n'est plus simplement le détenteur d'un savoir destiné aux ignorants mais " un catalyseur, le chef d'orchestre d'un système de communication dans lequel il permet à chacun, tel Socrate en son temps, d'accéder à la connaissance à son rythme et selon ses capacités. "

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UK Children Go Online

Cette recherche sur la e-société porte sur les jeunes de 9 à 19 ans, en étudiant leur démarche, la communication, les dangers et les inégalités (la « fracture » numérique). Le texte ci-dessous tente de donner les grandes lignes de cette recherche (avec l'aide de J. Chamard, professeure d'Anglais).

Le texte intégral en anglais est téléchargeable (format *.pdf)

 

v      Les enfants comme experts d’Internet : même si les parents utilisent Internet, les enfants se considèrent comme plus experts. Ils ont un statut social et un pouvoir domestique inédits : les adultes ont besoin de leur expertise. Ce fossé (« gap ») des générations pourrait être durable.

v      L’Internet comme média souple. Ils l’utilise indifféremment pour trouver de l’information pour l’école, communiquer avec des amis (courriels, chat, jeux), télécharger de la musique, visiter des sites…

v      Apprentissage par la pratique : ils apprennent en faisant (« Learning by doing ») plutôt qu’en étudiant les règles.

v      Télécharger, pirater (« hacking ») et communiquer sont le noyau de leur pratique et de leur culture.

 

Les motivations des jeunes pour Internet :

Ø      Contacts constants avec les amis

Ø      Jeux d’identités (de rôles ?)

Le contenu conversationnel est souvent superficiel : ce qui compte c’est la proximité avec les amis. Les contacts sociaux existants, loin d’être amoindris, sont plutôt renforcés. S’il peut y avoir des contacts avec des amis ou parents lointains, les réseaux sont plus locaux que globaux.

Le chat (messagerie instantanée) sert à jouer à être quelqu’un d’autre. Pour les amis, la messagerie SMS est préférée. Alors que les adultes privilégient la conversation en face à face, les jeunes jouent de toute la gamme – courriel, SMS, chat, téléphone – selon leurs besoins :

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Souhait d’une réponse immédiate ou pas

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Complexité du message

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Mobilité

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Coût

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Recherche d’intimité…

 

Ils manifestent peu d’intérêt pour la communication politique ou pour la création de contenus (site).

 

Les dangers sont de trois ordres :

Ø      Pornographie (Internet est associé à pédophilie)

Ø      Spams

Ø      Virus

Les jeunes n’ont pas l’esprit critique d’un adulte.

Ils connaissent des expériences variées de pornographie, d’accès plus facile que par d’autres sources. Les garçons plus que les filles. Parmi les plus âgés, beaucoup se disent indifférents. Les points de vue divergent quant aux restrictions à l’accès à la pornographie en ligne.

Une conscience plus forte des dangers  des « chats » : ils perdent en popularité, supplanté par les SMS. Les campagnes sur leurs risques semblent avoir porté leurs fruits. Cependant, certains adolescents prennent des risques dans la recherche de nouveaux contacts en ligne.

Les parents essaient d’imposer des restrictions, mais le filtrage restrictif à la maison comme à l’école frustre les jeunes. Ils considèrent la surveillance et le suivi comme un empiètement sur leur espace personnel ; ils mettent donc en place des tactiques de contournement.

 

Bien que l’enthousiasme pour l’Internet soit considérable, il est moindre que pour d’autres activités : sorties, rencontres amicales, Télé… Les jeunes pensent qu’ils pourraient faire ce dont ils ont besoin et envie sans Internet, même si c’est un outil qui facilite la vie.

Mais les jeunes qui n’ont pas accès à Internet se sentent exclus. Leurs possibilités de communication avec leurs amis sont moindres. Ils se sentent à l’écart, quand la conversation porte sur des sites ouèbes fréquentés.

 

Recommandations

 

  1. Développer l’esprit critique et le pouvoir d’évaluation

Il faut aller au-delà de la technique pour faire acquérir une conscience critique de la qualité et de la crédibilité des sites ouèbes et cela en fonction des objectifs que l’on veut atteindre. Les adultes doivent continuer à valoriser l’expertise des jeunes tout en les guidant dans l’usage de l’Internet.

  1. Confiance des parents dans leurs enfants

Se contenter de surveiller, restreindre, contrôler esncourage l’évasion de la part de l’enfant plutôt que sa coopération. Bien que parfois naïfs quant aux agressions externes, les adolescents veulent protéger leur vie privée vis-à-vis des parents. Ceux-ci ont donc besoin d’information et de savoir-faire pour discuter des risques avec leurs enfants. Une négociation explicite est importante pour des rapports de confiance parents-enfants.

  1. L‘amélioration des niveaux de conscience de la sécurité sur le net

Beaucoup de jeunes ont une expérience directe de la pornographie en ligne et beaucoup connaissent des histoires de rencontres douteuses sur les chats.

Comme pour d’autes campagnes d’information publiques, il est plus facile de transmettre le message que d’assurer des pratiques sûres en toute circonstance. Une partie des jeunes continuent d’avoir des comportements à risques : il faut donc des campagnes ciblées.

  1. Multiplier les occasions de participer de façon active et créative

L’analyse des pêles d’intérêt des jeunes montre qu’ils vont vers la musique, la mode, les animaux, l’environnement. La politique, au sens le plus large,  ne les attire pas. Peu d’entre eux aspirent à créer leur propre site. Il y a donc un défi considérable à fournir aux jeunes un accès stimulant à des possibilités de création

  1. Surmonter la fracture numérique

Même si les conditions d’accès se développent, tous les enfants  n’ont pas un accès libre à Internet. On ne dispose pas d’enquête sur les conséquences sociales et éducatives de cette exclusion.

Si l’utilisation d’Internet est restreint à l’école, les enfants qui n’ont pas d’accès domestique se sentiront exclus du cercle des « pairs ».

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NEW TECHNOLOGIES : MIRAGE OR MIRACLE ?*

* Le titre du cahier n° 4 s'est inspiré de celui-ci avec l'accord de l'UNESCO que nous remercions.

Le document en anglais est téléchargeable. Le texte qui suit n’est pas une traduction(mais il a été fait avec l’aide de Julie Chamard, professeure d’anglais) mais tente de donner un aperçu de son contenu.

 

L’arrivée des TIC est considérée par certains comme une révolution capable d’offrir une meilleure éducation à plus d’étudiants.

Mais ce n’est pas la 1ère fois qu’une nouvelle technologie suscite de tels espoirs.

Dès 1841, l’inventeur du tableau noir porte sa trouvaille au pinacle. En 1922, Edison prophétise que les films supplanteront les livres. Plus modestement dans les années 40 ont met de gros espoirs dans le cinéma scolaire. En 1957 c’est au tour de la télévision. L’ordinateur qui apparaît au début des années 60 va être considéré comme la plus grande invention après celle de l’imprimerie par Gutenberg. Et pour le 3e millénaire on prédit qu’Internet va révolutionner la manière d’enseigner.

Mais il n’est pas facile de révolutionner l’éducation. Les effets de l’invention de l’imprimerie se sont développés sur plusieurs siècles. Cependant, l’hypothèse qu’une utilisation judicieuse d’une combinaison de technologies pourrait améliorer l’éducation et en baisser les coûts est à étudier.

La preuve n’en est pas faite : une étude israélienne, portant sur l’hébreu et les maths, n’a pas mesuré de différences significatives entre le groupe témoin et celui qui avait accès aux ordinateurs.

De plus, les TIC demandent des investissements massifs que ne peuvent consentir que les pays riches : si aux Etats-Unis de 1996 à 1999 on passe de 14% à 63% d’utilisateurs, si même au Brésil de 1998 à 200 on passe de 1,7 M d’utilisateurs à 9,8 M., en Ouganda un nombre d’utilisateurs décuplé veut dire le passage, dans la même période, de 2500 à 25000 Les inégalités se mesurent même en Europe : 1 ordinateur pour 5 élèves dans le secondaire en Norvège, 1 pour 35 au Portugal.

Les TIC diffèrent des médias précédents par l’interconnexion et l’interactivité. Le rapport temps-espace a changé : la présence physique de l’enseignant n’est plus nécessaire, plusieurs médias sont utilisables simultanément, les envois sont instantanés, l’adaptation au niveau de l’élève peut se faire. Les limiter à du copier/coller serait sans intérêt. Leur utilité serait faible si on les réduit à des manuels ou cours numérisés. La formation des enseignants, qui ne doit pas se limiter à l’utilisation de l’outil mais porter sur la manière d’enseigner, est donc essentielle.

 

10 erreurs à éviter*

  1. S’assurer que les gens n’ont pas été démoralisés par un usage précédent de l’ordinateur.

  2. Prévoir les budgets de maintenance : beaucoup d’échecs sont dus aux pannes multiples.

  3. Choisir judicieusement le matériel.

  4. Bien former les professeurs.

  5. Utiliser les ordinateurs dès qu’ils sont installés.

  6. Choisir entre les trois écoles de pensée sur l’usage de l’ordinateur :

a.     Simple « machine à enseigner » (orthographe, calcul)

b.     Développer les « outils » de la pensée

c.      Préparer les étudiants à un usage professionnel futur.

  1. Ne pas être trop ambitieux au départ, car le plus complexe est d’enseigner comment penser.

  2. Se servir de l’ordinateur pour économiser temps, énergie et travail : l’usage le plus courant dans les écoles porte sur des batteries d’exercices.

  3. Mettre à niveau le matériel.

  4. Apprendre aux élèves à se servir de l’ordinateur comme outil de production : traitement de textes, base de données, outils graphiques…

 

* Ces dix commandements oublient toute la dimension internet/communication (courriels, tchate, plate-forme d’échanges et de travail).

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