Voile islamique

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La loi sur la laïcité a été adoptée (Nel Obs 04/03/04)

Forum

Après le rapport Stasi, l'essentiel du débat se retrouve dans le dossier laïcité.

Un remarquable dossier du Nouvel Observateur en ligne

un texte de P. Bourdieu de 1989 au moment de la 1ère affaire du voile à Creil (texte inédit)

Laïcité, communautarisme et foulard : vrais et faux débats Par Jocelyne Césari et Jean Baubérot

 

 

Ce que disait la loi

Nouvel Obs 15/05/03

 

Extraits

Dans un avis du 27 novembre 1989, le Conseil d’Etat a estimé que le port de signes religieux « n’est pas par lui-même incompatible avec le principe de laïcité», sauf s’il constitue «un acte de pression, de provocation, de prosélytisme ou de propagande» ou s’il entrave les activités d’enseignement. Il revient donc aux chefs d’établissement d’apprécier au cas par cas. En 1994, une circulaire de François Bayrou, toujours en vigueur, précise l’interdiction de «signes ostentatoires». En cas de non-respect, l’élève encourt l’exclusion. Mais les tribunaux administratifs annulent le plus souvent cette sanction, au nom du droit pour tous d’accéder à l’enseignement(un dossier de C. Lepage téléchargeable sur les jurisprudences)

 

 

L'école sans le voile

Le Monde 08/04/07

Extraits

Près de trois ans après son entrée en vigueur, à la rentrée qui a suivi, la loi du 15 mars 2004 a chamboulé la vie de certaines jeunes filles, mais apaisé la vie dans les collèges et les lycées.

"Si le but de ce texte était de supprimer le voile à l'école, alors c'est effectivement un succès ; mais s'il s'agissait de défendre la laïcité, c'est plus discutable", commente Nora Rami, l'une des responsables du Comité 15 mars et libertés, mis en place avec le soutien de l'Union des organisations islamiques de France (UOIF).

Pour les responsables de collèges et de lycées, la loi constitue en revanche un indéniable succès. Fortement marqué par les tensions de l'année scolaire 2003, l'encadrement savoure "le calme", "l'apaisement" qui règnent désormais sur le front du "foulard islamique".

Le ministère fait valoir qu'au cours de l'année scolaire 2003-2004, environ 1 500 élèves manifestaient ostensiblement une appartenance religieuse.

A la rentrée 2004, seuls 639 cas ont été recensés, dont "550 ont trouvé une solution par le dialogue". A la rentrée suivante, un seul cas d'exclusion a été signalé. Le Monde 08/04/07

Rapport sur l'Application de LA LOI DU 15 MARS 2004 SUR LE PORT DES SIGNES RELIGIEUX OSTENSIBLES DANS LES ÉTABLISSEMENTS D’ENSEIGNEMENT PUBLICS Hanifa Chérifi juillet 2005

Plus l'ombre d'un voile
Les affaires de voiles islamiques et de signes religieux ont quasiment disparu du paysage scolaire. Pour autant, certaines critiques de la loi de 2004 demeurent

 

La Croix 21/10/05

Extraits

Un an après son entrée en application, la loi sur les signes religieux, votée le 15 mars 2004, semble bien être entrée dans les mœurs. Selon un recensement établi par la cellule de veille de l’éducation nationale, seuls douze «cas difficiles» ont été enregistrés aux premiers jours de septembre. Neuf situations sont rentrées dans l’ordre.

L’inspectrice de l’éducation nationale Hanifa Chérifi dressait en juillet un bilan positif d’une première année d’application de la loi.

Sur les 28 recours introduits contre des décisions d’expulsion d’élèves, les douze premiers jugements ont confirmé l’attitude de l’administration. N’ayant pas trouvé la faille juridique, des organisations islamiques semblent avoir renoncé à cette stratégie de l’affrontement.

Certains spécialistes restent convaincus que le débat a été artificiellement jeté sur la place publique. Dans un livre sorti discrètement au mois de mai, des chercheurs dénonçaient la politisation du débat sur le voile (La politisation du voile, Éd. de l’Harmattan).

«Au bout du compte, on est passé d’une tradition libérale à une conception néonationaliste de la laïcité», juge Françoise Lorcerie. Et pour elle, ce sont les jeunes filles musulmanes qui ont fait les frais de la polémique. «Les élèves sont confrontés à un problème de construction d’identité. Le voile n’est qu’un symptôme de ce travail sur soi. Et l’école s’enferme en ne prenant pas en considération cette quête identitaire.»

Selon le président de la Ligue de droits de l’homme, Jean-Pierre Dubois, la loi sur le voile a abouti au contraire à «une humiliation supplémentaire». «Parler de réussite est d’un grand cynisme, poursuit-il. En s’en prenant à un symbole, la loi a supprimé la visibilité du problème de l’intégration, mais n’a pas répondu au problème en tant que tel. Qu’est-ce que fait cette France de la peur, pour aider les jeunes à trouver leur place ? Ces jeunes filles aspirent dans leur immense majorité à faire des études, à exercer un métier, à s’émanciper. Or, une fois de plus, on vient de les stigmatiser.» La Croix 21/10/05

Françoise Lorcerie, chercheuse au CNRS, fait le bilan, un an après :
«La loi sur le voile crée la paix des armes mais ne règle rien»

Libé 06/10/05

Extraits

Françoise Lorcerie est chercheuse au CNRS (Institut de recherche et d'études sur le monde arabe et musulman, Iremam). Dans l'ouvrage la Politisation du voile en France, en Europe et dans le monde arabe (L'Harmattan, 2005) qu'elle a dirigé, elle étudie pourquoi et comment le voile est devenu une affaire en 2003.

Les filles se soumettent au règlement. Pour elles, l'enjeu scolaire est important, et, pour l'instant, elles n'ont pas trop de moyens d'éviter l'enseignement public, même si certaines ont trouvé de la place dans le privé.

Avec cette loi, on fait l'hypothèse que les filles portent le voile sous pression, ce qui est peut-être vrai, certaines vivent effectivement une situation d'oppression familiale ­ avec ou sans voile, d'ailleurs. Des filles «protégées» par le foulard ont été autorisées à poursuivre des études au lycée et en fac, ce qui n'aurait peut-être pas été le cas sans cela. Mais plus largement, le port du foulard répond à des comportements très pluriels. Il faut cesser de voir systématiquement le voile comme le cheval de Troie de l'islamisme dans la République.

[La loi] peut accroître un sentiment d'humiliation. Or l'expérience scolaire des immigrés comporte déjà sa part de frustration, de non-reconnaissance, de discrimination. Mettre le voile, c'est finalement revendiquer une appartenance stigmatisée.

On assiste à une montée en puissance de la fierté nationaliste qui était le propre jusque-là de la droite extrême. Le culturalisme national se pare aujourd'hui de la valeur de laïcité. Porter le voile, c'est s'exposer aux insultes. Cette loi a libéré des comportements qui ne s'étaient jamais vus chez des agents publics. J'ai des collègues universitaires qui se permettent de refuser de faire passer des examens à des filles voilées alors que c'est illégal, ils le savent. On présente comme un problème inquiétant le fait que des lycéennes remettent leur voile sur le trottoir, alors que c'est un droit absolu et qu'elles ne font qu'appliquer la loi. Libé 06/10/05

 
Loi sur le voile: le ministère content
Le texte aurait un réel effet de dissuasion chez les élèves

Libé 26/08/05

Extraits

Selon Hanifa Chérifi, «nombre de jeunes filles et de parents ont vécu comme une libération l'application» de ce texte. Celui-ci n'a pas suscité non plus de crispation identitaire poussant des jeunes filles à se voiler. Selon l'inspectrice générale, «le nombre total de signes religieux recensés au cours de l'année 2004-2005 est de 639», ce qui représente «moins de 50 % des signes recensés l'année précédente». Sur ce total, on compte 626 voiles islamiques, onze turbans sikhs et deux grandes croix. 287 de ces signes étaient portés au lycée, 337 au collège, 15 dans le primaire. L'essentiel se concentre dans six académies abritant une population immigrée importante : Strasbourg, Lille, Créteil, Montpellier, Versailles et Lyon.

Parmi les élèves concernés, la plupart ont renoncé au port des signes religieux après discussion avec les chefs d'établissements. Chez les autres, ceux qui ont refusé d'obtempérer, deux attitudes. Plutôt que d'être traduits devant le conseil de discipline, 96 ont opté pour des solutions alternatives. «Celles-ci consistent en des inscriptions dans le privé, en France ou à l'étranger, des démissions (pour les plus de seize ans) et surtout 50 inscriptions au Cned (Centre national d'enseignement à distance, ndlr)». Enfin, 47 sont passés devant le conseil de discipline et ont été exclus : 44 pour port de voile islamique, 3 de turban sikh. Parmi les exclus, 21 se sont inscrits au Cned.

Pour l'auteure du rapport, la loi a atteint son objectif : dissuader les jeunes musulmanes de porter le voile. Libé 26/08/05 Voir aussi : Un rapport dresse un bilan positif de la loi sur le voile à l'école Le monde 27/08/05

Selon le ministère de l'Education, seuls 47 élèves ont été exclus depuis la rentrée 2004
Grâce à la loi sur le voile, le communautarisme a reculé à l'école

Le Figaro 02/06/05

Extraits

Les responsables de l'Education nationale sont unanimes : «La loi sur la laïcité a porté ses fruits.»

Sur le terrain, les chefs d'établissement ont apparemment reconnu les signes religieux sans difficulté, car la plupart des filles sont venues «très couvertes». A Strasbourg, un bastion de la lutte pro-voile, le rectorat rappelle que 500 jeunes filles suivaient les cours voilées en 2003-2004. Seules 17 ont été exclues.

Au total, s euls 47 élèves – dont 3 sikhs – ont été exclus après des mois de dialogue. Parmi eux, «des militants et des filles d'origine turque, souvent soutenues voire encadrées par leurs familles».

Les mouvements musulmans hostiles à la loi décrivent une autre réalité. Selon eux, quelque 800 filles ont été obligées d'enlever leur voile, une centaine sont parties à l'étranger et une autre centaine ont été déscolarisées.

Finalement, la loi de mars 2004 semble avoir dégagé l'école des tensions religieuses. La rentrée dira s'il s'agit d'une paix véritable ou d'une simple trêve. Le Figaro 02/06/05

Il est regrettable que l'ethnicisme parasite le débat pourtant salutaire contre le colonialisme.
Quand la raison s'affole

Daniel Bensaïd, philosophe, université Paris-VIII. Samuel Johsua, professeur en sciences de l'éducation, université de Provence. Roseline Vachetta, ex-députée européenne de la LCR

Libé 21/03/05

Extraits

Nous avons condamné, pour notre part, la loi Chirac sur «les signes ostensibles» comme discriminatoire. Nous n'avons pas renoncé pour autant à voir dans le port du voile un signe d'oppression des femmes. Il y a, à gauche, un débat parfaitement légitime à propos de questions comme la laïcité et sur la signification du voile présenté comme traduction d'une injonction religieuse. Comment admettre le retour de ces pratiques si détestables qui assimilent à l'ennemi (ici, au racisme colonial) ceux et celles qui ne partagent pas l'analyse de l'appel sur cette question ? Peut-on accepter, au nom d'une culpabilité «postcoloniale», de qualifier de féministe un «féminisme islamique» qui mêle les notions d'«être féminin», de «complémentarité» des sexes, de défense de la famille comme base indestructible de la société ? Pris du point de vue de celles qui le portent, le voile revêt de multiples significations, selon que cela découle de la pression de l'environnement ou d'un choix personnel réfléchi. En même temps, la signification sexiste attachée au port du voile ne fait aucun doute. Symboliquement, puisqu'il est toujours revendiqué au nom de la séparation des sexes et de la «pudeur» assumée par les femmes. Mais surtout pratiquement, puisque ces symboles trouvent leur concrétisation dans l'obsession de la virginité, et la division sexuelle figée et inégalitaire des rôles sociaux (la maman ou la putain). Libé 21/03/05

L'intégration voilée

 

Le Monde 15/03/05

 

Extraits

Un an après l'adoption de la loi du 15 mars 2004 interdisant le port ostensible de signes d'appartenance religieuse, le psychodrame français à propos du voile islamique semble bien loin. La loi s'est imposée et elle est mieux acceptée que l'on pouvait se l'imaginer.

Paradoxalement, l'exigence des geôliers des deux journalistes [Christian Chesnot et Georges Malbrunot]  en pleine rentrée scolaire, fédéra l'ensemble des Français. Les principaux membres du CFCM furent les premiers à manifester leur émotion et à entreprendre une pédagogie de la loi en direction du monde arabo-musulman. Du défi d'une infime minorité, on passait au civisme d'une immense majorité. A court et moyen terme, la France, premier pays musulman d'Europe par sa démographie, parvenait à faire entendre son souci de vivre en cohérence avec son histoire, forgée progressivement depuis la fin du XVIIIe siècle sur une mise à distance du religieux par rapport au politique.

Interdire le voile pour obtenir une égalité de traitement entre filles et garçons sera d'autant mieux compris si le souci d'intégration ne se limite pas à un slogan. Le Monde 15/03/05

Déchirer le voile

Alina Reyes

Le Monde 04/11/04

Extraits

A quoi sert donc le voile que certaines Françaises éprouvent le besoin de porter ? A les cacher, ou à cacher les sentiments inavouables d'autres Français qui veulent le leur ôter ? Et qui n'ont en général pas envie de voir, non plus, des mosquées pousser sur leur sol ni la Turquie entrer en Europe... Si l'on a bien fait le parallèle entre terrorisme et frustration sexuelle, on oublie de se rappeler que la xénophobie, la peur (le désir inavouable) d'être envahi par l'autre, sont aussi liées à un phénomène d'attirance-répulsion sexuelle.

Aujourd'hui, dans notre pays, des filles et des garçons ont été contraints de passer les premières semaines de la rentrée scolaire à l'écart des autres élèves, exclus des salles de classe et des cours de récréation avant d'être exclus du collège ou du lycée, c'est-à-dire de l'accès au savoir, au motif qu'ils cachent leurs cheveux sous un foulard, un bandana, un turban. Et au nom de la loi, qui permet à un être humain, en toute bonne conscience laïque et républicaine, de nier un autre être humain.

Pédophilie criminelle, organisée ou non, touristique ou familiale, terrorisme basé sur une foi en une mort pourvoyeuse de vierges en sont les manifestations les plus directes du spectacle mondial, résumé en croisade du Bien contre le Mal.

Mais ce désir perverti de pureté s'exprime aussi au quotidien, de façon heureusement moins sanguinaire, dans les nombreuses contraintes qui pèsent sur les enfants, religieuses parfois (aussi bien dans le rigorisme de chrétiens intégristes que dans l'image de petits garçons à papillotes ou petites filles voilées), mais surtout commerciales et dans la soumission des femmes à la chirurgie rajeunissante ou aux signes ostentatoires de pudeur. Cherchez l'homme... Le Monde 04/11/04

L'enseignement catholique n'a pas constaté d'afflux de jeunes filles voilées

Le Monde 28/09/04

Extraits

L'enseignement catholique n'a pas constaté d'afflux d'élèves musulmanes souhaitant contourner l'application de la loi du 15 mars, interdisant les signes religieux ostensibles à l'école. L'enseignement catholique - qui affirme accueillir tous les élèves "sans distinction d'origine, d'opinions ou de croyance"- tente d'adopter une position équilibrée par rapport au voile. Non concernés par la loi du 15 mars, le secrétariat général de l'enseignement catholique (SGEC) se déclare néanmoins solidaire de la lutte de l'Etat contre "la montée des communautarismes et de l'intolérance". "Nos établissements sont sous contrat avec l'Etat. Au nom de ce contrat et par notre propre volonté, nous voulons être solidaires avec l'enseignement public et donc ne pas être des établissements refuges". Le Monde 28/09/04

 

François Fillon

La laïcité a gagné

Le Parisien 20/09/04

Extraits

L'affaire de nos otages en Irak a été un facteur de solidarité autour de la laïcité et des valeurs de la République.

A cette rentrée, nous n'avons dénombré que 635 cas. Aujourd'hui, 534 ont été réglés. Il reste 101 cas problématiques où les jeunes filles refusent encore de retirer leur foulard.

Au débat, la loi sur la laïcité est apparue comme un débat marginal. Aujourd'hui, elle apparaît comme le symbole du coup d'arrêt au processus de la montée des communautarismes.

Les responsables de certaines organisations musulmanes, au départ contre la loi et qui ont finalement appelé à la respecter, auront du mal à faire machine arrière. Le regard des Français vis-à-vis de la communauté musulmane est devenu également plus positif depuis cette rentrée. L'intégration fonctionne peut-être moins mal que ce que l'on imagine. La laïcité a gagné car les difficultés prévues ne sont pas apparues…Le Parisien 20/09/04

La rentrée scolaire, plus que jamais sous le signe du voile

 

Extraits

« On peut supposer que les preneurs d'otage vont passer au crible cette journée particulière en France. Dès lors, on ne veut courir aucun risque, et l'on demande à tous les principaux et proviseurs de rester discret et mesuré », résume-t-on dans une académie de la banlieue parisienne.

« C'est une rentrée spéciale, analyse Philippe Guittet, responsable du SPDEN, principal syndicat des chefs d'établissement. Mais les événements dramatiques internationaux ne changent rien à l'application de la loi. Ils pourraient même faire que la rentrée se déroule dans un climat beaucoup moins agité que prévu. » Le Parisien 02/09/04

La loi sur la laïcité au centre des préoccupations du ministre de l'Education.
Fillon rêve d'une rentrée «sous le signe de la fraternité»

«Aujourd'hui, un des résultats que ne cherchaient sans doute pas les ravisseurs est d'avoir créé une cohésion nationale presque sans précédent, a déclaré le ministre. Je ne fais pas de pronostics, mais je souhaite que la rentrée soit placée sous le signe de la fraternité.» Libé 02/09/04

Première rentrée scolaire pour la loi sur la laïcité

En cas de transgression, le dialogue doit s'amorcer avec l'élève, puis ses parents et, à la discrétion du chef d'établissement, avec l'ensemble de l'équipe éducative et, éventuellement, des intervenants extérieurs.

Si une certaine latitude est laissée aux proviseurs dans la conduite des dossiers, le ministère va chercher à harmoniser les réponses apportées aux litiges à travers les cellules de veille mises en place dans chaque académie. Nel Obs 02/09/04 Les modalités d'application de la loi Nel Obs 02/09/04

La question du voile à l'école, ravivée par la prise des otages français en Irak, est dans tous les esprits Ouest-France 02/09/04

Sous le signe de l’inquiétude L'Humanité 01/09/04

Douze millions d'élèves attendus à l'école Le Figaro 02/09/04

« Nous ne demanderons pas aux filles d'enlever leur voile... »

Le Parisien 05/07/04

Extraits

« Nous nous retrouvons face à un dilemme », considère Kamel Kabtane, le président du Conseil Régional du Culte Musulman de Rhône-Alpes : « Respecter la loi d'un côté et les principes religieux de l'autre. Il faut que les filles continuent leur scolarité, mais nous n'irons pas demander aux filles d'enlever leur voile. »

Les cadres de la mosquée de Lyon ont ainsi indiqué que des contacts avaient été pris avec des écoles privées catholiques pour voir dans quelles conditions elles pourraient accueillir de jeunes musulmanes voilées. Et des projets d'ouverture d'écoles confessionnelles fleurissent par ailleurs ici et là. « Au départ, j'étais contre », reconnaît Azzedine Gaci, le secrétaire général du CRCM, « car c'est une façon de se retrouver dans un communautarisme total, mais aujourd'hui, je reconnais que ces écoles sont légitimes ». Le Parisien 05/07/04 Voir aussi Le Figaro 05/07/04

À l’inverse trois fédérations musulmanes -  La Grande mosquée de Paris, le Comité de coordination des musulmans turcs de France (CCMTF) et la Fédération française des associations islamiques d'Afrique, des Comores et des Antilles (Ffaiaca) - demandent aux élèves de respecter la loi. Fillon promet une "fermeté absolue" à la rentrée selon l’AFP 08/07/04  Le Parisien 12/07/04 revient sur cette question : Pro et antivoile préparent déjà la rentrée Foulard Fichue rentrée? titre L'Express 12/07/04 Zaïr KEDADOUCHE, membre du Haut Conseil à l'intégration dénonce l’UOIF qui se veut « au dessus des lois » Libé 16/07/04

Voile : l'UOIF va au bras de fer

Nel Obs 01/07/04

Extraits

L’Union des organisations islamiques de France (UOIF) conseille aux élèves musulmanes de se présenter à la rentrée prochaine "dans les tenues qu'elles auront choisi de porter".

"Si leur tenue devait poser problème", l'UOIF appelle les jeunes filles à engager "un dialogue constructif avec la communauté éducative" et les assure du "soutien" de ses associations locales. [Elle estime] que "l'interdiction de tout 'couvre-chef' ou tenue spécifiquement nommée" serait "non conforme à la loi". [Elle] souligne cependant "l'importance qu'il y a pour ces élèves à ne pas renoncer à leurs études" et les met en garde "contre des réactions exagérées, des attitudes provocatrices ou irréfléchies". Nel Obs 01/07/04 Voir aussi 3 dépêches du 01/07/04 de l’AFP : Loi laïcité: l'UOIF se prépare à une épreuve de force à la rentrée ; La lettre de l'UOIF, une "provocation" selon le SNPDEN ; Voile à l'école: Bernard Stasi "regrette" les "erreurs" commises

Fillon, VRP de la loi contre le voile à l'école

 

Libé 09/06/04

 

Extraits

Le ministre a prodigué hier ses conseils pratiques aux chefs d'établissement de l'académie de Lille.

«Il restera toujours une marge d'appréciation aux chefs d'établissement, a souligné le ministre. Vous êtes des soldats de la liberté et du progrès.»

«Vous pouvez aller loin dans vos règlements intérieurs et interdire tous les couvre-chefs.»

Une inspectrice pédagogique regrette que cette loi s'assimile à un interdit, alors qu'elle y voit des garanties de liberté et de respect de l'autre.

«L'école ne doit pas devenir le contraire de ce qu'elle est pour nous : un lieu de respect et de tolérance», précise un proviseur.  Libé 09/06/04

 

Voile : l'ONU met la France en garde

Nel Obs 04/06/04

Extraits

"Le Comité [des droits de l'enfant des Nations unies] recommande que l'Etat partie (...) garantisse que les droits individuels ne seront pas bafoués et que des enfants ne seront pas exclus ou tenus en marge du système scolaire du fait d'une telle législation."

Le Comité, qui rassemble 18 experts indépendants, s'est dit inquiet du risque que la loi promulguée le 14 mars dernier "néglige le principe du meilleur intérêt de l'enfant et du droit d'accès à l'éducation et ne parvienne pas au résultat attendu".

L'organe de l'Onu, qui examine le respect par les pays signataires de la Convention sur les droits de l'enfant* (CDE) de 1990, renvoie à l'article 14 de ce texte, qui stipule que "les Etats parties respectent le droit de l'enfant à la liberté de pensée, de conscience et de religion".
Le Comité "reconnaît l'importance que l'Etat partie accorde à la laïcité dans les écoles publiques (...) mais s'inquiète des accusations de montée des discriminations, y compris de celles fondées sur la religion".
Nel Obs 04/06/04

*Texte intégral de la CONVENTION INTERNATIONALE DES DROITS DE L'ENFANT ONU : 1989

La loi entre en vigueur dès la rentrée
Voile : le débat continue

Nel Obs hebdo 27/05/04

Extraits

Plus d’un an après la relance d’un débat qui a pris des proportions quasi délirantes, la France s’est enfin mise au clair. La circulaire d’application de la loi du 15 mars 2004 sur la laïcité et l’interdiction du port de signes religieux à l’école est parue le 22 mai au «Journal officiel» et sera applicable dès la rentrée. Exit les signes les plus «ostensibles»: voile islamique, kippa et grandes croix.

«Avec la montée des communautarismes et une demande de plus en plus forte de prises en compte des particularités des différentes communautés, il fallait réaffirmer les valeurs de la nation, et seule une loi pouvait y répondre », [dit] Yves Ehrmann, proviseur de la cité scolaire de Barr, dans le Bas-Rhin.

Jean-Pierre Kleindienst, «content de la loi» et proviseur du lycée Claude-Monet au Havre, 1 700 élèves : «Les élèves ont la tête nue dans l’enceinte de l’établissement, explique-t-il. Nous ne tolérons ni casquettes, ni baladeurs, ni bandeaux… ni voile. »

Georges Turrin, proviseur du lycée Saint-Exupéry à Marseille, est en revanche plus inquiet: «Je crains que le texte ne favorise le repli communautaire et les écoles confessionnelles.» Pour ce chef d’établissement, la loi ne remplacera jamais le dialogue. «Les élèves ont besoin qu’on les traite avec respect, qu’on leur explique les valeurs de la laïcité.» Une laïcité moins menacée par le port du voile que par la pauvreté qui pousse des populations laissées-pour-compte, victimes de discrimination, d’absence de mixité sociale, à choisir d’affirmer leur identité à travers des manifestations religieuses. «Défendre le service public, c’est s’attaquer aux bases de ces discriminations», conclut-il. Nel Obs hebdo 27/05/04

Projet de circulaire sur l'application de la loi sur les signes religieux à l'école : voir le dossier de presse sur le débat laïc

UOIF: «La loi sur la laïcité est là et nous l'appliquerons»

Libé 12/04/04

Extraits

A six mois de l'entrée en vigueur de la loi interdisant le port des signes religieux à l'école publique, le rassemblement annuel de l'Union des organisations islamiques de France (UOIF) s'est tenu, ce week-end, au Bourget.

Lhaj Thami Breze, le président de cette organisation proche des Frères musulmans, a dénoncé dans son discours d'ouverture le passage d'une «laïcité tolérante ouverte et généreuse, c'est-à-dire une laïcité d'intégration, à une laïcité d'exclusion». Ni lui ni les autres responsables de l'UOIF n'ont appelé à la désobéissance civile.

«La loi autorise les petites croix, pourquoi pas le petit foulard ?» le gouvernement ne serait pas contre autoriser les jeunes musulmanes à porter un petit voile type bandana, mais il craindrait une réaction hostile des enseignants.

Que la loi soit assouplie ou non, l'UOIF s'y pliera. «Le savoir est plus important que le voile, nous disons aux jeunes filles : "S'il le faut, retirez-le !"».

Des collectes étaient organisées, au Bourget, pour la construction d'établissements scolaires. Libé 12/04/04 L'UOIF dénonce une laïcité d'exclusion pour le Nel Obs 12/04/04  Voile : l'application ne sera pas facile estime Ouest France 12/04/04 Marcher sur un fil pour Georges Suffert dans Le Figaro 12/04/04 L'UOIF, en congrès, prêche le compromis sur le voile estime Le Monde 13/04/04

 

Voile : l'avis du Conseil d’État
Les sages du Conseil d’État recommandent une application souple de la loi sur le voile dans leur rapport annuel, consacré à la laïcité

La Croix 18/03/04

Extraits

Le Conseil d’État, profitant du centenaire de la loi de 1905, consacre son rapport annuel à la laïcité. Au-delà de la loi qui pose des principes, la mise en œuvre de cette laïcité par les tribunaux administratifs doit rester pragmatique et se faire dans un grand respect des libertés publiques.

De fait, sans une application extrêmement libérale des juges administratifs, la loi de 1905 aurait été inapplicable. En effet, dès 1907 rappelle le rapport, les juges ont calmé le jeu dans une France alors déchirée entre les cléricaux et les anticléricaux. «On ne saurait, à cet égard, faire fi d’une histoire millénaire, et tenir pour abusif que les jours chômés et fêtes légales soient directement et quasi exclusivement liés à la mémoire chrétienne».

Cependant, se pose aujourd’hui la question de l’insertion de l’islam, le rapport regrettant que cette religion ne bénéficie pas de lieux de culte comme d’aumôniers, en nombre suffisant.

Enfin, le Conseil d’État revient longuement sur le port du voile à l’école. Le rapport prend donc acte de la nouvelle loi, mais rappelle qu’il ne s’agit pas d’une interdiction générale de l’ensemble des signes religieux. Le juge veillera donc à ce que «l’interprétation faite par les chefs d’établissement soit conforme à l’esprit de la loi». «La mise en œuvre de procédures de dialogue et de médiation sera indispensable, sauf à favoriser le départ de certains élèves des établissements publics ou leur déscolarisation.» La Croix 18/03/04 Voir aussi Le Monde 21/03/04 Lire le rapport

L'école doute de la loi sur le voile

La Croix 03/03/04

Extraits

Lucien Nédelec est proviseur du lycée Henri-Wallon dont furent exclues Alma et Lila Lévy. L'ampleur médiatique prise par cette histoire faillit mettre à feu l'établissement. «Nous avons su éviter le pire, explique-t-il. Mais nous restons blessés par cette affaire qui ne reflète pas ce que vivent les élèves. Une très grande majorité d'entre eux savent qu'ils ont besoin de l'école et que face aux enjeux de l'intégration, le voile est une question secondaire.»

La fin des polémiques qui ont entouré la loi sur le voile est loin d'avoir convaincu le milieu enseignant. Au contraire, beaucoup n'hésitent pas à dire que les vraies difficultés commenceront à la rentrée prochaine, quand le nouveau texte de loi entrera en application.

Michèle Amiel redoute que «la loi durcisse les relations. Dès la rentrée, on risque de rencontrer des problèmes, juge la proviseur du lycée Jean-Jaurès de Montreuil-sous-Bois, car un certain nombre de professeurs pensent qu'aucun compromis n'est possible.»

Jugée trop carrée ou trop floue, la nouvelle loi n'a donc pas calmé tous les esprits. la question demeurera de savoir à partir de combien de centimètre carrés un tissu devient ostensible. Tous les chefs d'établissement savent que, dès la rentrée de septembre, des affaires de voile risquent de réapparaître. La Croix 03/03/04

Derrière la Loi foulardière, la peur

Alain Badiou, philosophe, écrivain et professeur à l'école normale supérieure

Le Monde 22/04/03

Extraits

D'aimables républicaines et républicains arguèrent un jour qu'il fallait une loi pour interdire tout foulard sur les cheveux des filles. Totalitairement élu par 82  % des électeurs, dont tous les socialistes, gens parmi lesquels se recrutaient nombre des aimables républicain(e)s en question, [le président de la République] opina du bonnet : une loi, oui, une Loi contre le petit millier de jeunes filles qui mettent le susdit foulard sur leurs cheveux. C'est ainsi qu'une fois de plus, dans la ligne de la capitulation de Sedan, de Pétain, de la guerre d'Algérie, des fourberies de Mitterrand, des lois scélérates contre les ouvriers sans papiers, la France étonna le monde.

Chirac, les socialistes, les féministes et les intellectuels des Lumières atteints d'islamophobie gagneront la bataille du foulard.

Le foulard doit être proscrit, qui fait signe du pouvoir des mâles (le père, le grand frère) sur ces jeunes filles ou femmes. On exclura donc celles qui s'obstinent à le porter. En somme : ces filles ou femmes sont opprimées. Donc, elles seront punies.

Curieuse, la rage réservée par tant de dames féministes aux quelques filles à foulard… Une seule explication : une fille doit montrer ce qu'elle a à vendre. Elle doit exposer sa marchandise. Elle doit indiquer que désormais la circulation des femmes obéit au modèle généralisé, et non pas à l'échange restreint. La loi sur le foulard est une loi capitaliste pure. Elle ordonne que la féminité soit exposée. Autrement dit, que la circulation sous paradigme marchand du corps féminin soit obligatoire. Le Monde 22/04/03

Le voile de l'ignorance

Le Monde 17/02/04

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Le voile manifeste l'extrême difficulté où se trouvent les Français d'aborder ce qu'on appelle aux Etats-Unis la question des "minorités".

Malgré la différence en apparence radicale qui oppose les deux pays, une même dynamique est pourtant à l'œuvre, celle qui tend à confondre cette question, religieuse chez nous, raciale en Amérique, avec une autre : la question sociale.

La majorité des pauvres étant noirs, bon nombre d'enquêtes prouvent que les Américains confondent bel et bien pauvreté et négritude. Les Etats américains mènent ainsi une politique sociale qui est toujours inversement corrélée au nombre de Noirs habitant l'Etat en question.

Il est possible qu'aujourd'hui l'Europe en général et la France en particulier soient en train d'américaniser leur conception de la pauvreté. Le taux de chômage en France est deux à trois fois supérieur, pour toutes les catégories de diplômes, parmi les populations issues de l'immigration que pour le reste de la population. "La question de l'"immigration" a pour effet de révéler les contradictions qui travaillent la société française tout entière depuis plus de deux cents ans: d'un côté, un universalisme hautement proclamé mais fort abstrait, de l'autre, des discriminations de fait bien réelles et qui ne cessent de s'accentuer depuis vingt-cinq ans. Et aujourd'hui il faut être aveugle pour ne pas s'apercevoir de l'acuité du problème qui se trouve posé  : la prise en charge de ces enfants d'immigrés qui ont été relégués et concentrés dans les mauvaises classes, les mauvaises banlieues, les emplois précaires et autres stages bidon." (Stéphane Beaud et Michel Pialoux)

Une loi qui aurait simplement dit que "sont interdites toutes formes de discrimination négative à l'encontre des jeunes filles", dont le voile, eût suffi. D'avoir choisi le versant religieux de l'interdit bouleverse le sens qui lui est donné, il devient un nouveau déni d'existence. Le Monde 17/02/04

 

Pour nombre d'élèves voilées et exclues, l'école s'arrête définitivement

Le Monde 11/02/04

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Saïda Kada, coauteur avec l'anthropologue Dounia Bouzar du livre L'une voilée, l'autre pas (Albin Michel, 2003), est aussi responsable de l'association Femmes françaises musulmanes et engagées, qui vient en aide aux filles voilées déscolarisées, dénonce "une véritable omerta" sur le sujet. "La nouvelle loi prévoit une évaluation après un an. Mais comment va faire l'éducation nationale ? Il n'y a pas de statistiques. Tout simplement parce que les jeunes filles sont exclues le plus souvent pour un motif autre que le foulard. On les pousse à démissionner." "Cela fait quinze ans qu'on exclut dans l'indifférence ! s'indigne-t-elle. La plupart des exclusions se produisent sans heurts. On dit aux jeunes filles : vous ne restez pas. Les parents se contentent d'une décision orale. Très peu prennent la peine de faire appel de la décision."

Officiellement, les chiffres font état de seulement cinq exclusions pour cause de foulard, pour cette année scolaire. Le Monde 11/02/04

Le port du foulard, un habitus qui renvoie plus à l'anthropologie qu'à la religion
La France est-elle kémaliste ?

Semih Vaner directeur de recherches au Centre d'études et de recherches internationales (Ceri) et professeur associé à l'Institut d'études politiques de Paris

 Libé 30/01/04

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La femme turque ou kurdeà l'est, au centre et au nord de l'Anatolie, étrange étrangère interne que la République autoritaire ne parvenait pas, ne parvient toujours pas à aligner, portait, porte encore, le plus naturellement du monde, le turban, quand ce n'était pas le çarsaf. Aujourd'hui encore elle jugerait infamant et humiliant, un peu comme celle de Mulhouse ou de Saint-Etienne, étrange étrangère externe que la République voudrait apprivoiser autoritairement, qu'on lui enlève son couvre-chef. Sans forcément le légitimer, il faudrait voir qu'il y a un puritanisme (plus qu'un rigorisme ou une agressivité), surtout un habitus dans le port du foulard, qui renvoie davantage à l'anthropologie et à l'histoire qu'à la religion.

C'est du retour du culturalisme qu'il s'agit et non véritablement du retour de l'islam. Or la France ne peut rester à l'écart du multiculturalisme (à ne pas confondre avec le communautarisme).

Le port du foulard est en même temps signe de trajectoires individuelles ; les unes s'en débarrassent, les autres le mettent à un moment de leur existence. Une loi comporte des risques d'éveiller et de provoquer des tentations par des interdictions ; elle risque d'entraîner la politisation du voile.

Beaucoup de musulmans français ne se reconnaissent nullement dans les organisations politiques se réclamant de l'islam ; ils ne demandent qu'à assumer leur individualité dans le respect des libertés individuelles et collectives.

Une loi n'est pas toujours «un accommodement raisonnable». Libé 30/01/04

Le voile, centre de toutes les polémiques, n'est pas vraiment un voile, ni un fichu, ni non plus un foulard
Guimpe religieuse à la mode islamiste

Libé 30/01/04

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Pour le Robert, un voile est en effet «un morceau d'étoffe plus ou moins transparente destiné à cacher le visage», un «vêtement léger et transparent qui couvre le corps féminin».

Cela ne correspond pas à la chose que les dames et demoiselles islamistes portent sur la tête. ce n'est pas non plus un foulard Un mot français plus adéquat pour la désigner serait celui de «fichu». le «fichu islamiste» a été recalé

le mot juste existe, simple et précis, celui de guimpe : «un morceau de toile qui couvre la tête, encadre le visage, cache le cou et la gorge».Libé 30/01/04

On ne peut taire les critiques à l'égard du voile au nom de la solidarité avec les jeunes des quartiers populaires.
Contre le racisme et pour les femmes

Suzy Rojtman, Maya Surduts et Josette Trat, militantes du Collectif national pour les droits des femmes

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En France, les jeunes issus de l'immigration  des deux sexes ont des convictions diversifiées mais elles et ils ont tous en commun d'être en butte à un contrôle policier de tous les instants et victimes de discriminations inacceptables.

Pour lutter contre les humiliations et retrouver leur dignité, certain(e)s jeunes de confession musulmane, inspiré(e)s ou non par des imams fondamentalistes, ont choisi de mener une bataille politique pour le droit des jeunes filles à porter le voile à l'école. C'est se tromper de lutte. La laïcité est une chance : c'est la possibilité pour les jeunes d'apprendre à se connaître et à se respecter indépendamment de leurs affiliations religieuses.

Quel que soit le sens donné à titre personnel par une minorité de jeunes filles musulmanes au port du voile ce n'est en rien un symbole d'émancipation. Libé 27/01/04

 

La République dans un foulard

Bruno Latour professeur de sociologie à l'Ecole nationale des mines (Centre de sociologie de l'innovation), professeur d'histoire des sciences à l'université Harvard

Le Monde 18/01/04

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Il faut que l'extrême droite soit devenue bien influente pour que tant de gens de bonne foi prennent pour un "sursaut républicain" cette ethnicisation de l'appartenance française. Si elle veut reprendre son mouvement séculaire, [la République] doit plutôt se mettre à la recherche de l'universel nécessaire à la cohabitation. Nul n'a le droit d'interrompre cette enquête collective, surtout pas ceux qui, depuis des années, sous le manteau de "la neutralité scolaire", acceptent sans broncher les marques de l'inégalité sociale, raciale et culturelle.

Pour l'instant, dire de l'école qu'elle est neutre, c'est affirmer, fort hypocritement, qu'on accepte de figer les appartenances et les inégalités en place.

Si l'on trouve infamante une loi qui oblige à porter un signe d'appartenance, comment trouver admirable une loi qui oblige à n'en pas porter ?

L'Ecole est neutre parce qu'elle doit se garder toujours prête à accueillir les élèves sous ces deux formes contradictoires qu'elle est seule, par un long apprentissage de la vie en commun, à pouvoir rendre complémentaires : soit comme les membres de groupes auxquels ils sont fiers d'appartenir, soit comme des individus fiers de ne plus appartenir à leur groupe d'origine.

Le travail de la République laïque, c'est de détricoter et de retricoter des identités multiples, ce n'est pas d'imposer un habit. Le Monde 18/01/04

La loi sur le voile à l'école divise le camp laïque

Le Monde 17/01/04

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Le monde de la laïcité militante a vu les clivages se déplacer ces dernières semaines entre partisans et adversaires du texte en préparation.

Michel Tubiana, président de la Ligue des droits de l'homme (LDH), voit dans ce conflit l'affrontement entre "les tenants d'une laïcité réduite à la lutte anticléricale"et ceux pour qui le nouveau terrain de lutte de la laïcité doit se situer sur le thème de l'"égalité des droits" et de la lutte "contre les discriminations qui vicient le contrat social".

Patrick Kessel, ancien grand maître du GODF, engagé aux côtés de Jean-Pierre Chevènement lors de la campagne présidentielle de 2002, reproche aux adversaires de la loi de n'être plus "sur des positions laïques mais sur des positions "néocommunautaristes"" Pour un autre ancien grand maître du GODF, le criminologue Alain Bauer, "personne n'est pour le voile à l'école  ; tout le monde est laïc, mais avec des degrés d'application différents". "Exclure un élève est un malheur pour l'éducation nationale", juge t'il. M.  Tubiana dit en avoir assez de "la violence du débat et des anathèmes" que lui vaut sa prise de position, comme le sobriquet d'"islamogauchiste".

Si Jean-Michel Ducomte, président de la Ligue de l'enseignement juge le rapport Stasi positif "à 90  %", il pense que "le vote d'une loi n'est pas la bonne chose".

La Fédération nationale de la libre pensée prône la remise en vigueur de la circulaire de Jean Zay, ministre de l'éducation nationale dans le gouvernement de Front populaire, "qui prohibe tout prosélytisme et signes religieux au sein de l'école publique".

Les positions des dirigeants du Grand Orient ont évolué, passant de l'hostilité à une loi risquant de stigmatiser les seuls musulmans à la "nécessité de légiférer". En octobre, reçue par la mission d'information parlementaire sur les signes religieux à l'école, Marie-Françoise Blanchet, grande maîtresse de la GLFF sera la seule à demander "un texte fort".

M.  Bauer reste dubitatif : on avait le choix entre un tout petit texte et une grande loi" et "on a opté pour une loi intermédiaire. Pour l'instant, on en reste à un niveau incantatoire et à un texte qui ne résout pas grand-chose". Le Monde 17/01/04

Loi laïcité : division du monde de l'école

Libé 16/01/04

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Sur les 70 membres du CSE présents, 16 ont voté pour la loi, 9 contre, 16 se sont abstenus, et... 29 ont refusé de participer au vote. La preuve que ce projet de loi divise le monde de l'école.

Dans le camp des pour, les représentants de l'Etat et le Medef. Dans celui des contre, la FCPE [la PEEP était absente] et les représentants des lycéens.

Les abstentionnistes sont partagés : «Nous sommes favorables au principe d'une loi, mais pas satisfaits de sa formulation», explique Patrick Gonthier, secrétaire général de l'Unsa Education.

Gérard Aschieri, secrétaire général de la FSU, a [dit] : «Se contentant d'interdire, ne donnant aucun sens ni aucune consistance à la démarche laïque, écartant de son champ les établissements privés sous contrat, laissant entier le problème de l'Alsace-Moselle, une telle loi ne fera que désigner une religion, et risque ainsi d'exacerber les manifestations les plus radicales des religions.» Libé 16/01/04 Voir aussi : Laïcité: le Conseil supérieur de l'éducation approuve le projet de justesse (AFP 15/01/04) Loi sur la laïcité : le bloc se lézarde (Ouest-France 16/01/04)

Le nouveau voile semble bien être un élément d'une stratégie anti-intégration.


Fichu hidjab, uniforme islamiste

Camille LACOSTE-DUJARDIN Dernier livre paru : Voyage d'Idir et Djya en Kabylie. Initiation à la culture kabyle, L'Harmattan

 

Libé 06/01/04

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Cette nouvelle forme de voile, uniforme, un fichu, le hidjab, est apparue, dans l'actualité, à la rentrée scolaire de 1989, avec «l'affaire de Creil», qui concernait deux jeunes soeurs marocaines. Ceci est curieusement survenu au moment même où les jeunes filles de l'immigration maghrébine, nées en France, venaient à fréquenter l'école en nombre. Or, elles se trouvaient y remporter davantage de succès que leurs frères, si bien qu'elles trouvaient leur place dans la société française sans les problèmes que posaient plus souvent les garçons. Tout a semblé alors se passer comme si le port de ces fichus islamistes par quelques écolières musulmanes avait été opportunément encouragé par les propagandistes de mouvements islamistes, dans le cadre d'une nouvelle stratégie d'anti-intégration de ces jeunes filles.

La plupart des mères de ces jeunes filles de l'immigration maghrébine ne se sont, elles, jamais voilées : c'est en effet le cas de la majorité d'entre elles, d'origine berbère. Ce nouveau fichu est très différent des divers voiles traditionnels de sorties féminines, mais il n'est pas non plus un voile coranique. [Il] est, en réalité, un uniforme politico-religieux moderne, apparu à la suite de la révolution iranienne.

Aux yeux de toutes les autres filles de parents musulmans, les compagnes de classe, cette exposition politico-religieuse risque de réactiver leur remord de ne pas être assez fidèles à la religion de leurs parents. C'est en effet le message que leur adressent les porteuses de fichu qui prétendent leur faire la leçon.

La plupart des Français y voient le signe d'une opposition, puisque ce fichu est l'emblème d'une allégeance prioritaire à des prescriptions politico-religieuses qui peuvent aller jusqu'au refus des obligations légales et républicaines, dans le cas où les lois françaises apparaîtraient contraires à cette loi religieuse. Libé 06/01/04

Le camp du «non» donne de la voix

 

La Croix 15/01/04

 

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Les responsables religieux français avaient déjà fait part de leurs réticences à une loi contre les signes religieux à l’école. Mais cette semaine, dans la ligne du discours de Jean-Paul II lundi 12 janvier au corps diplomatique (La Croix du 13 janvier), leur opposition est devenue nettement plus «ostensible».

«Si dans l’espace public, un athée doit cacher son athéisme, un chrétien ou un juif ou un musulman ses convictions religieuses, c’est qu’il n’y a pas d’espace public et pas de démocratie, et son corollaire que nous appelons la laïcité» [a dit] Jean-Arnold de Clermont, président de la Fédération protestante de France (FPF).

Au regard du «travail intense de réflexion» de la commission Stasi, [il] estime que «la montagne semble n’accoucher que d’une souris, un projet de loi, copié-collé d’un propos présidentiel, qui ne résout rien et dont la précipitation semble contredire la volonté affichée de dialogue et de concertation».

«Si le voile est le signe politique d’une organisation islamiste dont le gouvernement pense qu’elle menace la sécurité de la République, qu’il prenne ses responsabilités, mais qu’il ne se mêle pas de religion», a souligné Jean-Marie Lustiger. La Croix 15/01/04

Contrairement à ce qu'affirment certaines militantes françaises, le port du voile n'est pas une affaire de culture


Féministes, je vous écris d'Alger

WASSYLA TAMZALI, avocate à Alger, ex-directrice du droit des femmes à l'Unesco

 

Libé 14/01/04

 

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Depuis de longues années, les pensées des féministes françaises et des féministes du Sud que nous sommes se croisent, et, sur les discriminations sexistes, nous avons toujours eu globalement les mêmes démarches. Enfin, pensions-nous, nos amies féministes, sur ce sujet du voile qu'elles connaissent parfaitement, sauront tordre le cou au relativisme culturel qui fleurit bizarrement jusque dans les rangs de la gauche intellectuelle, dans les enceintes sacralisées, comme la Ligue des droits de l'homme !

Eh bien non ! Il faudra ajouter au voile une autre victoire, celle de diviser les féministes.

C'est sans doute vrai que bon nombre de positions antivoile ne sont pas dictées par un attachement au principe de l'égalité des sexes, et que pour une partie de l'opinion publique, il s'agirait plutôt d'une posture ethnico-culturelle.

Je suis aussi d'accord avec celles et ceux qui disent qu'il faut remettre à leur place les intentions de certaines de ces filles, comme celles qui veulent régler leur compte à des parents juifs, kabyles et/ou convertis qui les avaient conçues contre tous tabous religieux et ethniques, leur laissant en héritage une liberté difficile à vivre aujourd'hui... Mais à partir de ce constat accepter des pratiques de stricte ségrégation sexiste, me semble être une mauvaise réponse à un vrai problème. Refuser le voile ne signifie pas accepter le racisme ! Le voile est bien le symbole de cet asservissement des femmes et sa portée ne peut être altérée par son utilisation frivole ou à contresens par certaines.

Je veux simplement rappeler que la peur de stigmatiser le christianisme n'a pas arrêté la lutte des féministes, pour la conquête essentielle du droit à l'avortement et de la liberté de disposer de son corps. On touchait là à un dogme beaucoup plus sérieux et avéré que le voile dans l'islam. Libé 14/01/04

Ne cédons pas au leurre politique, la loi sur le foulard concerne tous ceux qui se disent citoyens.

Le piège du communau-tarisme

 

TARIQ RAMADAN professeur de théologie et d'islamologie à l'université de Genève et Fribourg

 

Libé 14/01/04

 

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Forts de la certitude qu'une majorité de Français soutient la «loi contre les signes religieux», la classe politique fait mine de ne pas savoir que les raisons de cet alignement majoritaire sont nourries par des considérations troubles et troublantes. Le climat international de terreur et de violence, la peur entretenue de l'islam, la visibilité de plus en plus grande des musulmans, l'augmentation du racisme, sont autant de phénomènes qui expliquent la réaction d'une majorité de citoyens.

Le port du foulard est une prescription islamique reconnue par toutes les écoles juridiques musulmanes (sunnites et chiites), sans exception. Il s'agit d'un acte de foi. Il ne peut être question de l'imposer à une femme contre sa volonté ou même d'exercer une pression par l'intimidation ou la culpabilité.

Il appartient aux musulmans de dénoncer [les] comportements de groupes minoritaires qui ne tiennent compte ni de la liberté des femmes ni des réalités du contexte social et qui portent un regard méprisant sur la société dans laquelle ils ont pourtant décidé de vivre.

Penser la laïcité en terme de lois et de structures, c'est oublier que celle-ci se fonde aussi et surtout sur une certaine idée de la citoyenneté et de l'organisation sociale : l'égalité, le refus de la discrimination et du racisme, l'accès à l'éducation, à l'emploi, à l'habitat, l'opposition au communautarisme social.

Mobiliser les seules organisations musulmanes, c'est faire le jeu de ceux qui veulent distinguer, puis isoler les citoyens de confession musulmane. Il s'agit d'établir un front de résistance réunissant tous les citoyens, musulmans ou non, croyants ou athées, qui ont compris que le débat sur le foulard est un débat tronqué, qui, sous couvert de défendre la laïcité ou de s'opposer à l'oppression des femmes, est en train d'alimenter l'exclusion et le racisme. Libé 14/01/04

 

Voile islamique : la France sur la mauvaise voie

Anthony Giddens, sociologue, théoricien de la "troisième voie", conseiller du premier ministre britannique Tony Blair, ancien directeur de la London School of Economics

Le Monde 14/01/03

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A première vue, il s'agit d'une affaire purement française. Le gouvernement du président Jacques Chirac propose d'interdire le port du foulard ou voile islamique, le hidjab, dans les établissements scolaires français. La décision prise fait suite à un rapport de la commission sur la laïcité.

La bataille au sujet du hidjab n'est pourtant en rien un souci particulier à la France. On le retrouve dans de nombreux pays. Le port du hidjab est interdit en Turquie.

Un coup d'œil rapide sur Internet montre des dizaines de témoignages de femmes musulmanes dans le monde donnant leurs raisons de porter ou de ne pas porter le foulard. Le débat sur le hidjab est intense, passionnel et vraiment universel. Le hidjab n'a pas de signification unitaire. Il reflète la diversité des expériences et des aspirations des femmes dans le monde.

Quel rapport entre tout cela et l'interdiction chiraquienne ? Un rapport très direct. Cette politique risque d'aller à l'encontre du but recherché, à cause, précisément, des nombreuses significations du foulard, à la fois pour celles qui le portent et pour ceux qui les entourent. Quand l'interdiction entrera en vigueur, les filles que leurs parents forcent à porter le foulard risquent de sortir de l'enseignement public. Pour d'autres, le hidjab est un symbole d'identité ethnique et d'affirmation de soi.

L'interdiction systématique résonne en écho au fondamentalisme même qu'elle cherche à combattre. Le Monde 14/01/03

Le voile et la différence sexuelle

Françoise Couchard, professeur de psychologie clinique et pathologique à l'Université Paris-X, a publié : le Fantasme de séduction dans la culture musulmane. Mythes et représentations sociales, Éditions des PUF, 1994

L'Humanité 13/01/04

Extraits

De tous temps, et dans toutes les cultures, la femme a été perçue comme un être dangereux et menaçant pour l'homme et pour l'ordre social, pour deux raisons : la première est sa puissance procréatrice, la seconde est sa capacité à séduire l'homme et donc à le détourner de ses tâches civilisatrices. La femme tirait l'homme du côté de la nature, des instincts et de la satisfaction pulsionnelle, l'homme devant résister aux exigences féminines afin de conserver quelques forces psychiques pour sublimer, créer et gérer les affaires de la cité.

Le voile est polysémique et porte en lui un paradoxe, car il est ce qui sépare, ce qui exclut mais aussi ce qui protège, il est ce qui cache et tout autant ce qui attire le regard car tout interdit de voir contient le désir irrépressible de transgresser et donc de regarder.

L'imposition du voile que l'on retrouve dans les trois monothéismes signe l'impact d'un pouvoir patriarcal et masculin, puisque c'est l'homme qui, estimant ses femmes (épouses, soeurs et filles) trop faibles, trop incontrôlées, trop dépendantes de leurs désirs, fait tout pour les maintenir en tutelle et les protéger des convoitises.

Les jeunes filles et les femmes qui aujourd'hui affichent leur volonté de se voiler témoignent bien, derrière l'invocation de prescriptions religieuses, de la complexité de motivations inconscientes et sans doute contradictoires.

L'Humanité 13/01/04

En contrepoint au débat sur le voile islamique


A mauvaises questions, mauvaises réponses

Christophe Habas, Médecin, docteur en sciences cognitives

Le Figaro12/01/04

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Le voile islamique révèle-t-il une possible contradiction de nos principes démocratiques et républicains ? Ou les questions le concernant sont-elles correctement posées ?

Le voile renvoie [dans le Coran] à la pudeur, et à la respectabilité, comme, d'ailleurs, la mante revêtue par les femmes libres durant la période préislamique. La désignation de l'appartenance musulmane par le voile n'apparaît que secondairement.

L'absence de symétrie des devoirs et des attributs sociaux, dont le religieux n'est qu'une partie, entre les deux sexes est le plus souvent symptomatique d'une inégalité sociale/religieuse historiquement déterminée. Le voile se donne comme un symbole de domination masculine, symbole ambivalent de ségrégation et de désignation sexuelle tout à la fois. Les mouvements néofondamentalistes requièrent le port du voile, ce qui, par-delà la symbolique, leur sert à estimer leur influence face aux autorités.

L'erreur de ce débat résulte d'avoir posé en termes d'appartenance religieuse, un problème de ségrégation sexuelle sous le couvert d'une appartenance religieuse.

Le Figaro12/01/04

Que l'on emploie ostensible ou ostentatoire dans la loi sur le voile, ni l'un ni l'autre ne mettront un terme aux tergiversations.
Et si l'enjeu du débat était le mot «signe»?

Louis-Jean Calvet: Léo Ferré, éditions Flammarion

 

Libé 12/01/04

Extraits

Faut-il interdire les signes ostentatoires (montrés de façon excessive, indiscrète), ostensibles (portés avec l'intention d'être remarqués) ou visibles (qui peuvent être vus). Les deux premiers adjectifs sont problématiques ; seul le troisième ne prête pas à discussion. On imagine déjà les débats portant sur le fait que tel ou tel signe serait plus ou moins ostentatoire, plus ou moins ostensible.

Personne ne semble se demander ce qu'est un signe. Tous les intervenants citent le voile, la kippa et la croix c'est-à-dire les manifestations actuelles de ce que l'on considère aujourd'hui comme attentatoire à la laïcité. Et demain ?

Ce que nos politiques veulent interdire, ce n'est pas un signe mais un signifié (qui dit en gros «je revendique mon appartenance à telle ou telle religion») et ils ne disposent pour l'instant que de trois exemples de signifiants. Une grande maison de vente par correspondance vient de se rendre compte qu'on lui avait fourgué des T-shirts sur lesquels s'inscrivait, en arabe, un passage du Coran : personne n'avait perçu le signifié derrière ce signifiant. L'anecdote est intéressante car elle préfigure de futurs débats et de futurs conflits. Pour renvoyer au signifié que veut proscrire la loi, des petits malins vont s'ingénier à produire du signifiant à la pelle. Que faire si les chrétiens se mettent à porter un poisson ? Si les musulmans exhibent une sourate du Coran ? Libé 12/01/04

 

La nouvelle gauche radicale en chemin

Philippe Corcuff, maître de conférences de science politique à l'IEP de Lyon, militant de la Ligue communiste révolutionnaire

Le Monde 11/01/04

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Depuis septembre 2003, le foulard islamique est devenu la controverse principale de notre pays. Cela survient après vingt ans d'ethnicisation du débat politique par le FN et le regain d'islamophobie qui a suivi le 11 septembre 2001, le tout réactivant un inconscient colonial.

Une discrimination raciste à l'embauche est devenue presque "normale". La relégation spatiale a créé des quasi-"ghettos". On préfère se focaliser sur quelques dizaines de cas difficiles dans nos écoles concernant le port du foulard islamique.

La gauche radicale a su, quant à elle, faire preuve d'esprit de responsabilité. Hostile au port du foulard pour des raisons féministes, elle n'a pas voulu ajouter par une loi la stigmatisation à la stigmatisation, l'arsenal juridique disponible lui paraissant suffisant. Le Monde 11/01/04

Le point de vue du député est révélateur du trouble de l'UMP
Bourg-Broc : «La loi sur le voile est une fausse bonne idée»

Le Figaro 10/01/04

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Le principe même d'une loi est d'être applicable et appliquée. Si une loi ne peut pas l'être, il ne faut pas la faire. Une loi en la matière poserait plus de problèmes qu'elle n'en résoudrait.

Le résultat concret serait la multiplication des établissements privés et la perte d'influence de l'école publique.

Je suis en tout cas certain de ne pas être le seul, ni dans le pays ni au Parlement, à considérer que cette loi est le type même de la fausse bonne idée.

Je suis de ceux qui pensent que la foi s'exprime plus dans la tête et le coeur que dans les symboles. L'exposé des motifs du projet de loi autorise le port de signes discrets. Mais qui interprétera la discrétion des signes ?

Dans la plupart des cas, le port du voile n'a pas une signification religieuse, mais une signification identitaire et politique. La loi ne réglera pas le problème de la contrainte du port du voile par certaines familles. Le Figaro 10/01/04

Les laïques à la traîne contre la loi sur le voile

Libé 09/01/04

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Divisées, les organisations opposées au texte peinent à se mobiliser.

Le Mrap, la Ligue des droits de l'homme (LDH), la FSU (principale fédération syndicale dans l'éducation), la Fédération des conseils de parents d'élèves (FCPE), la Ligue de l'enseignement et l'UNL (Union nationale lycéenne) se sont réunis mercredi soir pour discuter des suites à donner à leur mouvement. En décembre, ils avaient signé un appel contre cette loi.

«Les extrémistes sont dans la rue, affirme Mouloud Aounit. On a ouvert la boîte de Pandore. On est dans des dérives communautaristes.»

L'assemblée a opté pour une «déclaration commune forte». Libé 09/01/04 Voir aussi Mobilisation difficile pour les opposants laïques à la loi (AFP 08/01/04)

Voile : un texte ostensiblement controversé

 

Libé 08/01/04

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La rédaction du projet sur le voile, rendu public hier, divise au sein même des partis favorables à une loi.

Jean-Louis Debré a redit sa préférence pour le mot «visible». Une position partagée par une partie du PS.

Hervé Mariton, député UMP de la Drôme, est monté au créneau pour que l'interdiction soit étendue aux signes manifestant des «convictions politiques». Chirac a réaffirmé que devaient être bannis des écoles «les signes ostensibles d'appartenance religieuse». Matignon a fait savoir qu'il serait préférable de s'en tenir à l'interdiction de signes religieux, à l'exclusion des «signes politiques».

Jean-Marc Ayrault, se veut prudent : «En l'état du texte de M. Ferry tel que nous le connaissons, la question de notre vote reste ouverte». Libé 08/01/04

Voir aussi : Le gouvernement veut s'en tenir aux seuls signes religieux (AFP-Voilà 07/01/04), Le texte du projet de loi ravive le débat (Nel Obs 08/01/04), Le projet de loi sur la laïcité divise et la droite et la gauche (Le Figaro 08/01/03) Debré : «Je préfère le mot visible à ostensible» (Le Figaro 09/01/04), Éviter "les difficultés d'interprétation", selon Guigou (PS) (AFP 09/01/04) Balladur "très hésitant" à voter la loi sur les signes religieux (AFP 14/01/04)

Le projet de loi est consultable sur le site du Ministère de l'Education

Le voile va-t-il favoriser le privé ?

Paul Malartre, Secrétaire général de l’enseignement catholique

La Croix 07/01/04

Extraits

«Il est encore trop tôt pour dire si des demandes d’inscription de familles musulmanes vont augmenter.

L’ouverture à tous, qui résulte à la fois des exigences de la loi Debré et de la mission de l’Église, implique l’accueil de toutes les différences culturelles ou religieuses. Nous ne redoutons pas, au contraire, la présence de jeunes musulmans. En revanche, nous avons tout à craindre d’être choisis par défaut. le pire serait que nous passions désormais pour un repaire des communautarismes.

Si le voile est imposé à une jeune fille par la famille, cela n’est pas admissible. De même s’il devient l’enjeu d’une prise de position politico-religieuse par rapport à l’établissement. Ou encore quand le voile induit des comportements tels que la non-assiduité aux cours, la remise en cause du contenu des programmes ou de certains professeurs.

Si on continue de privilégier le dialogue, on va préciser les conditions de ce dialogue.» La Croix 07/01/04

La loi sur le voile effraie l'outre-mer
A la Réunion, les élus demandent à bénéficier d'un statut dérogatoire

Libé 07/01/04

Extraits

A la Réunion, l'interdit risque de faire des vagues dans la communauté musulmane, forte d'environ 35 000 personnes sur une population de plus de 700 000 habitants. Et plus encore à Mayotte, où la polygamie est toujours légale. Jacques Chirac [a insisté] pour que l'interdiction concerne tous les départements français, afin de ne pas donner prise à des recours juridiques.

Dans l'académie de la Réunion, des centaines d'élèves musulmanes portent un châle couvrant les cheveux sans que cela pose problème en cours. « Chez nous, le port du voile est un fait culturel, pas cultuel», [affirme] Jean-Paul Virapoullé, sénateur.

«Les signes religieux ostensibles sont interdits, les signes discrets sont donc permis. [...] Puisqu'il y a des jeunes filles qui portent le châle sans que les enseignants ou les parents s'en émeuvent, je ne vois pas pourquoi je considérerais cet usage comme un signe ostensible.» [estime le Recteur de l’Académie].

Ce qui est ostensible en Seine-Saint-Denis ne le serait donc pas nécessairement à la Réunion. Libé 07/01/04

La loi laïcité, transmise lundi au Conseil d'Etat, sera appliquée outre-mer

AFP-Voilà 06/01/04

Extraits

L'interdiction des signes religieux ostensibles à l'école s'appliquera à La Réunion et à Mayotte où les musulmans sont nombreux. Le projet de loi comporte ainsi trois articles et non deux. Le premier fixe l'interdit en stipulant l'interdiction des signes qui manifestent ostensiblement l'appartenance religieuse des élèves d'écoles, collèges et lycées publics. Le deuxième article précise que la loi est applicable à Mayotte, Wallis et Futuna et dans les établissements secondaires de Nouvelle-Calédonie. Et le troisième fixe son entrée en vigueur à la rentrée 2004. La loi s'appliquera d'office dans les quatre départements d'outre-mer, Guyane, Réunion, Martinique et Guadeloupe, ainsi qu'à Saint-Pierre et Miquelon.

En Polynésie française et dans les établissements primaires de Nouvelle-Calédonie la loi ne sera appliquée que si les collectivités le décident.

La définition du terme "ostensible" reste sujette à interprétation, comme l'a relevé Jack Lang [qui] estime que le texte "conforte l'insécurité juridique". AFP-Voilà 06/01/04

Voile: le Conseil du culte musulman ne manifestera pas contre la loi

 

Libé 06/01/04

Extraits

Le CFCM redoute de provoquer une montée d'islamophobie

Cette instance [a], certes, relayé «la vive inquiétude de la communauté des musulmans qui ne perçoit comme seul acte concret du gouvernement [...] que la mise en place d'un projet de loi qui provoque un sentiment de stigmatisation des musulmans». Mais [elle a] également invité [ses] coreligionnaires «à vivre dans le calme et la sérénité ces moments difficiles».

En tant que membre du CFCM, [l'Union des organisations islamiques de France (UOIF)] a signé le communiqué. Mais, sur son site Internet, elle «appelle à s'associer à toutes les initiatives (manifestations, marches, rassemblements, pétitions...) qui défendent les libertés religieuses et s'opposent à tout projet de loi visant à interdire le port du foulard dans les établissements scolaires publics». Libé 06/01/04

Voir aussi Le CFCM exige la mise en oeuvre de "la totalité" du discours de Chirac (AFP-Voilà 05/01/04), Voile : la riposte des musulmans (Ouest-France 06/01/04), Les musulmans s'organisent contre la loi anti-voile (Le Parisien 06/01/04), La loi sur le voile divise le Conseil français du culte musulman (Le Figaro 06/01/04)

 

Comment réagir à la future loi sans froisser la base ni le gouvernement?
Le Conseil du culte musulman cherche sa voie sur le voile

 

Libé 05/01/04

 

Extraits

«Les musulmans que nous sommes censés représenter réclament une réaction de notre part, confie un membre du CFCM. Si on se tait, on donnera l'impression qu'on est à la botte du gouvernement. » Fouad Alaoui, vice-président du CFCM et secrétaire général de l'Union des organisations islamiques de France (UOIF), [affirme] : «Le projet de loi a des répercussions très graves à l'échelle locale. Nous avons eu la confirmation de l'inquiétude qui s'installe, du sentiment que l'islam, la pratique religieuse musulmane sont visés.»

La discussion entre les représentants de l'islam de France va reprendre. Elle opposera ceux qui comptent sur le dialogue avec les élus de la nation pour assouplir la future loi ­en limitant, par exemple, l'interdiction du voile à la classe et non à l'enceinte de l'école ­, et les sceptiques.

Egalement au menu des discussions, l'organisation d'éventuelles manifestations. Libé 05/01/04

Projet de loi Voir le dossier de presse sur la laïcité

Que nous révèle le voile ?

François Régis Hutin

Ouest-France 27/12/03

Extraits

Que nous révèle ce voile qui émeut, tout à coup, notre République, à la stupéfaction des pays étrangers ?

Bien sûr, personne ne défendra le voile dans la mesure où il est le signe d'un abaissement de la femme. Attention à ne pas se contenter de s'en prendre au symptôme ­ le voile ­ alors qu'il faut se préoccuper de la cause : la non-intégration de populations devenues importantes.

Il arrive aussi que certaines femmes ou jeunes filles choisissent librement de porter le voile. Il importe de veiller à ne pas blesser ces personnes en les considérant, a priori, comme en état de sujétion.

Les dérives intégristes existent là comme elles existent ailleurs. Ne prenons pas le risque de les alimenter, de les renforcer.

Le voile nous révèle aussi nos doutes sur nous-mêmes, nos hésitations, nos échecs. Ouest-France 27/12/03

Une loi ? Non ?

Janine Mossuz-Lavau directrice de recherche au CNRS, membre de l'Observatoire de la parité

Le Monde 17/12/03

Extraits

Quand je vois dans la rue une femme portant un voile, cela me serre le cœur parce que cette femme est désignée ainsi comme inférieure à l'homme.

Mais est-ce une raison pour faire une loi qui l'interdise à l'école ? On va nécessairement exclure de l'école les gamines qui refuseront d'ôter leur voile. Exclues de l'école, elles vont devenir les bonnes à tout faire de leur famille, et notamment de leurs frères, ou être mariées à un vieux cousin… Pour elles, le processus de libération est définitivement terminé.

L'école, avec les valeurs d'égalité, de liberté et de mixité qu'elle est censée transmettre ne peut pas, à terme, demeurer sans influence sur celles qui ont l'air aujourd'hui de prendre le contre-pied de ce que la République veut promouvoir.

Si l'on exclut demain les filles voilées, et notamment celles qui sont contraintes de l'être et qui seront doublement victimes, de leur famille et de la loi, on perd toute chance de faire progresser la situation des femmes dans une partie importante de notre société. Le Monde 17/12/03

Adieu foulards...?

Elisabeth G. Sledziewski maîtresse de conférences de science politique à l'université Rennes-I

Le Monde 17/12/03

Extraits

Fillettes, qu'avez-vous donc fait à l'école pour réussir à la mettre dans tous ses états ?

La tâche n'était pourtant pas facile. Cette école-là n'a-t-elle pas tout supporté pendant trente ans sans broncher ? Elle qui, contre toute raison, a assuré la promotion de l'idéologie pédagogique la plus niaise, consenti au déboulonnage des maîtres, institué le déni de la discipline et de l'autorité.

Elle qui, contre tout bon sens, a organisé le tabagisme de masse des jeunes Français.

Elle qui, au nom de la démagogie libertaire, a renoncé au tablier uniforme.

Quant à tous ceux qui stigmatisent vos foulards au nom de l'égalité et de la dignité de la femme, vous pouvez vous vanter, fillettes, d'avoir réussi à les passionner pour cette cause. Voyez comme ils se sont bien habitués, au contraire, aux images les plus dégradantes de la féminité, aux mannequins nymphomanes, aux postures humiliantes, aux paires de lèvres, de seins, de fesses de femme visibles, ostensibles et ostentatoires…Le Monde 17/12/03

 

Combattre le prosélytisme religieux par le prosélytisme laïc n'appartient pas à la tradition républicaine.
Voile et paranoïa droitière

Jean de BOISHUE ancien ministre, directeur de la revue «Une certaine idée»

Extraits

Le front antivoile est constitué, et l'armée des censeurs s'étend de droite à gauche. Dans quelques cas isolés, le port du voile dit «islamique» est un outil de provocation. Reste à savoir s'il est dans la règle républicaine de contrer l'intégrisme par l'intégrisme. D'où vient cette exégèse prétendument laïque selon laquelle tout croyant à quelque chose est un prosélyte qui se cache ? La culture française douterait-elle à ce point d'elle-même pour céder à ce vieux mythe droitier d'un «ennemi de l'intérieur» dont le «sang impur» abreuverait les sillons de notre système éducatif au point de le transformer en cheval de Troie ?

Les quelques cas de voile ne méritent ni la caporalisation de la laïcité, ni surtout un beau cadeau servi aux amis du 11 septembre. Libé 16/12/03

Le débat sur le foulard révèle l'urgence d'une politique forte pour refonder l'idéal laïc.
Voile, la crise des valeurs

Chahla Chafiq-Beski, auteure de Femmes sous le voile face à la loi islamique, édition le Félin, et du Nouvel Homme islamiste, édition le Félin, et Fatima Lalem-Hachilif, membre du bureau national du Mouvement français pour le planning familial

Libé 16/12/03

Extraits

Bien que la philosophie fondatrice du voile se fonde sur la soumission des femmes au contrôle sexuel patriarcal, ces nouvelles figures de femmes voilées sont présentées comme des actrices porteuses d'un choix libre. C'est ce paradoxe qui complique le débat actuel sur le port du voile dans l'espace public laïc.

Aussi bien les islamistes «européanisés» tel Tariq Ramadan que certains défenseurs des droits des opprimés insistent sur la nécessité de donner un droit de cité à un islam stigmatisé et diabolisé. Dans cette logique, le port du voile est décrypté comme un élément traduisant une égalité de traitement.

les raisons justifiant cet aveuglement. Elles sont pour nous à rechercher dans le contexte de crise des valeurs et des repères collectifs dans notre société de consommation. L'imagerie de la femme «occidentale» tend à se réduire à la figure de la femme objet. Cette représentation va de pair avec la persistance des idées et des fantasmes d'une virilité masculine possessive.

Agir face à ces phénomènes, qui en disent long sur la situation des femmes dans les quartiers, demande un travail éducatif et préventif il serait hasardeux de se contenter d'une stratégie répressive.

En fait, ce n'est pas d'une discrimination positive dont la société a besoin mais plutôt de mesures réellement positives pour lutter contre les discriminations. Libé 16/12/03

Rapport Stasi voir le dossier de presse sur la laïcité

L'école n'est républicaine qu'avec des êtres libres, non prédéterminés, ouverts à toutes les informations et accessibles à tous les cheminements de la raison.
Les fondements de la laïcité

Dominique NOGUEZ

Libé 11/12/03

Extraits

La laïcité n'est pas la tolérance. La laïcité est abstention, neutralité, espace sans rien de manifesté et qui agresse : il n'y a donc rien à tolérer. La laïcité, c'est un espace de paix où l'on entre sans armes ; la tolérance, c'est lorsque tout le monde a des armes, généralement légères, mais s'abstient de les utiliser.

L'on a confondu la rue et l'école. Dans la rue, à la rigueur, chacun peut arborer ses coiffures, insignes, emblèmes. A l'école, c'est tout à fait autre chose. Il ne doit plus y avoir de signes particuliers du tout.

Ils sont synonymes de préjugement, pour ne pas dire de préjugé, et annoncent, discrètement ou tapageusement, un renoncement préalable à la liberté de conscience.

Or l'école veut des êtres libres, c'est-à-dire non prédéterminés, ouverts à toutes les informations, accessibles à tous les cheminements de la raison. Libé 11/12/03

Voir aussi l'Éditorial de Serge July  et un rappel des faits sur les 12 derniers mois : Un an de colère et de surenchère.

 

Une laïcité d'exclusion est le meilleur ennemi de l'égalité

Monique Canto-Sperber et Paul Ricœur Philosophes

Le Monde 11/12/03

Extraits

Les arguments qui plaident en faveur d'une telle loi sont bien connus Il faut préserver l'école des appartenances religieuses en affirmant qu'elle est un lieu de neutralité. L'école ne peut admettre aucun signe, tel le foulard, qui distinguerait les femmes et symboliserait leur statut d'infériorité. Il faut agir avant que la situation ne devienne incontrôlable. Seule une loi peut donner l'autorité nécessaire à l'affirmation des valeurs laïques et un cadre clair aux décisions des chefs d'établissement.

Sur le bord opposé, certains contestent le principe même d'une interdiction. D'autres, qui ne sont pas nécessairement hostiles à une telle interdiction, considèrent que la loi n'est pas le meilleur moyen de la mettre en œuvre. On peut être hostile au fait que des jeunes filles portent le foulard dans l'enceinte scolaire, mais encore plus hostile à l'éventualité de les exclure pour cette raison.

C'est au nom de faits et de menaces incontestables qu'on limite la liberté, pas au nom d'inquiétudes ou d'idées de dérives possibles.

L'enseignement dispensé à l'école est affranchi de toute référence religieuse. Pas de professeurs à foulard, à kippa ou avec une croix visible, que ce soit dans les cours ou pour les examens.

Mais les élèves ? La laïcité, c'est l'engagement de garantir à chacun la possibilité de s'émanciper de ses appartenances et de ses origines. L'école peut conduire l'enfant à un tel affranchissement, non l'exiger de lui au départ.

Dans l'enceinte scolaire, le principe de la non-discrimination entre fille et garçon est fondateur. Le foulard y porte directement atteinte. Peut-on déduire de ce constat qu'il faut l'en bannir ainsi que les filles qui le portent ? Si l'école a une mission, c'est de faire valoir le sens de l'égalité, c'est de donner une occasion concrète de liberté, soumise à la loi, et affranchie de l'arbitraire comme des autorités abusives. Le Monde 11/12/03

Pour défendre la laïcité à l'école, il faut accepter le dialogue et apporter aux élèves les outils de la réflexion critique.
Une loi serait un aveu d'impuissance

José FOUQUE président d'Education
& Devenir
Jean-Michel DUCOMTE président
de la Ligue de l'enseignement
et Georges DUPON-LAHITTE président
de la FCPE

Libé 10/12/03

Extraits

La laïcité, principe unificateur, condition de la paix civile et sociale, participe à la définition de notre République démocratique, marquée par la séparation entre les églises et l'Etat. la société civile ne doit pas être dominée par une croyance, fût-elle la religion majoritaire, mais s'enrichir, s'ouvrir à une véritable pluralité culturelle et politique, à travers les associations, les syndicats, les partis politiques, les autres confessions et tous les regroupements de pensée ou organisations, respectueux du cadre républicain et démocratique.

Le problème qui est posé à l'Ecole par les jeunes filles portant un foulard ne saurait se résoudre par une loi. Le vote d'une loi nouvelle ne console jamais de l'inapplication de celles qui existent.

Le droit d'entrer à l'Ecole ne peut dépendre sans paradoxe de ce dont elle est justement censée permettre l'appropriation. Consentir à ne plus agir que par l'interdit de la loi, reviendrait à admettre notre impuissance d'éducateurs, à mettre la démocratie en berne.

Le meilleur moyen d'amener ces jeunes filles à refuser cette coutume, symbole d'un effacement social de la féminité, reste l'action éducative et pédagogique. C'est dans le dialogue, parfois dans la confrontation, que se met en oeuvre la fonction libératrice de l'Ecole. Quand l'Ecole accueille, sans gommer les différences, les enfants de la République et leur apporte les outils de la réflexion critique, elle ne met pas la laïcité en danger.

Pour examiner avec justice leurs intérêts, leurs affections, leurs forces, leurs rapports avec leurs semblables et construire les conditions du vivre ensemble, les femmes et les hommes n'ont besoin que d'eux-mêmes. L'Ecole n'est-elle pas pour beaucoup d'enfants ou d'adolescents l'unique lieu où l'apprendre ? Libé 10/12/03

Texte intégral

C'est saint Paul qui, le premier, a imposé le voile aux femmes avec des arguments religieux.
Voile, une antique aliénation

Mohamed KACIMI écrivain

Libé 10/12/03

Extraits

Quand on connaît le peu de concessions ou d'attention accordées par la classe politique à la communauté musulmane, on est surpris par sa délicatesse, sa prévenance et son souci de la rhétorique dans cette affaire du voile.

D'où vient donc cette histoire du voile ? D'une croyance sémitique très ancienne, qui considérait la chevelure comme le reflet de la toison pubienne ! Aussi, le port du voile est-il rendu obligatoire dès le XIIe siècle avant J.-C. par le roi d'Assyrie. C'est saint Paul qui, le premier, a imposé le voile aux femmes en avançant des arguments strictement religieux. «Toute femme qui prie ou parle sous l'inspiration de Dieu sans voile sur la tête, commet une faute ». «L'homme, lui, ne doit pas se voiler la tête : il est l'image et la gloire de Dieu, mais la femme est la gloire de l'homme. » 

Nulle part dans les sourates, il n'est fait explicitement mention de voile (hijab) recouvrant le visage, cachant les cheveux et encore moins tout le corps. C'est la Révolution iranienne de 1979 qui entraîne la généralisation du voile. Le hijab a supplanté dans les pays du Maghreb le haïk.

Qu'on en finisse avec cette parité des signes religieux. À Rome ou à Jérusalem, on ne lapide pas ceux qui ont oublié leur croix ou leur étoile de David, en revanche, de Téhéran à Khartoum, de Kaboul à Casablanca, chaque jour des femmes sont violées, vitriolées, assassinées, fouettées ou licenciées parce qu'elles ne se sont pas couvert le visage et le corps. Le hijab est l'étoile jaune de la musulmane.

Que ferons-nous demain, nous, citoyens de culture musulmane ayant fui nos pays d'origine en raison de la dictature du religieux,  quand nos filles à l'école publique se feront traiter de putes Ne pas céder sur l'affaire du voile, c'est rendre un immense service à l'islam, lui apprendre qu'il n'est pas la religion unique mais une parmi les autres. Libé 10/12/03

L'appel commun des Eglises chrétiennes contre une loi sur le voile

Le Monde 09/12/03

Extraits

Avant la remise du rapport de la commission Stasi sur la laïcité, le 11  décembre, les représentants des Eglises catholique, protestantes et orthodoxes sous la forme d'une lettre envoyée lundi 8  décembre au président de la République, redisent leur opposition à une loi prohibant les signes religieux à l'école  : "Notre conviction est que ce n'est pas en légiférant que l'on résoudra positivement les difficultés actuelles." "La laïcité (...) n'a pas pour mission de constituer des espaces vidés du religieux, mais d'offrir un espace où tous, croyants et non-croyants, puissent débattre, entre autres choses, du tolérable et de l'intolérable, des différences à respecter et des écarts à empêcher, et ceci dans une écoute mutuelle, sans taire les convictions et les motivations des uns et des autres, mais sans affrontement ni propagande." "N'est-il pas surprenant que nous n'ayons plus confiance en la valeur pédagogique du cadre de vie scolaire commune et du débat qu'il permet, pour lui préférer la sujétion à la loi, au risque de l'exclusion ou du rejet vers des pratiques communautaristes." Le Monde 09/12/03

Le texte intégral de la lettre est consultable La Croix 08/12/03

 

Les enjeux de la laïcité en huit questions

 

Extraits

1.      Qu'est-ce qu'un signe religieux? Chaque religion, puisant dans ses Ecritures ou sa symbolique, se manifeste par des signes extérieurs, plus ou moins «discrets», plus ou moins «visibles», plus ou moins «ostentatoires». : [voile, barbe, kippa, croix huguenote, croix diverses, médailles…]

2.      Combien d'élèves portent-ils aujourd'hui un voile ou un autre signe religieux à l'école? Selon le ministère de l'Intérieur «quelques centaines d'élèves» porteraient le voile Reste que les cas de jeunes filles voilées ne sont pas toujours signalés aux autorités académiques. L'Education nationale estime que les élèves portant la kippa sont «rares».

3.      Que dit la loi française sur la laïcité à l'école? «Nul ne doit être inquiété pour ses opinions, même religieuses, pourvu que leur manifestation ne trouble pas l'ordre établi par la loi»Art 2 DDH,

4.      Comment la laïcité s'applique-t-elle dans les autres services publics? «Le principe de laïcité associe la neutralité du service public et la liberté religieuse pour les agents et les usagers. Cet équilibre a conduit, dans le cas des personnels, à prohiber l'expression de leurs convictions religieuses dans le cadre du service public. »

5.      Quels sont les moyens envisagés pour interdire les signes religieux dans les collèges et les lycées?

6.      «Visible» ou «ostentatoire»: où fixer l'interdiction dans une loi? Pour les juristes, «visible» est une notion objective, plus aisément applicable. L'interdiction des signes visibles n'éliminerait pas toutes les questions, puisqu'il faudra décider si sont comptabilisés parmi les signes «religieux et politiques» le keffieh, la barbe, le tee-shirt Che Guevara... Le caractère ostentatoire repose sur une évaluation au cas par cas.

7.      L'école privée sera-t-elle concernée par une loi interdisant les signes religieux? Vouloir interdire les signes confessionnels dans les écoles confessionnelles peut apparaître contraire au bon sens. Ce débat a une assise juridique. C'est l'article 442-1 du Code de l'éducation: il stipule que, dans les établissements privés ayant passé un contrat avec l'Etat, «l'enseignement placé sous le régime du contrat est soumis au contrôle de l'Etat. »

8.      Une loi risque-t-elle de nourrir un sentiment de stigmatisation chez les musulmans? Que, à la suite des écoles catholiques, puis juives, s'ouvrent à terme des écoles musulmanes, semble probable.

Le Figaro 08/12/03

Deux camps retranchés dans leurs convictions

Les uns voient la loi comme un rempart, les autres craignent un risque de radicalisation.

Libé 08/12/03

Extraits

Les politiques sont plutôt pour, les religieux, associatifs et syndicalistes plutôt contre Le SNPDEN (principal syndicat des chefs d'établissement) réclame une loi, la FSU (organisation majoritaire des personnels de l'éducation) est plus que réservée. «C'est le seul moyen de ne pas laisser de prise aux intégrismes qui avancent masqués dans l'école publique au nom des libertés individuelles, de la tolérance et de la neutralité», affirme Philippe Guittet, du SNPDEN. «Le voile islamique nous renvoie toutes, musulmanes et non-musulmanes, à une discrimination envers la femme qui est intolérable», écrit Elle.

«Légiférer sur ce sujet ne ferait que rendre la situation plus radicale», prévient Abdelaziz Belkhadem, ministre algérien des Affaires étrangères. François Bayrou est du même avis : «On ne peut pas faire plus beau cadeau à l'intégrisme que de cibler la foi.» Enfin, pour François Chérèque, CFDT, «cela risquerait de renforcer les communautarismes». Libé 08/12/03

Voir aussi, toujours dans Libé "La journée d'un indécis"

et aussi Un débat passionnel qui a fait voler en éclats les clivages politiques et intellectuels traditionnels et voit s'affronter le socle laïque, invention centenaire de la République à la française, et le bloc religieux, trop vite enterré dans les sous-sols d'un XXe siècle très progressiste, mais qui fait, à la faveur de l'effondrement des idéologies des lendemains radieux, un inquiétant retour en force. L'opinion publique pour une loi à 57 %.

 Voir aussi Ouest-France 08/12/03

Laïcité : Boutih pour une loi large

Nel Obs 07/12/03

Extraits

"[La loi] doit interdire tous les signes religieux et politiques, tous; rien ne doit être visible, rien".
"Qui distinguera entre le 'discret' et 'l'ostentatoire'?", demande Malek Boutih "On voit bien que la droite a peur de heurter l'église catholique. Mais l'offensive des intégristes est politique, la République ne peut tergiverser. La plupart des musulmans pratiquants ne souhaitent pas que leur identité religieuse prenne la place de leur identité républicaine"
Nel Obs 07/12/03

Signes religieux : une loi inutile et nuisible

Roger Errera conseiller d'Etat honoraire

Le Monde 06/12/03

 

Extraits

On parle d'interdire, par une loi, le port de signes religieux à l'école Une telle loi serait un acte de discrimination inutile et nuisible.

Une chose est claire pour tous : il s'agit uniquement du foulard islamique.

[Un telle loi] ne ferait que susciter et renforcer le communautarisme que le gouvernement, à juste titre, rejette. Il s'agit aussi d'une atteinte à la liberté religieuse de tous. Le Conseil d'Etat l'a rappelé en 1989 : "Le principe de laïcité implique nécessairement le respect de toutes les croyances."

"Visible" ? "Apparent" ? Fausse simplicité, et apparence trompeuse. Ira-t-on y voir de près, de très près ? "Ostentatoire", alors ? On revient à la case départ. Il est inconvenant de vouloir faire croire aux chefs d'établissement qu'une loi résoudra, par magie, leurs problèmes. Ils n'ont pas besoin de tels faux-semblants, eux qui apaisent déjà, seuls, au cas par cas, nombre de litiges.

Il faut donc de nouveaux instruments plus souples que la loi. De tels instruments doivent s'inspirer d'une conception d'ensemble des rapports sociaux face à un service public. J'en aperçois trois éléments :

*        le refus du "communautarisme", à condition qu'il ne se transforme pas en grande peur ;

*        l'acceptation concrète du pluralisme ;

*        des préceptes pour maintenir la civilité : refuser la tentation de l'intervention législative dès qu'un problème nouveau apparaît ; ne pas toujours raisonner en termes binaires ; tenir compte des situations locales ; accepter [que] la jurisprudence joue un rôle régulateur.

Le Monde 06/12/03

 

Des féministes se dévoilent

Catherine Deudon, Liliane Kandel, Annie Sugier, présidente de la Ligue internationale du droit des femmes, et Anne Zelensky, présidente de la Ligue du droit des femmes cofondée avec Simone de Beauvoir (1908-1986)

 

Le Monde 06/12/03

Extraits

Nous voyons dans la querelle du voile un symptôme de régression à l'œuvre dans notre société. Les lois conquises - sur l'avortement, le viol, la parité... - ont gagné du terrain sur la violence et l'obscurantisme.

Et voilà qu'une nuée de voiles exhibés par des adolescentes qui font, consciemment ou pas, le jeu des intégristes, remet en cause les principes fondateurs de la République et, en même temps, les acquis de notre mouvement.

Le voile est humiliant pour les femmes auxquelles il assigne une place de proie et pour les hommes qu'il assimile à des prédateurs. Le voile est une trahison pour toutes les musulmanes qui, ici et ailleurs, se sont battues pour ne plus le porter. Le voile est le signe que le patriarcat, que l'on croyait bien fatigué, renaît de ses cendres sous sa forme la plus rétrograde et virulente : l'islamisme radical. Le Monde 06/12/03

Une loi ! Le respect de la Constitution l'exige

Louis Favoreu professeur à l'université Aix-Marseille-III, directeur de la Revue française de droit constitutionnel

 

Extraits

Seule une loi peut opérer une conciliation entre deux principes constitutionnels dont les exigences sont contradictoires : le principe de laïcité, d'une part, affirmé à l'article premier de la Constitution et par le préambule de la Constitution de 1946, et la liberté de religion, d'autre part, consacrée par les textes constitutionnels de 1789, 1946 et 1958 : "la loi fixe les règles concernant : ... les garanties fondamentales accordées aux citoyens pour l'exercice des libertés publiques". L'avis du Conseil d'Etat du 27 novembre 1989 ne saurait évidemment tenir lieu de loi. Selon que l'on se trouve dans tel ou tel établissement (scolaire], la règle appliquée risque de ne pas être la même. Or, comme le proclame l'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, "la loi doit être la même pour tous soit qu'elle protège, soit qu'elle punisse". Le Monde 06/12/03

Le chef de l'Etat a aussi condamné la «discrimination positive» prônée par Nicolas Sarkozy
A Tunis, Chirac refuse les signes religieux «ostentatoires»

 

Le Figaro 05/12/03

Extraits

Le président n'a pas voulu trancher prématurément la controverse sur l'opportunité d'une loi. En signifiant, face aux élèves du lycée français de Tunis, son refus des signes religieux «ostentatoires» et en jugeant que le port du voile islamique était «une sorte d'agression», il a cependant laissé clairement deviner où allait sa préférence. Au passage, le chef de l'Etat a aussi rejeté comme «pas convenable» l'idée de «discrimination positive» «Nous ne pouvons accepter de signes ostentatoires, quels qu'ils soient, ni de prosélytisme religieux, quelle que soit la religion». «Je considère que les Français, étant ce qu'ils sont, le port du voile est, qu'on le veuille ou non, une sorte d'agression qu'il leur est difficile d'accepter.» Pour Jacques Chirac, la défense de la laïcité va bien au-delà de l'affaire du voile. Evoquant le cas de femmes musulmanes qui refusent d'être soignées par des médecins hommes, il souligne qu'il y a là «une contestation des règles nationales qui ne peuvent pas être acceptées ». Le Figaro 05/12/03

Signes visibles ou ostentatoires ? La commission Stasi se prononcera par un vote

Le Figaro 05/12/03

Extraits

La plupart de ses membres préféraient jusqu'à présent interdire les signes «visibles», une notion qualifiée d'«objective», donc plus opérante que l'évaluation, au cas par cas, du caractère «ostentatoire» d'un voile ou d'une kippa. Mais le récent consensus de l'UMP pour interdire «le port ostentatoire de signes religieux» a ravivé les doutes des indécis. Cette version, qui, de leur propre aveu, «ne changerait pas grand-chose à l'état actuel du droit», séduit justement ceux qui hésitaient à légiférer. Le Figaro 05/12/03

 

Pressions en faveur du voile islamique, atteintes à la mixité, dénonciation de l'«islamophobie» : la cohésion républicaine en péril ?
Le «hidjab», la croix et l'Europe

Jean-Louis Harouel Professeur agrégé de droit à l'université de Paris-II. Auteur de Culture et Contre-cultures (PUF)

Extraits

Bien évidemment, il ne faut pas interdire à l'école les croix, médailles de baptême, étoiles de David, mains de Fatma et autres amulettes. Le foulard islamique est bien davantage que cela. Le foulard à l'école, c'est l'affirmation publique que l'on peut vivre en France sous le droit coranique, en bafouant celui de la République. Le foulard à l'école est un étendard islamique planté dans le sol français, pour bien manifester que celui-ci est désormais terre d'islam. Il faut donc interdire le foulard à l'école, et le foulard seul. Un islam des Lumières ne pourra apparaître que lorsque la religion musulmane aura subi l'équivalent de ce qu'a subi depuis trois siècles la religion chrétienne. En revanche, interdire au nom d'une fausse symétrie la croix ou autre pendentif serait un profond contre-sens quant à la signification de la laïcité. Le Figaro 05/12/03 

La laïcité, un substitut de l'identité nationale ?
La citoyenneté kidnappée

Shmuel Trigano Professeur des universités, auteur de La Démission de la République, PUF

 Le Figaro 0512/03

Extraits

Jusqu'à nouvel ordre, la laïcité constitue avant tout un cadre juridique et constitutionnel qui organise le rapport de l'Etat aux religions Elle sert aussi indirectement une finalité identitaire : c'est bien de l'identité nationale qu'il est question, par exemple avec le voile dont l'expansion changerait le paysage habituel de la société civile, impulsant au pays une tonalité culturelle inédite, bien loin de la sécularisation du paysage social qui a vu disparaître l'habit ecclésiastique.

La loi de séparation assurait la prééminence de l'Etat et organisait le rapport de pouvoir à pouvoir avec les nouvelles institutions religieuses.

Dans tous les camps, force est de constater la dissociation de la citoyenneté et de la nationalité, de l'Etat et de la nation. L'invocation de la citoyenneté par le courant islamiste sert en effet d'écran à son peu d'appétence à l'intégration dans l'identité nationale. Le Figaro 0512/03

Interdire le voile ?

Mustapha Benchechane Politologue à la faculté de droit de l'université René-Descartes Paris-V

Le Figaro 05/12/03

 

 

Extraits

Dans le contexte français, le hidjab, le voile ou le tchador sont des accoutrements grotesques, incongrus et inopportuns. Cependant, les activistes qui veulent les interdire au nom de la laïcité se trompent de registre et de référence. Pour [Marcel Gauchet], la laïcité est «le passage dans un monde où les religions continuent d'exister, mais à l'intérieur d'une forme politique et d'un ordre collectif qu'elle ne détermine plus».. Dès 1789, ce principe [la liberté de conscience] signifiait qu'il n'y a pas de lien entre la citoyenneté française et l'appartenance religieuse. Mais, en même temps, la République «garantit le libre exercice des cultes». L’article 28 de la loi de 1905 dit : «Il est interdit, à l'avenir, d'élever ou d'apposer aucun signe ou emblème religieux sur les monuments publics ou en quelque emplacement public que ce soit, à l'exception des édifices servant au culte, des terrains de sépulture dans les cimetières, des monuments funéraires, ainsi que des musées ou expositions.» Respectueux de la loi, l'avis du Conseil d'Etat de 1989 conclut à la compatibilité entre port du foulard et principe de laïcité. Le vote d'une loi, comme il en est question en ce moment, serait le passage d'une laïcité de clarification et de pacification à une laïcité rigide et conflictuelle. le risque est grand de prendre le symptôme pour le mal. Le «foulard islamique» cristallise le malaise que ressentent beaucoup de Français qui s'interrogent sur eux-mêmes et sur l'identité de leur pays. Si on arrive à prouver que certaines affaires de «voile» sont instrumentalisées dans un but politique par des extrémistes, rien n'empêche d'appliquer la loi. On peut rappeler [aux] enseignants que personne ne les a chargés de défendre la laïcité à laquelle ils semblent ne pas comprendre grand-chose. Le Figaro 05/12/03

Elle lance un appel contre le voile

Nel Obs 04/12/03

Extraits

Une soixantaine de personnalités, d'Isabelle Adjani à Elisabeth Badinter, ont déjà signé ce texte demandant l'interdiction de ce "symbole visible de la soumission de la femme".

"Le voile islamique nous renvoie toutes, musulmanes et non-musulmanes, à une discrimination envers la femme qui est intolérable. Toute complaisance à cet égard serait perçue par chaque femme de ce pays comme une atteinte personnelle à sa dignité et à sa liberté", Mais la loi ne peut être que "la première étape d'un projet global d'intégration".

[Parmi les signataires] l'ancienne ministre des Droits de la Femme Yvette Roudy, Fadéla Amara, la présidente du mouvement "Ni putes ni soumises", l'écrivaine Edmonde Charles-Roux, la créatrice Sonia Rykiel, les réalisatrices Nicole Garcia, Coline Serreau et Catherine Breillat et les actrices Isabelle Adjani, Emmanuelle Béart, Isabelle Huppert et Jane Birkin. Nel Obs 04/12/03

 

Voile : la mission parlementaire vote pour une «disposition législative»

 

Le Figaro 04/12/03

 

Extraits

[La mission préconise] et une «disposition législative», comprenant un article unique à introduire dans le code de l'Education, visant à interdire «le port de tout signe visible d'appartenance religieuse ou politique dans les établissements scolaires» du public. Les établissements privés sous contrat ne seraient pas concernés et cette interdiction «ne remettrait pas en cause les régimes spécifiques qui prévalent actuellement en Alsace-Moselle et dans certaines collectivités d'outre-mer». Le Figaro 04/12/03 Voir aussi Ouest-France 05/12/03 et Le Parisien 05/12/03 Le groupe PS "satisfait" AFP-Voilà 04/12/03

Le sénateur PS Michel Charasse a défendu une loi assortie de "sanctions pour les familles, les parents" en cas "de non respect de la laïcité", car "le responsable de la situation ce n'est pas l'enfant --il est mineur--, ce sont les parents".

AFP-Voilà 04/12/03  Le texte du rapport

Royal (PS) déplore que le débat déborde "sur la question religieuse"

AFP-Voilà 01/12/03

Extraits

L'ancienne ministre Ségolène Royal, députée PS des Deux-Sèvres, a approuvé la position du PS en faveur d'une loi sur la laïcité, mais a déploré que le débat ait "débordé sur la question religieuse". La question du voile et des signes religieux [est] "un problème délicat" et [il faut] "éviter de l'aborder de façon trop brutale. Au fur et à mesure que ce débat se déroule, on sent monter un certain malaise et les autres grandes religions sont réticentes. Une décision d'interdiction n'est pas suffisante. On doit lutter contre toutes les formes d'extrémisme, et le voile est l'expression d'un extrémisme. En même temps, la République doit aussi redéfinir les raisons de vivre ensemble. " AFP-Voilà 01/12/03

Jean-Michel Ducomte: une loi sur la laïcité serait une "défaite de la République"

AFP-Voilà 29/11/03

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Jean-Michel Ducomte, avocat et nouveau président de la Ligue de l'Enseignement, estime qu'une loi sur la laïcité serait une "défaite de la République".

“Je précise en préambule que je suis opposé au port du voile à l'école.

La loi devient un exorcisme, une façon de se rassurer à peu de frais et d'évacuer le débat. Il faut d'abord parler d'égalité homme-femme, de discrimination, de politique urbaine. Si on fait passer la loi avant le débat, je crains que ce ne soit une nouvelle défaite pour les laïcs. D'ailleurs, je me méfie des laïcs fraîchement convertis comme Mme Boutin.

On pourrait dans un premier temps reprendre le droit tel qu'il est, et en faire une "codification", menant à une "charte de la laïcité". AFP-Voilà 29/11/03

Les membres de la commission Stasi sur la laïcité s'agacent des déclarations de M.  Raffarin sur le foulard

Le Monde 2/12/03

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"En droit, la proposition de l'UMP fait sourire", confie l'un des juristes de la commission. A François Fillon, qui, le 16  septembre devant la commission, avait prôné, comme le fait désormais l'UMP, une loi interdisant le port "ostentatoire", de tout signe religieux, Rémy Schwartz, conseiller d'Etat et rapporteur général de la commission Stasi, avait fait remarquer qu'un tel texte "ne changerait rien puisque c'est l'état du droit". il continuerait de revenir au juge administratif d'apprécier, au cas par cas, le caractère "ostentatoire" Seule l'exigence manifestée devant la commission par le vice-président de la Cour européenne des droits de l'homme, de consolider l'édifice juridique français en donnant à la règle sur le foulard la force de la loi, serait satisfaite. Le Monde 2/12/03

 

Les Eglises chrétiennes préparent une déclaration contre une loi sur les signes religieux

Le Monde 2/12/03

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Le pasteur Jean-Arnold de Clermont a redit son opposition à une loi interdisant les signes religieux à l'école. "Avant de poser la question de la laïcité, il faudrait se poser celle de l'intégration. Il est évident qu'il existe un prosélytisme islamique. Mais il y a des problèmes plus graves que le foulard. D'autant que la médiation permet de résoudre 97  % des cas." le Conseil des Eglises chrétiennes en France, une instance de concertation qui réunit les catholiques, les protestants et les orthodoxes, [met] la dernière main à une déclaration sur la laïcité (pour rappeler] leur hostilité à une législation contre les signes religieux à l'école. Le Monde 2/12/03

Foulard : l'UOIF crie à l'injustice

Nel Obs 29/11/03

 

Extraits

Le président de l'Union des organisations islamiques de France, Lhaj Thami Breze, déclare que l'UMP "se moque des musulmans", "s'il y avait une loi contre le port du voile à l'école, il faudra la respecter, mais elle aura pour conséquence l'ouverture d'écoles confessionnelles" musulmanes. Le président de l'UOIF a affirmé que la France "est en train de rétrécir la laïcité", "on fait une lecture idéologique de la laïcité qui esquive le vrai débat".
"L'UMP se moque des musulmans, il faut cesser de parler sans cesse de fondamentalisme, le port du voile est une pratique religieuse. Ce sont les musulmans qui sont visés, pas les autres, et donc ce sera une loi injuste"
Nel Obs 29/11/03

L'UMP exclut le voile de l'école
Vendredi, le parti chiraquien s'est prononcé pour une loi, Sarkozy se ralliant à la position de Juppé

 

Libé 29/11/03

Extraits

«La décision législative que nous choisirons sera bonne si elle protège toutes les femmes de toutes les contraintes du fondamentalisme. » (J.P. Raffarin)

Le Conseil national de l'UMP (...) demande au gouvernement de procéder à l'élaboration d'un "code de la laïcité" qui regrouperait l'ensemble des règles applicables en la matière, et, au besoin, les compléterait par l'adoption d'une disposition législative prohibant explicitement le port ostentatoire de tout signe politique ou religieux dans les écoles, collèges et lycées. Libé 29/11/03 Voir aussi Ouest-France 29/11/03 Et Le Parisien 29/11/03 qui écrit : Sarko s'exprime le premier. « Nous ne devons pas pénaliser les catholiques, les juifs, les protestants, qui, depuis un siècle, ont accepté la laïcité à la française parce qu'une minorité infime de musulmans se comporte de façon contraire aux valeurs de la République. Une loi de prohibition de toute forme d'insigne, fût-elle la plus discrète, serait injuste à leur endroit. »

Les effets pervers du débat médiatique sur le foulard

Vincent Geisser, chercheur à l'Institut de recherches et d'études sur le monde arabe et musulman (CNRS).

L'Humanité 28/11/03

Extraits

La majorité silencieuse des femmes françaises de culture musulmane est victime de ne pas coller aux clichés exotiques et néocolonialistes qui continuent aujourd'hui à modeler le débat public sur l'intégration des filles issues de l'immigration. Ces nouvelles " ni, ni " (ni SOS Racisme, ni l'UOIF !) nous gênent profondément, parce qu'elles viennent contrarier les fantasmes érotisants, produits de notre imaginaire colonial franco-français.

Le stéréotype de la " beurette libérée " participe d'une mise en scène médiatique  nouvelle " Cosette de la France républicaine du XXIe siècle " : les Ténardier s'appellent désormais Ben Mohamed, et l'auberge " terrible " du village de Montfermeil a été remplacée par les caves glauques des immeubles de la cité des Bosquets

la " beurette voilée " présente une certaine utilité socio- politique pour ceux qui voudraient transformer la laïcité républicaine en machine de guerre contre une religion minoritaire

Parce qu'elle ne parvient pas à assouvir nos fantasmes exotiques à l'égard de la femme musulmane, la majorité silencieuse des filles issues des immigrations africaine, maghrébine et turque sont condamnées au silence médiatique. L'Humanité 28/11/03

Le contexte politique français non paritaire mine la crédibilité d'une loi contre le port du foulard.
Le voile de notre hypocrisie

Dominique Reynié, Professeur des universités à l'Institut d'études politiques de Paris

 

Libé 28/11/03

Extraits

Le recours compulsif au législateur n'est-il pas l'expression de notre tropisme politique, une manière de faire péremptoire, autoritaire, centralisé, souvent inefficace. De l'inefficacité de la loi découle son irrespect.

Il est désormais admis que si le port du foulard a partie liée avec la laïcité, notamment dans les collèges et lycées, il pose aussi le problème du statut de la femme. Ce serait une grande victoire que de parvenir à empêcher, si possible à dissuader ou, mieux, à convaincre les jeunes musulmanes de ne pas se voiler. Une société qui ne parvient même [pas] à dissimuler des contradictions radicales entre le discours de l'égalité et le sort en réalité réservé aux femmes est-elle crédible lorsqu'elle affirme soudainement que le port du foulard est une atteinte insupportable à leur dignité ? Ce n'est pas un préfet musulman qu'il faut nommer, mais une préfète, peut-être musulmane, et, s'il faut se lancer dans une vaste opération de «discrimination positive», ce sont les femmes qui doivent en être les bénéficiaires. Il serait extraordinaire qu'après avoir attendu si longtemps et avec aussi peu de résultats, les femmes soient maintenant coiffées au poteau par des hommes, au motif qu'ils sont issus de l'immigration.  Montrons que nos lois sont respectées, elles seront alors respectables. Libé 28/11/03

" La laïcité est l'acceptation des différences "

Paul Malartre, secrétaire général de l'enseignement catholique

 

L'Humanité 27/11/03

Extraits

Une loi conjoncturelle ne réglera rien sur le fond. Cela reviendrait à voter un texte d'exclusion supposé favoriser l'intégration. De plus, nous craignons que cela entraîne la radicalisation de l'expression communautariste avec une augmentation des provocations

La laïcité telle que nous souhaitons la vivre est l'acceptation, la reconnaissance et l'identification des différences ethniques, culturelles et religieuses. Nous craignons que l'on se dirige vers une laïcité qui gomme toutes les différences,

Chez nous, chaque établissement décide de son règlement intérieur. Dans certains, le voile est toléré ; dans d'autres, systématiquement interdit et il y a déjà eu exclusion. L'Humanité 27/11/03

 

Foulard islamique : loi ou pas loi ?

 

Le Monde 28/11/03

Extraits

A leur corps défendant, les "sages" de la commission Stasi ont tourné invariablement autour de ce choix réducteur : [foulard islamique, loi ou pas]. La publication, au beau milieu de leurs travaux, des conclusions de la mission parlementaire favorable à une loi d'interdiction du "port visible" de tout signe d'appartenance religieuse ou politique n'a pas aidé à élargir l'horizon de la réflexion. Comment a-t-on pu enfermer dans une gangue aussi étroite une réalité qui met en jeu non pas seulement la place de l'islam dans le paysage religieux mais la question des discriminations sociales et ethniques et, partant, celle de la recomposition identitaire de la société française et du "vivre-ensemble"? Comment en est-on arrivé à transformer en un dilemme simpliste un défi social aussi central que complexe ? Qui peut croire que la réponse - probablement positive - apportée à une question binaire suffira ?

La pente vers un texte législatif a été si forte que la précaution élémentaire consistant à dresser au préalable un état précis et chiffré de la situation n'a pas été prise. Une règle législative n'épargnerait nullement aux enseignants les cas de conscience au moment d'exclure une élève voilée. Le Monde 28/11/03

Foulard  : l'UMP débat d'un plan incluant le principe d'une loi

 

Le Monde 28/11/03

Extraits

Le parti du président cherche à établir une synthèse acceptable aussi bien par les ministres et élus de la majorité qui réclament une loi destinée à interdire le port de signes religieux à l'école publique, que par ceux, tels Nicolas Sarkozy et Dominique Perben, qui ont exprimé des réticences. Au souci de rassurer les enseignants et les chefs d'établissements scolaires demandeurs d'une règle nationale destinée à se substituer à la jurisprudence du Conseil d'Etat, qui n'interdit le foulard qu'en cas de prosélytisme ou de trouble à l'ordre public, s'ajouterait le souci d'adresser un signe positif à la population d'origine ou de religion musulmane en renforçant les politiques d'intégration.

Un "code de la laïcité" [réunirait et codifierait], sous une forme accessible à tous, l'ensemble des textes existant sur le sujet. S'agissant du seul milieu scolaire, l'idée d'une loi destinée à prohiber le port de signes religieux serait retenue. Reste à trancher entre l'interdiction des seuls "signes ostentatoires" et celle qui viserait tous les "signes visibles". Reste aussi à savoir si ce texte serait inclus dans la future loi d'orientation sur l'école ou ferait l'objet d'une loi spécifique. La volonté de renforcer les politiques d'intégration serait proclamée par la création d'une "haute autorité à l'intégration". Le Monde 28/11/03

Le gouvernement et les dirigeants de l'UMP sont parvenus à trouver un consensus qui doit être dévoilé demain au conseil national du parti chiraquien
Voile : le compromis qui réconcilie la majorité

 

Le Figaro 27/11/03

 

Extraits

Un consensus s'est dégagé dans le parti présidé par Alain Juppé sur trois points: premièrement, la nécessité d'élaborer un code de la laïcité est retenue. Deuxièmement, la possibilité de voter une disposition législative portant sur les «signes religieux et politiques ostentatoires» à l'école publique est arrêtée. Enfin, la nécessité d'insister sur le renforcement de la politique d'intégration, qui pourrait notamment déboucher sur la création d'une haute autorité à l'intégration, est également reconnue.

Jacques Chirac, qui suit de près les débats, est tout à fait conscient des dangers qu'il y aurait à rouvrir une quelconque querelle religieuse en remettant en question l'équilibre instauré par la loi de 1905. Il insiste beaucoup auprès de ses interlocuteurs sur les efforts à faire en matière d'intégration. Le Figaro 27/11/03

Le totem du communau-tarisme

Alain Duhamel

 

Libé 26/11/03

Extraits

La querelle du voile islamique s'embrase lentement derrière ses paravents d'hypocrisie.

C'est que le sujet, en devenant de plus en plus passionnel, n'a rien perdu de sa complexité. Si intégrationnistes et communautaristes polémiquent âprement, personne ne peut prétendre qu'il existe une solution sans graves inconvénients. L'interdiction par une loi du voile islamique à l'école serait inévitablement ressentie comme une stigmatisation de l'islam. Inversement, renoncer à légiférer et à interdire clairement le port du voile islamique à l'école reviendrait à admettre un premier recul symbolique de la laïcité. Le voile islamique à l'école ne constitue que le totem du communautarisme. Il peut être porteur d'une guerre d'usure contre l'idéologie et la pratique républicaines, contre la supériorité de la loi sur tout précepte religieux.

Dans une République laïque, aucune prescription religieuse ne peut s'imposer à la loi. Encore faut-il que celle-ci existe Elle devrait comporter une obligation de dialogue, pour aboutir à l'abandon consenti du voile ou à son remplacement par un bandana C'est d'ailleurs ce que font la plupart des enseignants et des responsables d'établissements scolaires actuellement concernés.

La tentation communautariste n'a rien d'un péril imaginaire et la coalition des dignitaires religieux de toutes confessions contre une loi d'interdiction du voile islamique en constitue l'aveu le plus inquiétant. Libé 26/11/03

 

Il ne faut pas légiférer

Daniel Cohn-Bendit

Le Parisien 26/11/03

Extraits

Il y a toutes sortes de militants qui, dans leurs pratiques quotidiennes, en faisant passer la loi religieuse avant la loi républicaine, remettent en cause la laïcité. Est-il réducteur de limiter le débat à une loi interdisant le voile à l'école ? Une telle loi marginaliserait certains. Ils n'auraient plus les lieux où ils sont, aujourd'hui, obligés de se confronter à une perspective laïque du monde et de la société. Si on exclut de l'école les filles portant un foulard, où vont-elles aller ? Dans des établissements confessionnels. Je milite pour une école laïque, qui se bat pour la laïcité en acceptant les défis de ceux qui, en son sein, remettent en cause ce principe. Il faut faire de l'école le lieu où l'on débat de ces questions afin de donner aux filles la possibilité de s'émanciper des démons de l'intégrisme religieux. Le Parisien 26/11/03

Ceux qui veulent une loi sont majoritaires

Le Parisien 26/11/03

Extraits

53 % des Français sont favorables à une loi interdisant le port de tout insigne religieux apparent à l'école. En face, ils sont 42 % à s'y opposer. Toutefois, le nombre des partisans d'une législation est en légère diminution par rapport au sondage d'octobre. A l'époque, 55 % des personnes interrogées s'y déclaraient favorables dans chaque camp, le nombre des « tout à fait favorables » et des « tout à fait opposés » est nettement à la hausse. Les premiers passent de 25 à 29 % ; les seconds, de 17 à 24 %. Signe que chaque camp se radicalise. Les opposants ou les réticents sont majoritaires chez les 18-24 ans.  Le Parisien 26/11/03

Renoncer à légiférer contre le port du voile serait un échec pour la démocratie.
Entendre les voix de la laïcité

Marc Augé

Ethnologue

 

 Libé 26/11/03

Extraits

Devant le caractère concerté de l'offensive islamiste en France, le président de la République et le gouvernement semblent décidés à légiférer pour défendre la laïcité. Ils auraient pu espérer que l'Eglise catholique leur donnerait un discret coup de main. Ses écoles prospèrent grâce à l'argent public. Que nenni. Mgr Ricard, président de la Conférence épiscopale, a déclaré qu'une loi interdisant les signes religieux à l'école serait «une régression de la liberté religieuse». Si Mgr Ricard ne veut pas qu'on interdise les signes religieux à l'école, c'est pour que les écoles religieuses sous contrat restent à l'abri de la loi [éventuelle]. L'Eglise  en matière de laïcité, n'a jamais accordé que ce qu'on lui imposait.

D'un côté, les propagandistes de l'islamisme, qui trouvent des relais complices, complaisants ou aveugles dans la presse et jusque dans les rangs de certains altermondialistes, les évêques de France, qui se jettent dans une bataille pour la conservation des avantages acquis. Enfin, les Munichois de la laïcité, belles âmes de droite ou de gauche qui préfèrent capituler d'emblée devant l'Eglise. De l'autre côté, les enseignants, exaspérés par les conditions dans lesquelles ils travaillent et qui n'ont pas de leçons d'antiracisme à recevoir, une grande majorité de musulmans, pratiquants ou non, croyants ou non, surtout, une masse immense et silencieuse de femmes et de jeunes filles qui attendent d'être libérées de la peur.

Renoncer à légiférer serait une Bérézina pour le gouvernement, une défaite pour la démocratie. Libé 26/11/03

Chevènement pour une loi interdisant les signes religieux

Extraits

Jean-Pierre Chevènement s'est déclaré favorable à une loi qui interdit tous les signes d'appartenance religieuse dans l'espace public, "l'avis du Conseil d'Etat de 1989 sur le voile (islamique) est ambigu. Il reporte sur les chefs d'établissements (scolaires) la responsabilité de fixer les règles. Une loi est donc nécessaire, mais elle doit concerner tous les signes d'appartenance religieuse et de prosélytisme, et dans l'espace public seulement" AFP-Voilà 25/11/03

 

Raffarin plaide pour un code de la laïcité

AFP-Voilà 23/11/03

Extraits

Jean-Pierre Raffarin a souligné ses réticences devant une loi comme "préalable". "Je pense que la loi sera utile", mais elle viendra "en conclusion d'une réflexion" pour faire respecter les deux composantes de la laïcité, la "neutralité" de l'Etat et la "tolérance" à l'égard de toutes les religions.
Comme "première étape", il a préconisé la rédaction d'un "code de la laïcité" rassemblant "tous les textes qui existent déjà et qui font dans notre pays respecter la neutralité de l'Etat". La rédaction de ce "code de la laïcité" pourrait être achevée "au cours du 2ème semestre de l'année 2004".
"L'enjeu aujourd'hui ce ne sont pas les petites croix, les étoiles de David, les mains de Fatima qui sont portées avec discrétion autour du cou, mais c'est le voile islamique en tant qu'expression ostentatoire d'une mauvaise intégration dans la communauté nationale, de contestation de la loi républicaine".
Il a également indiqué qu'il "n'acceptait pas cette idée qu'aujourd'hui on puisse être défini par sa religion ou par la couleur de sa peau". "On est Français par sa citoyenneté".
AFP-Voilà 23/11/03

Badinter pour une loi
contre le voile

Le Parisien 23/11/03

Extraits

Ce qui importe au premier chef, c'est l'école publique. Non seulement la laïcité, principe constitutionnel, doit y être enseignée, mais aussi respectée. L'école est un lieu de transmission du savoir et d'éducation civique. Elle ne doit pas devenir un espace de proclamation idéologique, confessionnelle ou politique. Je souhaite donc une loi. On ne peut pas laisser à la seule responsabilité des enseignants le choix des mesures à prendre. C'est au Parlement de se prononcer. S'il décide qu'il n'y a pas lieu d'admettre dans l'école le port de signes religieux et qu'il faut préserver là une neutralité absolue, eh bien, chacun devra s'y conformer. Si un garçon ou une fille arrivent à l'école publique porteurs de signes religieux qu'ils entendent conserver jusque dans la salle de classe, ils proclament par là même qu'ils considèrent une prescription religieuse comme supérieure à la loi de la République. S'ils persistent malgré entretiens et avertissements, ils ne peuvent avoir leur place dans l'école publique. Le Parisien 23/11/03

L’éditorial de Jean Daniel

 

 Nel Obs 20/11/03

Extraits

Refuser de respecter les mœurs et les coutumes des sociétés d’accueil, ce n’est pas simplement une impolitesse, c’est une volonté de se différencier, de prendre des distances, bref de s’exclure, quitte à se proclamer ensuite victime de l’exclusion. «Les musulmans qui insistent sur le port du voile doivent savoir que leur insistance même signifie qu’ils ne respectent pas les sentiments des gens avec lesquels ils vivent dans une même patrie, qu’ils n’adhèrent pas à leurs valeurs, qu’ils attentent à ce qui fait la base même de leur vie en société, qu’ils se moquent des lois pour lesquelles ces gens ont longtemps lutté et qu’ils refusent les principes de la démocratie républicaine dans les pays qui les ont accueillis et leur offrent travail et liberté…Les interprétations religieuses qui imposent à la femme musulmane le port du voile, dans un pays laïque révèlent une mentalité qui ne se contente pas de voiler les femmes mais désire profondément voiler l’homme, la société, la vie dans son ensemble et voiler la raison.» (Adonis, poète musulman contemporain). Nel Obs 20/11/03

 

Les Français pour une loi contre le voile

Libé 21/11/03

Les Français sont à 72 % favorables à une loi «interdisant le port visible de tout signe d'appartenance religieuse ou politique dans les écoles publiques», d'après un sondage réalisé par l'institut BVA pour le magazine Profession politique. 23 % y sont opposés. 83 % des sympathisants de l'UMP sont pour une telle loi, ceux de l'extrême gauche 61 %. Libé 21/11/03

Voile : une loi, mais laquelle ?

Faire barrage à l’intégrisme sans blesser l’islam

 

Nel Obs 20/11/03

Un dossier du Nel Obs (hebdo) 20/11/03

Extraits

La droite, en majorité, y est favorable. Les socialistes aussi. Sarkozy et Ferry n’en voulaient pas. Mais Chirac s’est fait sa religion: il faut une loi pour défendre la laïcité et proscrire le voile – comme tout signe religieux – à l’école.

Les difficultés sont-elles la conséquence naturelle de l’expansion de l’islam, mal vécue par une partie de la population, ou sont-elles dues à l’offensive de groupes religieux extrémistes qui tentent de contourner la laïcité à la française pour imposer une pratique communautaire. Les chiffres manquent ou sont biaisés.

Faut-il tolérer, discuter, exclure? Les enseignants interrogés ont témoigné que le climat s’était durci. Que la négociation avait atteint ses limites. «Nous allons voir se développer dans les hôpitaux les mêmes conflits que dans l’enseignement public», avertit le professeur Henrion. Pour simplifier, disons qu’on retrouve contre la loi ceux qui pensent que «la mission de l’école de la République est d’intégrer et non d’exclure» et que toute loi contre le voile serait une atteinte à la liberté individuelle des élèves. Pour eux, la tolérance est la bonne attitude, le dialogue la bonne méthode. A l’autre extrémité, le camp des «laïcards» se prononce pour l’interdiction totale de tous les signes religieux visibles, y compris dans les collèges privés. Et pour une loi qui ne concernerait pas seulement l’école mais tout ce qui touche aux rapports hommes-femmes et à l’égalité entre les sexes.
Entre ces deux pôles, les plus nombreux sont les hésitants. Faire barrage à l’islamisme sans blesser l’islam, c’est toute l’affaire. Or on a oublié une chose : consulter plus largement les musulmans.

Le président pourrait opter pour une solution souple. Grâce à un article glissé dans la future loi d’orientation scolaire, on permettrait aux chefs d’établissement scolaire qui le jugeraient nécessaires de durcir leur règlement intérieur pour interdire tout signe religieux et politique visible. La même démarche pourrait être adoptée pour l’hôpital ou l’administration. Ainsi le législateur n’imposerait rien tout en fournissant à ceux qui en ont besoin la base légale qui leur fait défaut aujourd’hui. 

Nel Obs 20/11/03

La dernière audience publique de la commission Stasi

Le Monde 16/11/03

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Laïcité, libertés de conscience et d'expression, égalité entre les sexes, Gisèle Halimi a appelé à placer ces trois principes constitutionnels au même niveau, Fustigeant le "malencontreux avis" du Conseil d'Etat, en 1989, sur le foulard islamique, [elle] en a appelé à une loi interdisant, à l'école comme à l'université, tous les signes religieux visibles. "Tous sans exception", a-t-elle martelé en qualifiant, de "terriblement misogynes" les "trois monothéismes". Pour Mme Halimi, "la kippa est un signe aussi contraire à la laïcité que le voile, mais le voile crée un apartheid sexuel".

Rappelant l'attachement des juifs de France à la laïcité, le grand rabbin a estimé que "la loi, le règlement seraient des moyens bien médiocres de s'émanciper du problème".

La loi, François Chérèque n'y est guère favorable : "Il y a déjà suffisamment de lois contraignantes inapplicables !" Le Monde 16/11/03

Les Français pour une loi, à 65 %

Ouest-France 16/11/03

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De tous âges et de tous bords, ils disent la même chose : « Ne touchez pas à mon école ».

Les Français, toutes catégories et tous âges confondus, ont la même vision de la ligne jaune à ne pas franchir. Ils sont majoritairement tolérants pour l'expression d'une appartenance religieuse dans la rue : on cohabite, on se côtoie, dans une indifférence majoritaire aux signes religieux ou symboles vestimentaires (61 % d'indifférents et seulement 22 % d'opposants). Mais deux Français sur trois disent clairement aux militants du religieux : ne touchez pas à mon école ni à mon administration. L'école en particulier fait figure de « sanctuaire laïc » aux yeux des retraités : ils sont trois sur quatre à vouloir protéger leurs petits-enfants du débat religieux au sein de l'école publique. Chez les catholiques, les protestants et les « sans religion », deux personnes sur trois jugent « nécessaire une loi interdisant le port visible de signes d'appartenance religieuse ou politique ». Alors que 56 % des musulmans ne jugent pas nécessaire cette interdiction par voie législative. Si les électeurs de gauche (63 %) sont moins favorables à une loi que ceux de droite (74 %), l'électorat socialiste veut un texte alors que l'extrême-gauche traîne les pieds. En locomotive officieuse d'un projet de loi : une extrême-droite pour qui la défense de la laïcité sert de masque pudique à un racisme latent. Et promue leader de l'opposition : une extrême-gauche qui peaufine son implantation dans les communautés immigrées. Ouest-France 16/11/03

Le FSE dénonce
l'islamophobie

Nel Obs 16/11/03

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La polémique sur le voile masque-t-elle une certaine islamophobie? Président du MRAP (Mouvement contre le racisme et pour l'amitié entre les peuples), Mouloud Aounit a exprimé son "absolue opposition à l'idée d'une loi qui viserait dans les faits à interdire le seul port du foulard", car "le risque est grand de voir demain le repli communautaire être au rendez-vous". "Tout cela révèle si besoin était une certaine  islamophobie. Membre de la Fédération des Tunisiens pour une citoyenneté des deux rives (FTCR), Bahjia Ouezini a aussi vu dans cette polémique un symptôme de la suspicion dont la communauté musulmane serait victime le président de la Ligue des droits de l'homme Michel Tubiana estime également qu'une loi serait une "solution de force" qui risquerait de "renforcer une démarche communautaire" et de "donner du grain à moudre aux intégrismes". Nel Obs 16/11/03 Voir aussi une libre opinion dans Libé 17/11/03 : Le concept d'«islamophobie», lancé par les mollahs iraniens, est désormais appliqué à tout contestataire de l'intégrisme.

M. Perben doute de l'efficacité d'une loi sur le voile

Le Monde 15/11/03

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"Une loi sera peut-être utile, a-t-il déclaré. Mais je sais que la loi n'a pas réponse à tout. Et je sais que la loi a des limites, que l'on rencontre dans son application. La loi peut être inefficace. Aucune loi n'enlèvera la marge d'appréciation des responsables chargés de la mettre en œuvre." Aussi M. Perben a-t-il suggéré aux membres de la commission, que préside le médiateur de la République, Bernard Stasi, un "principe de précaution législative"

S'il considère que "la laïcité républicaine n'est pas la négation du fait religieux", M. Perben a affirmé que "la liberté de l'élève s'arrête là où commencent les exigences du service public de l'éducation", précisant : "Il ne peut y avoir d'atteinte aux activités d'enseignement, au contenu des programmes ni à l'obligation d'assiduité." "Ce n'est plus seulement la laïcité dans l'école qui fait débat, mais la laïcité dans les services publics en général, voire dans toute la société". Il s'est dit préoccupé de "condamner le communautarisme -sans- stigmatiser aucune communauté"

Le Monde 15/11/03

La messe n'est pas dite

L'Humanité 14/11/03

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La messe n'est décidément pas dite quant à l'opportunité de produire une nouvelle loi interdisant les signes religieux et renforçant la laïcité à l'école et dans les services publics. le Parti communiste " s'oppose fermement à tout projet visant à interdire par la loi tout port de signe identitaire à l'école ". Un tel texte, concernant l'école, s'inscrirait, selon lui, dans une logique qui tend à remplacer la logique éducative " par la norme sécuritaire " et n'aurait comme effet que de couper l'école du monde qui l'entoure. Le Parti socialiste s'est, en effet, finalement rangé à l'idée de légiférer contre " le port apparent dans les établissements scolaires publics de tout signe religieux, politique et philosophique ". Le PS, toutefois, prend quelque précaution : dans son deuxième article, la loi considère la sanction, c'est-à-dire l'exclusion, comme l'ultime recours après épuisement de toutes les tentatives de dialogue les Verts se sont contentés de qualifier les positions du PS et de Debré d'" électoralistes ".

L'Humanité 14/11/03

Luc Ferry propose
une circulaire

Nel Obs 14/11/03

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Luc Ferry se prononce contre l'interdiction de signes religieux visibles à l'école et préconise "une circulaire qui rappellerait un certain nombre de règles qui ne sont pas suffisamment dites".
"Exclure tous les signes visibles n'est pas une solution aberrante mais cela n'est pas conforme aux principes généraux du droit et de la tradition républicaine", Il évoque l'hypothèse "dans un premier temps", de "rappeler dans une circulaire un certain nombre de règles qui ne sont pas suffisamment dites par exemple concernant le respect des programmes scolaires".
"Personne n'a le droit, au nom de sa religion, de contester le contenu des programmes: un élève qui refuse de suivre les cours de biologie, d'histoire ou d'éducation physique, peut être exclu de l'établissement"

Nel Obs 14/11/03

Cette affaire du voile est décidément mal partie.

Jean Daniel

Nel Obs 13/11/03

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Aujourd’hui, quelles que soient les différences de motivation des partisans et adversaires de la loi, s’engage une épreuve de force entre deux camps. Et c’est ce qu’il fallait à tout prix éviter. Si l’on maintient la position générale en faveur de la loi, on va se trouver face à un front islamo-chrétien. Si l’on recule, ce sont les islamistes qui auront gagné, et leur prestige augmentera auprès de toutes les Françaises musulmanes. Celles qui veulent garder le voile contre le vœu de la société n’auront plus besoin désormais de se réfugier dans l’argument de la liberté ou de la dignité.

Les évêques ont en effet négligé le fait le plus important dans cette affaire. Il y a surtout opposition entre des Français musulmans respectueux des lois de la République et les autres, qui entendent, avec une parfaite cohérence démocratique, peser sur ces lois.

Reculer, ce serait donc décourager ceux qui voient dans la laïcité française une chance de réformer l’islam. Nel Obs 13/11/03

Les députés pour une loi contre les signes religieux à l'école

Le Monde 13/11/03

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La mission d'information parlementaire sur les signes religieux à l'école s'est prononcée, mercredi 12 novembre, à "l'unanimité" de ses membres pour une "disposition législative" interdisant expressément le port visible de tout signe d'appartenance religieuse et politique à "l'école publique" c'est-à-dire "dans les collèges et les lycées". [Ils] ont en outre exclu du champ d'application de cette interdiction les établissements privés sous contrat avec l'Etat "en raison de leur caractère propre dont le principe a été reconnu par le Conseil constitutionnel". Un "consensus s'est dégagé pour constater qu'il n'y avait pas lieu d'appliquer cette disposition aux départements d'Alsace-Moselle compte tenu de leur régime spécifique".

La prohibition recommandée par les députés est extrêmement large : elle vise non seulement les signes "ostentatoires" mais le "port visible", autrement dit : "tout signe que l'œil peut voir". Seraient concernés aussi les "signes politiques".

Parmi les adversaires d'une réforme législative interdisant le port des signes religieux dans les écoles, Nicolas Sarkozy, François Bayrou et Luc Ferry ont été les plus explicites. Le ministre de l'intérieur et le président de l'UDF jugent que le problème peut être réglé "par voie réglementaire ou par circulaire". Jean-Pierre Raffarin a, plus récemment, affiché son scepticisme. Le Monde 13/11/03   Conclusions de la mission Debré (téléchargeable format *.pdf)

Voir aussi : Le Nel Obs 13/11/03 et Libé 13/11/03 :

Pour Yves Contassot, porte-parole des Verts, les propositions «électoralistes» du Parti socialiste et de la mission Debré sont «des lois d'opportunité qui ne règlent rien». Le parti écologiste doit se prononcer officiellement dans dix jours. Quant au Parti communiste français, il «persiste à poser cette question : une loi pour quoi faire ?»

Le leader socialiste soumettra un texte au bureau national du PS.
Hollande favorable à une loi sur le voile à l'école

Libé 11/11/03

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François Hollande a tranché. Il est favorable à une loi sur l'interdiction du voile à l'école. Il va présenter  [au bureau national du PS] une proposition de loi en ce sens. Courte, elle comportera deux articles. Le premier sur l'interdiction des signes religieux, politiques et philosophiques dans l'enceinte scolaire ; le second insiste sur la nécessité de dialogue et de médiation pour que les exclusions d'élèves voilées restent «un dernier recours».

Si il a décidé d'accélérer le mouvement, c'est pour répondre «à une demande des praticiens de la laïcité», notamment les enseignants. «Il n'était pas question d'attendre que Jacques Chirac se prononce sur le sujet. Et de donner l'impression d'être à la remorque de la droite» Certains au PS, comme Malek Boutih, ou Jean Glavany restent réservés. Libé 11/11/03

Le bureau national du Parti socialiste s'est prononcé en faveur de la proposition de loi, présentée par François Hollande. Un vote à l'unanimité moins trois abstentions.

«Tout le monde se rallie, mais en pensant que c'est une connerie», a déclaré en sortant un membre du bureau national. Libé 13/11/03

La mission parlementaire présidée par Jean-Louis Debré prône la neutralité des élèves jusque dans les établissements catholiques sous contrat avec l'Etat
Vers l'interdiction des signes religieux dans les écoles privées ?

 

Le Figaro 10/11/03

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Constatant le grand nombre d'élèves affichant leurs convictions religieuses dans le privé, les parlementaires ont décidé d'englober dans leur réflexion l'école libre, qui scolarise 20% des jeunes. «Ces établissements sont subventionnés pour remplir une mission de service public. Ils doivent respecter les valeurs de la République dont la laïcité», estime Robert Pandraud, député UMP.

Les députés ont évalué les risques de rallumer la guerre scolaire. Ils ont ainsi collectivement renoncé à demander l'application de cette mesure en Alsace et en Moselle, les départements sous concordat.

«Face à la montée du communautarisme et du prosélytisme musulman, l'Église devrait se rendre compte que la laïcité la protège», confiait vendredi le député UMP Jacques Myard. Le Figaro 10/11/03

Les évêques et le voile

Georges Suffert

 Le Figaro 10/11/03

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Personne, ou presque, ne prêche «la lutte contre l'infâme» ; de son côté, une écrasante majorité de croyants respecte les règles de la laïcité. Mais qui peut prévoir les effets d'une loi qui risque de troubler le comportement de certains enseignants, l'épiscopat estime que le problème du voile pourrait être réglé au cas par cas.

Pour le moment, les établissements catholiques se sont fort bien arrangés avec l'affaire du voile. Les jeunes filles qui souhaitent porter cette tenue traditionnelle peuvent le faire. les évêques ne souhaitent pas être confrontés à un problème que, pour le moment, ils ont réglé avec prudence.

Le vote d'une loi nouvelle risque d'entraîner une opposition discrète ou publique du nouveau Conseil des musulmans de France. La masse des Français musulmans paraît pour le moment assez indifférente à ces escarmouches de préau d'école. Encore faudrait-il éviter de leur fournir des raisons pour croire qu'ils sont collectivement agressés.  Le Figaro 10/11/03

L'évêque de Saint-Denis Olivier de Berranger :

Une loi sur le voile est disproportionnée

Le Parisien 10/11/03

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Faut-il légiférer pour 1 % de la population française, au risque de rallumer la guerre scolaire ? Cela me paraît disproportionné, même si je comprends les préoccupations des enseignants. Le risque d'une loi interdisant le foulard, c'est de faire des jeunes filles qu'on exclura de l'école républicaine des « martyres » Mieux vaut continuer à appliquer la décision du Conseil d'Etat qui, dès 1989, a estimé que le port du voile ne constitue pas une cause de renvoi sauf s'il y a prosélytisme ou demande de dispense de certains cours.

Plus que la laïcité, c'est la solidarité, la volonté de vivre ensemble qui est en danger aujourd'hui en France. Le Parisien 10/11/03 Voir aussi un point de vue de l'Archevêque de Marseille Ouest-France 10/11/03

Loi ou dialogue ?

Le président de la LICRA et P. Mauroy devant la commission Stasi

Le Monde 09-10/11/03

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Ne dites pas "une loi pour interdire le foulard à l'école", dites "un signe fort destiné à protéger la laïcité". "La commission n'a pas encore fait sa religion", a appuyé Bernard Stasi, vendredi 7 novembre, agacé par les rumeurs…

"Arrêtons l'hypocrisie, nous ne serions pas là s'il n'y avait pas des filles voilées à l'école", a relevé Patrick Gaubert, président de la Licra. "Qui croira qu'une loi peut se substituer au dialogue ? a-t-il lancé. Il a plaidé pour un simple "dispositif réglementaire". Car, il en est persuadé, pour assurer "le vivre ensemble à la française, il n'est point besoin de loi" mais de courage politique.

La loi, Pierre Mauroy est plus que pour. Mais, prévient-il, cette loi doit éviter d'apparaître "comme arbitraire, même au nom d'une majorité". "Elle ne doit pas non plus être rodomontade (...) finalement impuissante", a-t-il poursuivi. Pourtant, si "la marge est étroite, la loi s'impose lorsque la laïcité est bafouée, la République défigurée."

D'une allusion furtive, il a remarqué que ceux qui hurlaient [en 1984] contre le "grand service public laïque et unifié" déclarent aujourd'hui la guerre au "communautarisme". Interrogé sur l'ouverture de créneaux réservés aux femmes dans une piscine lilloise, l'ancien maire a reconnu la contradiction entre "des principes foncièrement laïques" et la volonté de gagner la confiance des musulmans. Le Monde 09-10/11/03

Voile islamique : Le sondage qui éclaire

Le Figaro Magazine 08/11/03

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55% des personnes interrogées par l'institut CSA réclament une loi pour interdire à l'école le port de tout insigne religieux apparent : voile islamique, croix ou kippa. Les plus déterminés sont les sympathisants de droite (62%), suivis des sympathisants du Front national (58%) avant les sympathisants de gauche (53%). L'âge : c'est dans la tranche des «25-34 ans» que les sondés (6 sur 10) expriment le plus leur souhait d'une loi, juste avant les «65 ans et plus» (59%). Mais c'est dans la tranche des «18-24 ans» que le refus de toute législation apparaît le plus fort, avec 51%.

42% [des personnes interrogées] estiment qu'il faut «avant de décider d'une exclusion, tenter de trouver un compromis avec les élèves concernés». [Pour] 35%, il ne faut «en aucun cas» accepter le port du voile islamique et prendre la décision d'exclure les élèves qui le portent systématiquement. Le Figaro Magazine 08/11/03

Sous le foulard, Marianne...

Jean-Christophe CAMBADELIS  

Le Figaro 01/11/03

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250 cas répertoriés officiellement de port de voile islamique à l'école, en 2002. Auxquels il faut ajouter un nombre beaucoup plus important encore de cas non répertoriés par la volonté même de chefs d'établissement, qui ne veulent surtout pas de médiatisation – à juste raison – et s'emploient avec beaucoup de conviction pédagogique à régler par le dialogue ces situations, dans le secret de leur bureau. Et souvent, reconnaissons-le, avec succès. Il y a donc de l'instrumentalisation dans l'air. Évidemment, chacun s'empara de la question, l'UOIF et son leader Tariq Ramadan déclarèrent que la République devait se plier aux «us et coutumes» de l'islam. Et les ultralaïques s'engagèrent dans une chasse aux voiles qui finit par faire froid dans le dos.

Les enseignants d'Aubervilliers n'ont pas demandé de loi. Ils ont agi suivant le droit et leur éthique.

Que faut-il donc dire et faire ? Ne pas adopter une position défensive de la laïcité et de la République. Il faut aussi refuser la stigmatisation de l'islam. Aussi convient-il de ne pas se focaliser sur le seul foulard, pour proscrire de l'école et de l'administration tout signe ostentatoire qu'il soit philosophique politique ou religieux. Le Figaro 01/11/03

Voile : les leçons d'une querelle

Claude Imbert

Le Point 30/10/03

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Ce voile, ce fichu - ce fichu voile - aura, chez nous du moins, révélé le désarroi d'une nation qui bouge en ses tréfonds et ne sait au juste quelle forme sera bientôt la sienne. N'imputons pas à nos seuls guides - politiques ou intellectuels - cette incertitude. S'ils sont là-dessus si hésitants, c'est qu'il y a de quoi hésiter ; s'ils sont divisés, c'est que toute la nation l'est comme eux, et parfois chaque Français lui-même

D'un côté une vision différentialiste, « droit-de-l'hommiste » de la société : à les entendre, une loi d'interdiction attiserait l'intransigeance de l'islamisme. Et de l'autre, une vision intégrationniste, dite laïque et républicaine, [cette] vision hérite d'un idéal laïque forgé dans une longue contestation du système chrétien.

Le glissement insensible de la société française vers un droit à la différence qui va jusqu'au communautarisme devrait tout naturellement nous conduire à tolérer, dans l'école publique, le port du voile. Si pourtant le bon sens politique semble résister à cette pente, [c’est pour la raison première que] la France ne supporterait pas une pratique communautariste sans mettre en danger son unité et sa paix civile. Le Point 30/10/03

SOS racisme
Les pieds dans le voile

 Le Point 30/10/03

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Le voile crée des remous à SOS Racisme. Francis Terquem, cofondateur et avocat du mouvement antiraciste, réclame un « débat public » sur ce thème au sein de l'association.

Francis Terquem fustige la position du mouvement, qui, contrairement à deux autres organisations antiracistes, dont le MRAP, a approuvé la décision arrêtée par le conseil de discipline du lycée Henri-Wallon d'Aubervilliers… « J'observe que, dans bien des établissements où sont prononcées de telles sanctions, les élèves, les jeunes, se solidarisent avec les exclues. Or ces lycéens sont la fontaine de jouvence de SOS qu'il serait imprudent d'assécher par des prises de position incomprises, radicales, en tout cas vécues comme telles. » Dominique Sopo, [Président de SOS Racisme, estime] que ces affaires de voile sont des « tentatives de tester la République » par les mouvements radicaux et intégristes de l'islam. Cependant « on ne répond pas au communautarisme par une loi sur le voile ». Le Point 30/10/03

Laïcité, liberté, égalité

Alain Juppé

Le Monde 30/10/03

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La plus récente des religions en France mérite d'être traitée avec la même considération que les autres. Mais le respect des croyances de chacun interdit de faire de l'espace public, et en particulier de l'école, un lieu de recrutement religieux où les dynamiques de groupe, si fréquentes dans les âges de l'apprentissage et de la maturation, peuvent conduire les jeunes esprits à adopter par conformisme des comportements qui n'ont rien à voir avec l'expression d'une foi librement choisie. Voir aussi l'audition d'A. Juppé par la commission Stasi : "La force d'une loi sera nécessaire"

Le port du voile est particulièrement préoccupant parce qu'il renvoie à un militantisme politico-religieux qui va bien au-delà de l'expression individuelle de la piété ou de la pudeur religieuse. L'instrumentalisation de jeunes élèves comme porte-drapeau d'une cause politico-religieuse, l'utilisation des locaux de l'école au service d'un projet d'essence communautariste qui vise à la différenciation ostentatoire des musulmans - et, en leur sein, des bons et des mauvais croyants - relève de l'atteinte à la liberté de conviction.

La brutalité machiste qui, ici et là, impose aux filles je ne sais quel comportement pour mériter le respect et la sûreté est contraire à tous les principes de notre ordre social.

On ne peut plus dire aux proviseurs de se débrouiller. La République elle-même doit garantir sa laïcité avec clarté et avec vigueur. Le Monde 30/10/03 Voir aussi l'audition d'A. Juppé par la commission Stasi : "La force d'une loi sera nécessaire" Le Figaro 29/10/03

Le voile et la circoncision

Michel Orcel, diplômé de l'Institut d'études politiques de Paris, diplômé d'islamologie, docteur ès lettres, écrivain

Le Monde 28/10/03

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Si l'on commence à l'interdire pour de prétendues raisons de prosélytisme religieux (en quoi un foulard ou quelque autre signe religieux aurait-il le  pouvoir de "convaincre"?), il faudra interdire non seulement les quelques kippas qui circulent (rares en effet) et les millions de croix chrétiennes arborées (souvent par pure coquetterie).

Depuis l'émancipation des juifs sous la Révolution française, personne n'a jamais songé à contester aux adeptes du judaïsme leur pratique de la circoncision. L'arrivée massive en France d'immigrés musulmans, qui se livrent à la même pratique, n'a rien changé à cette situation. Une partie non négligeable de l'actuelle population française se  trouve ainsi, de facto, dans l'illégalité (cf article  16-3 du code civil : Il ne peut être porté atteinte à l'intégrité du corps humain qu'en cas de nécessité médicale). En s'attaquant de front à la question du port du voile, la République française, laïque et démocratique, se voile les yeux sur d'autres pratiques, invisibles et non prosélytes, sans doute, mais mutilantes, radicalement illégales et pénalement condamnables... Le Monde 28/10/03

Une loi pour refuser le mépris

Philippe Douste-Blazy

Le Figaro 25/10/03

Extraits

L'application de [la jurisprudence du Conseil d’état] s'avère délicate. Elle ne permet assurément pas aux chefs d'établissement d'interdire de manière générale et absolue le port de tout signe d'appartenance religieuse. Mais ce qu'elle admet est obscur. Où commence le prosélytisme et comment interpréter la signification du port du voile sans sonder les consciences, ce que le principe de laïcité prohibe? Peut-on traiter de la même manière foulard islamique et kippa juive, voire croix protestante ou catholique? Si les principes sont clairs, leur application concrète demeure confuse et présente, de ce fait, un double danger: celui d'une inhibition des chefs d'établissement, redoutant de prendre leurs responsabilités face à l'obscurité de la règle et à la sensibilité du sujet; celui d'accusations de parti pris et d'intolérance face à une mise en œuvre toujours sujette à controverse. Soutenir que le principe de laïcité doit être adapté aux circonstances, c'est accepter le risque d'un certain relativisme, et peut-être en définitive celui d'une certaine dose de communautarisme. Mais exiger une réponse générale et de principe, c'est repousser l'intolérance religieuse vers des écoles confessionnelles, au risque évident cette fois du communautarisme.

Il faut donner aux Français une règle générale, d'application aisée, qui écarte le soupçon d'arbitraire. Il faut que la loi interdise, à l'école, le port de tout signe d'appartenance religieuse, philosophique ou politique.

Le Figaro 25/10/03

La FSU et FO contre une loi spécifique sur les signes religieux

AFP-Voilà 24/10/03

Extraits

La FSU et la confédération Force ouvrière (FO), ont mis l'économie marchande au banc des accusés devant la commission [Stasi]. Les deux syndicats se sont l'un et l'autres prononcés contre une loi spécifique sur les signes religieux à l'école : la FSU a déclaré vouloir privilégier le dialogue et la démarche éducative avec les élèves, tandis que, selon FO, la loi de 1905 de séparation des Eglises et de l'Etat permet de répondre au problème pour peu que l'Etat sache faire preuve de fermeté. Gérard Aschiéri a aussi souligné que "l'école doit être à l'abri des marchands autant que des religions". [Pour] Marie-Suzie Pungier, FO, "L'économie de marché a privilégié l'esprit marchand contre le libre esprit". AFP-Voilà 24/10/03 Voir aussi Le Monde 28/10/03

Non aux signes religieux à l'école !

Georges Sarre

Le Figaro 24/10/03

Extraits

Les attaques contre la laïcité se multiplient, dans une société qui paraît avoir perdu le sens de tout projet collectif. Il faut une loi interdisant l'ensemble des signes religieux à l'École. Cette loi ne serait pas, comme le disent par commodité ses détracteurs, une loi qui exclut. Elle fixerait un interdit, ce qui fort différent. Ceux qui s'abritent derrière le concept de «laïcité ouverte» pour cacher leur renoncement sont non seulement des pleutres, mais des orfèvres de l'ineptie : la laïcité est précisément ouverture, elle est par essence libératrice. Dans une société moderne, et singulièrement dans la République française, chacun est avant tout, dans la sphère publique, un citoyen attaché, par un lien individuel, direct, émancipateur, à la société politique. Ceux qui ne sont pas prêts, aujourd'hui, à défendre sans complaisance le principe de laïcité, sont donc des réactionnaires, acteurs ou complices. Le Figaro 24/10/03

"Il faut préciser et compléter la loi de 1905"

Michel Charasse (PS)

AFP-Voilà 23/10/03

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Michel Charasse, sénateur socialiste du Puy-de-Dôme, a affirmé qu'il fallait "préciser et compléter la loi de 1905". Alors que "jusqu'à il y a une vingtaine d'années, les choses étaient très claires", avec l'application de la loi de 1905 de séparation de l'église et de l'Etat, a déclaré M. Charasse, "il y a eu des déviations" depuis. "Nous avons commis l'erreur en 1989 de nous défausser lâchement sur le Conseil d'Etat pour lui demander “merdeusement” de rendre un avis". [Cet] avis "mi-chèvre, mi-chou" place les établissements scolaires dans des situations impossibles", a reconnu M. Charasse. Mais, pour le sénateur, "il faut inclure tout signe religieux, voile, kipa et croix". AFP-Voilà 23/10/03

« L'intégrisme se nourrit des interdits. »

Jacques Barrot

 Le Point 23/10/03

Extraits

La mise en oeuvre d'une loi ne sera pas facile. Les interdits rassurent mais ne permettent pas de résoudre tous les problèmes. L'intégrisme se nourrit des interdits. Pour éviter que certains n'opposent leur conscience à la loi, il faut convaincre avant de contraindre, Une loi ne sera justifiée qu'en cas d'ampleur excessive du phénomène. Le Point 23/10/03

Alma, Lila, Tariq, demandez le scandale

Daniel SCHNEIDERMANN

Libé 24/10/03

Extraits

Sans le père, sans doute l'affaire se serait-elle négociée dans le bureau du proviseur pour un demi-quart d'oreille et une touffe de cheveux dépassant du foulard. Sans le père, on imagine les grommellements dans les rédactions. Encore une affaire de filles voilées ? Ras le bol ! Sans le père, sans doute les médias se seraient-ils mieux souvenus de la statistique en chute libre : 300 incidents liés au port du voile recensés dans l'Education nationale en 1994, 150 aujourd'hui (chiffres indiqués par le Mrap). Que dit exactement cette anomalie sur les progrès souterrains de la religiosité ? Sans doute pas grand-chose. Des beurettes juives, autant dire des curiosités de foire, la belle affaire ! Libé 24/10/03

Laïcité  : une loi pour la cohésion

Gisèle Halimi avocate, écrivaine, présidente de Choisir - La Cause des femmes.

 

Le Monde 24/10/03

 

Extraits

Sont en cause le principe de la laïcité de l'Etat (art. 2 de la Constitution), qui constitue à la fois un principe politique et un mode d'emploi juridique, et son corollaire direct dans l'enseignement public, la liberté de conscience, d'opinion et d'expression (art. 10 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen). L'égalité des sexes (préambules des Constitutions de 1946 et 1958) est un autre principe de même valeur que le précédent. Théoriquement, la laïcité, dont le fondement même est né de la loi de 1905 (séparation de l'Eglise et de l'Etat), garantit aux citoyen(ne)s la neutralité du service public Et assure à tous la liberté de conscience et d'expression. La foi, la pensée, la conscience, justement - domaine du subjectif -, peuvent se dire. Les comportements, les "prescriptions" religieuses, donc les signes et insignes, bref la pratique - domaine de l'objectif -, devraient être interdits. Car ils entreraient en conflit ouvert avec la neutralité laïque

Le voile est un terrible signe d'infériorisation de la femme. Enfermement pour se marquer du sceau infériorisant de la charia (polygamie, répudiation, incapacité civile et minorité à vie...). Infériorisation atavique que le voile aide, dans ses plis, à intérioriser.

Laisser aux choix, opinions, humeurs, phobies des chefs d'établissement l'appréciation du "caractère ostentatoire ou revendicatif" du signe religieux, de l'interprétation d'un "acte de pression, de revendication, de prosélytisme ou de propagande", c'était du même coup instaurer le cas par cas, le jugement à l'aune variable de chaque conseil de discipline. Une loi [doit prescrire] un dialogue obligatoire, des délais de réflexion en préalable à toute décision. Et l'exclusion à défaut de compromis pour que force reste aux principes (humanistes) républicains. Laïcité, égalité et dignité des femmes, liberté d'expression. Le Monde 24/10/03

Une exclusion assumée, mais qui ne doit pas servir à justifier une loi contre le voile à l’école

Anne Lafran, Marc Delval, Pierre-François Grond, Rémi Duloquin, Jean-Pierre Hennuyer, enseignants
à la cité scolaire Henri-Wallon d'Aubervilliers

Libé 22/10/03

Extraits

Nous assumons cette décision [l’exclusion]­ seule voie possible ­ que nous ressentons cependant comme un échec. A ceux qui déclarent que cette décision «est une terrible défaite de la laïcité, une victoire vénéneuse de l'intolérance» (Mouloud Aounit, secrétaire général du Mrap), nous répondons qu'aucun sentiment de victoire ne nous habite, mais plutôt la conviction d'avoir oeuvré à la préservation du service public, laïc d'éducation et au droit de nos élèves à ne pas subir des pressions pour porter le voile.

Nous refusons clairement que les événements d'Aubervilliers (survenus dans le contexte des auditions de la mission Debré et la commission Stasi) soient opportunément utilisés pour élaborer une loi interdisant le voile à l'école. Ce débat traverse largement la société française, en dépassant les clivages idéologiques traditionnels. Pour ce qui nous concerne, nous pensons qu'une telle loi apparaîtrait comme humiliante et discriminatoire envers une partie de nos élèves et aurait pour conséquence de renforcer de manière redoutable les discriminations et donc les communautarismes. Libé 22/10/03

Voile : pour une loi, hélas !

Alain-Gérard Slama

Le Figaro 20/10/03

Extraits

Au départ, on était contre. En présentant une règle libératrice sous forme d'interdit, [la loi] conforte les intolérants dans leur stratégie, qui consiste à se présenter en porte-parole du droit à la différence… Mais la jurisprudence est si incertaine, et les esprits si troublés qu'on voit mal comment résoudre le problème sans passer par un vote solennel du Parlement. Or les tchadors arborés dans les écoles ne consistent nullement en une affirmation de liberté personnelle. Leur intention, expresse ou manipulée, est d'opposer une conception de la société à une autre.

De même que les féministes sont uniquement sensibles, dans la provocation du voile, à la signification qui leur fait outrage, de même les tenants de l'approche psychologique ne veulent retenir, dans le geste des jeunes musulmanes, que l'affirmation d'une démarche identitaire. Dans les deux cas, que ce soit pour blâmer ou pour louer, l'affaire du voile fait l'objet d'un véritable détournement de sens au bénéfice de groupes qui s'abritent derrière la défense des valeurs universelles (les droits de l'homme, la tolérance) pour servir la cause d'une communauté particulière. Il s'agit de substituer à l'ordre de la loi les préjugés de la foi. L'objectif est d'abattre la neutralité de l'Etat laïque, l'égalité de tous devant le droit et le respect de la tolérance de tous envers tous, y compris envers ceux qui ne croient pas.

La loi rendue, hélas, nécessaire par trop d'années d'aveuglement politique s'égarerait si elle interdisait sans distinction le port de tout signe d'appartenance ethnique ou religieuse. Ni la croix, ni la main de fatma, ni l'étoile de David, peu visibles, ni même la kippa, à condition que son porteur accepte de la retirer en classe, ne méritent ce sort.

Le Figaro 20/10/03

 

Raffarin préfère le consensus à la loi sur le voile

AFP-Voilà 17/10/03

Le Monde 18/10/03

Extraits

Jean-Pierre Raffarin a dénoncé le développement d'une "certaine islamophobie" en France et, tout en réaffirmant son opposition résolue au port du voile à l'école, a exprimé sa préférence pour la recherche du consensus :

"Je souhaite qu'un terrain d'entente puisse être trouvé et ce n'est qu'en dernière extrémité que la loi serait alors l'ultime recours", a-t-il déclaré lors d'une visite à la grande mosquée de Paris.

Le gouvernement ne déterminera sa position qu'au vu des conclusions des travaux de la commission Stasi sur la laïcité et de l'Assemblée, attendues en fin d'année, a-t-il dit.

AFP-Voilà 17/10/03

M.  Raffarin a expliqué que "la laïcité respecte les religions et les religions doivent respecter la laïcité", ajoutant qu'"à l'école la République s'impose à la foi".

"En ce sens, je le dis et le redis, les attitudes ostentatoires, le prosélytisme, symbolisé par certains voiles, doit être absolument proscrit de -l'école-, qui représente l'avenir de notre pays",

Le Monde 18/10/03

Voir aussi

Ouest-France 18/10/03

Le Parisien 18/10/03

Site du 1er ministre

Voile: pas d'obstacle européen à une loi

Libé 18/10/03

Extraits

Lors de son audition par la Commission sur la laïcité, présidée par Bernard Stasi, [Jean-Paul Costa, vice-président de la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH)], a affirmé qu'un texte prohibant le port du voile, de la kippa ou de la croix pourrait être jugé conforme aux principes du droit européen ; il a affirmé que l'arsenal actuel ­ reposant pour l'essentiel sur un avis du Conseil d'Etat de 1989 ­ est à la limite de la légalité. Pour lui, «l'article 9 de [la Convention européenne des droits de l'homme] défend la liberté de religion, mais en fait un droit non absolu. Il peut y avoir une ingérence des Etats à une triple condition». L'une d'elles étant que cette ingérence soit prévue par une loi, ce qui n'est pas le cas aujourd'hui. «On peut se poser la question de savoir si le système français qui décentralise à l'extrême la décision d'interdiction, en renvoyant aux chefs d'établissement la responsabilité de décider, est compatible avec la Convention, a souligné le magistrat Libé 18/10/03 Voir aussi Le Monde 28/10/03

Voile : loi ou pas loi ?

Guy Carcassonne

Le Point 16/10/03 

Extraits

Ne pas légiférer, c'est continuer à s'appuyer sur l'avis rendu par le Conseil d'Etat le 27 novembre 1989. Celui-ci guide le comportement des autorités scolaires. Il présente le grand avantage de la souplesse, les établissements n'étant nullement contraints d'agir, mais ayant la possibilité de le faire, avec un fondement juridique connu, lorsqu'ils estiment que l'ostentation dépasse les limites tolérables.

Légiférer, c'est énoncer un interdit explicite, clarificateur, donc a priori rassurant, mais dont on ne peut feindre d'ignorer qu'il déplace le problème plus qu'il ne le règle. A moins d'imaginer qu'il soit appliqué avec rigueur et brutalité il donnerait aux enseignants un instrument puissant, mais il ne leur livrerait pas en même temps le mode d'emploi pour qu'il soit utilisé avec le tact nécessaire.

Est-ce à dire qu'une loi serait vaine parce qu'elle ne suffirait pas à tout régler ? Certes non. Le droit est coutumier du décalage entre la norme et son exécution. Ce n'est pas une raison suffisante pour renoncer à fixer une règle claire. Il faut seulement être conscient que, enseignants, parents d'élèves, pouvoirs publics, nul, hélas, n'en serait quitte à si bon compte. Le Point 16/10/03 

Voile au lycée  : non à l'intolérance !

Jean-Fabien Spitz professeur de philosophie politique à l'université Paris-I.

Le Monde 17/10/03

Extraits

Tant qu'un comportement n'est pas attentatoire aux intérêts civils des tiers, il ne peut faire l'objet d'une interdiction, quel qu'en soit le motif : s'il est permis de se couvrir entièrement le visage parce que l'on est atteint d'une maladie de peau (par exemple) on doit aussi pouvoir le faire pour tout autre motif, y compris religieux. Dans certains cas, il doit même autoriser que les intérêts civils d'autrui soient lésés : ainsi la manifestation sur la voie publique entre en contradiction avec l'intérêt civil de ceux qui veulent circuler librement, mais le droit de manifestation l'emporte sur cet intérêt.

Le port d'un signe manifeste d'appartenance religieuse, dans le cas français, constitue-t-il une atteinte aux droits civils des autres élèves et des professeurs ? Ce pourrait être le cas si le port du voile devenait un comportement majoritaire dans certains établissements et s'il constituait une pression forte sur les élèves qui refusent de l'adopter. Dans ce cas, l'interdiction serait justifiée pour cette raison (et non pas en raison de son caractère religieux). Porter un voile ne peut être un motif valable d'exclusion, mais il n'en va évidemment pas de même du refus d'une fille d'être assise en classe à côté d'un garçon, de participer aux activités mixtes à la piscine, etc. Le Monde 17/10/03

Une honte pour l'école laïque Daniel et Gabriel Cohn-Bendit

Le Monde 17/10/03

Extraits

Athées convaincus, nous n'avons aucune sympathie pour l'obligation faite aux jeunes filles musulmanes de porter le voile, pas plus que, dans la religion juive, celle faite aux femmes mariées de s'en couvrir la tête. Mais, libéraux libertaires tout aussi convaincus, nous ne pouvons accepter de lutter contre l'autoritarisme intégriste par l'autoritarisme sectaire qui vise à interdire le port du voile dans les écoles publiques Pour nous, l'école laïque, tolérante et ouverte, se doit d'accepter tous les enfants avec ou sans voile, avec ou sans kippa, car c'est à l'école d'être laïque et non aux enfants. Notre confiance dans une école du respect est telle que nous sommes sûrs que tous les jeunes en sortiraient profondément transformés. Ceux qui veulent exclure n'ont pas confiance en cette école et ses capacités. Le Monde 17/10/03

Voile  : nos raisons

 

Philippe Darriulat professeur d'histoire-géographie au lycée Henri-Wallon d'Aubervilliers, ancien président de l'UNEF

 

Le Monde 15/10/03

 

Extraits

Dans les locaux d'une école publique, doit-on appliquer des règles de vie communes à l'ensemble des personnes qui y travaillent ou peut-on accepter que chacun adopte des comportements dictés par ses convictions personnelles et encouragés par des groupements extérieurs ? [Ce principe,] nous en sommes tous convaincus, fait la force de notre système éducatif.

Le voile noir et recouvrant, tel que voulaient le porter certaines élèves, ne correspond à aucun précepte religieux ni même à une tradition familiale. Il s'agit d'un habit porté dans la péninsule Arabique, alors que l'immense majorité de nos élèves musulmans sont africains. Porter une telle tenue relevait donc bien de l'acte militant.

Il s'agit, en fait, de situations qui restent extrêmement marginales et ne concernent qu'une infime minorité d'élèves. Parler "d'offensive islamiste", de "crise générale de l'éducation", voire "d'invasion", c'est totalement méconnaître la réalité et prendre le risque d'encourager des réflexes agressifs, voire purement racistes, contre une religion qui, comme toutes les autres, doit trouver sa place dans notre République.

Nous ne croyons pas - c'est du moins ma conviction - que les événements d'Aubervilliers puissent servir de prétexte à l'élaboration d'une loi interdisant le voile à l'école. Pas parce que le sujet serait en soi tabou ; mais parce qu'une telle loi, dans un tel contexte, quelles que soient les précautions prises, ne pourrait être vécue que comme une agression contre la religion de plusieurs millions de citoyens français. Et, en retour, encourager les réflexes communautaires. Le Monde 15/10/03

Après la sanction prise contre deux lycéennes d'Aubervilliers
Voile islamique : la loi au-dessus de la foi

MEZRI HADDAD Philosophe et essayiste tunisien.

 

Le Figaro 14/10/03

Extraits

Que dit précisément l'islam sur la prétendue obligation de porter le voile ? Rien de plus que ce que n'a prescrit le judaïsme antique ou le christianisme primitif. C'est, en effet, dans la première épître aux Corinthiens que Paul écrit : «Toute femme qui prie ou prophétise, le chef non voilé, fait honte à son chef (Dieu) ; c'est exactement comme si elle était une femme rasée. Si donc une femme ne se voile pas, qu'elle se tonde aussi ! Mais s'il est honteux pour une femme d'être tondue ou rasée, qu'elle se voile !»

«Prophète, dis à tes épouses, à tes filles, aux femmes des croyants de revêtir leurs mantes : sûr moyen d'être reconnues (pour des dames) et d'échapper à toute offense» (sourate XXXIII, 59). Comme l'indique l'illustre islamologue Jacques Berque, à l'origine, «le port du voile distingue la femme libre des femmes de condition inférieure».

Étant donné que le port du voile procède beaucoup plus d'une recommandation islamique circonstancielle que d'une obligation coranique immuable, attendu que le port du voile relève soit du prosélytisme islamiste, soit de l'exhibitionnisme identitaire, le législateur français doit l'interdire à l'école qui n'est pas un endroit de culte mais un lieu de culture où la loi doit être au-dessus de la foi. Le Figaro 14/10/03

Ces musulmans de France hostiles au port du foulard à l'école

Le Monde 14/10/03

Extraits

Selon un sondage IFOP-Le Monde de septembre 2001, seuls 36 % des musulmans se disent "croyants et pratiquants", 42 % s'affirmant simplement "croyants", 16 % "d'origine musulmane" et 5 % "sans religion". La même enquête indique que 79 % des musulmans ne fréquentent pas la mosquée.

"Conseil français des musulmans laïques" créé par Amo Ferhati, compagnon et conseiller de la ministre Tokia Saïfi, "Conseil des démocrates musulmans de France" d'Abderrahmane Dahmane, proche de l'UMP, "Convention laïque pour l'égalité des droits" de l'industriel Yazid Sabeg, "Mouvement des musulmans laïques de France" animé par d'anciens du mouvement beur... La nébuleuse des "laïques" s'est organisée autour de personnalités, d'appels et d'apparitions médiatiques. Qu'ils se réfèrent explicitement à l'islam ou aux valeurs de la République, les opposants au foulard islamique se débattent pour sortir d'un piège : s'ils rejettent le foulard au nom d'un "islam laïque", les religieux leur demandent de quoi ils se mêlent. S'ils brandissent la bannière de la laïcité pour refuser d'afficher la nature de leur relation intime avec la foi et osent néanmoins dire "nous", les voilà accusés de communautarisme…

Figure du mouvement beur et ancienne députée européenne, Djida Tazdaït est hostile à l'idée d'une loi prohibant le foulard, qui "jetterait de l'huile sur le feu et créerait des martyrs". Hostile lui aussi à toute nouvelle législation Yazid Sabeg, initiateur de la Convention laïque pour l'égalité, attend de Jacques Chirac qu'il "dise solennellement ce que la République accepte et refuse". Le Monde 14/10/03

L'UOIF, principale organisation musulmane, défend le port du voile mais souhaite une loi l'interdisant à l'école

Le Monde 14/10/03

Extraits

Les repères se brouillent, les positions sont à fronts renversés sur le foulard. Nicolas Sarkozy s'est prononcé contre une loi interdisant les signes religieux à l'école. Au même moment, les dirigeants de l'Union des organisations islamiques de France (UOIF), qui mènent depuis 1989 la lutte pour le port du foulard à l'école, avouent en privé qu'ils sont favorables à une loi d'interdiction. Les théologiens musulmans pourraient en effet évoquer "l'état de nécessité" (darourat), un principe constant du droit musulman, qui impose aux fidèles de se soumettre aux lois civiles, quand elles contreviennent à des prescriptions religieuses. Le Monde 14/10/03 Voir aussi Le Point 17/10/03

Il faut réintégrer les deux lycéennes d'Aubervilliers exclues pour port du voile.
Ne pas émanciper les filles de force

Irène Jami, professeure d'histoire dans le secondaire ;  Anne-Sophie Perriaux, maître de conférences Rouen ; Yves Sintomer, professeur de sciences politiques à Paris-VIII ; Gilbert Wasserman, rédacteur en chef de la revue «Mouvements».

Libé 01/10/03

Extraits

On prend de grands risques à imposer aux autres un comportement en matière de moeurs, au nom de leur propre bien.

La liberté religieuse constitue un acquis fondamental des sociétés occidentales. Elle implique la possibilité de manifester publiquement sa foi, y compris dans les lieux publics. Il est vrai qu'un droit peut être légitimement limité par d'autres principes. En l'occurrence, la laïcité imposerait une interdiction stricte du foulard. L'argument ne tient pas : la laïcité doit s'interpréter aujourd'hui comme une neutralité de l'Etat à l'égard des diverses religions, et non comme une morale se posant en rivalité avec elles.

Le foulard n'est-il pas dans certains pays le signe d'un ordre patriarcal et autoritaire ? Ne fait-il pas reposer sur les femmes un impératif de pudeur ? Certains pensent qu'il est toujours symbole d'inégalité. D'autres avancent qu'il ne saurait être réduit en tout temps et en tout lieu à un symbole d'oppression, et que les trajectoires qui amènent une jeune fille à le porter dans un pays occidental sont extrêmement diverses. le maintien de l'ordre public peut justifier une restriction de l'exercice des droits. Mais la gêne de certains enseignants ne saurait, à elle seule, constituer un trouble à l'ordre public : s'il faut favoriser l'émancipation de ces filles, le meilleur moyen consiste à les accueillir à l'école publique. Libé 01/10/03

Bernard Teper, président de l'Union des familles laïques, prône une loi :
«Le voile accroît la pression intégriste»

Libé 30/09/03

Extraits

« Le statu quo législatif favorise une prolifération des signes religieux. Philippe Guittet, le secrétaire général du SNPDEN, le principal syndicat des chefs d'établissement, a annoncé qu'il soutenait notre demande. Il y a quatorze ans, quand la première affaire de voile a éclaté, il défendait la position inverse. Le port du foulard vient non pas de l'islam mais de l'islamisme. Une minorité d'islamistes entrave la volonté des personnes d'origine maghrébine de s'intégrer dans la société française.

Lorsqu'on a 12 ou 13 ans, et même 14 ou 15, et qu'on brave les règles en portant le foulard, on est forcément sous influence.

Tout le problème vient de l'article 10 de la loi d'orientation sur l'éducation de Jospin de 1989. Il prévoit que «les élèves disposent, dans le respect du pluralisme et du principe de neutralité, de la liberté d'information et de la liberté d'expression».

On focalise sur les jeunes filles voilées mais on oublie les autres. A partir du moment où on laisse entrer des jeunes filles voilées, les intégristes renforcent leur pression sur celles qui ne portent pas le voile. Si on est ferme, 99,9 % des jeunes filles enlèveront le voile. Le 0,1 % restant ? Tant pis pour elles. » Libé 30/09/03

L'Europe divisée face au port du voile à l'école

Le Monde 25/09/03

Extraits

En Allemagne par exemple, la Cour constitutionnelle a jugé, mercredi, que le port du foulard islamique dans les établissements scolaires était possible. La Cour a ainsi donné gain de cause à une enseignante d'origine afghane qui s'était vu interdire le port du foulard dans une école publique de la région du Bade-Wurtemberg (sud-ouest). La haute juridiction a toutefois souligné que les parlements régionaux allemands étaient "libres" de légiférer. En Turquie, pays musulman au régime strictement laïque, le port du foulard est interdit dans les écoles, universités et bâtiments publics. En Belgique, il n'existe pas de législation fédérale réglementant le port du foulard dans les écoles. En revanche, celles-ci sont libres d'édicter leurs propres règlements internes En Grande-Bretagne, chaque chef d'établissement est " libre d'adopter son propre règlement intérieur en matière d'uniforme scolaire ".En Espagne, le foulard islamique est peu soumis à débat public. [Le foulard est autorisé au Danemark, en Autriche, en Hongrie et aux Pays-Bas.] Le Monde 25/09/03

Faut-il une loi spéciale pour interdire le port du foulard en France ?
Voile islamique : une tempête artificielle

Par Guy SORMAN

Le Figaro 24/09/03

Extraits

L’interdiction de tout signe religieux à l'école qui puisse être assimilé à du prosélytisme : cette loi est-elle nécessaire ? Très peu d'élèves affichent des symboles religieux dans les écoles ; la majorité préfère les marques de sport américaines. Et qu'est-ce qu'un symbole religieux ? Les chefs d'établissement seront-ils dotés de détecteurs de signes religieux, devront-ils apprendre à repérer les insignes et les affiquets des religions connues, des sectes émergentes et des partis politiques. Ils ont déjà le droit, et ils l'exercent, de prohiber tout signe religieux de nature à perturber les enseignements, en particulier le voile. Le nombre d'écolières voilées est insignifiant ; en revanche un interdit le ferait croître. Le voile et son interdiction souhaitée ne sont en réalité que les symptômes de notre problème arabe ; celui-ci est culturel, économique plus que religieux. Puisse cette tempête artificielle autour du voile conduire le gouvernement à énoncer une politique d'intégration et une seule, fondée sur la connaissance réciproque et pas sur des fantasmes : ni intégrisme laïque ni intégrisme islamique. Le Figaro 24/09/03

Un sentiment de trahison

Par Michèle TRIBALAT

Le Figaro 24/09/03

 

Extraits

Les lois de 1901 et 1905 étaient ouvertement anticléricales. Celle de 1901 avait en ligne de mire les congrégations, la loi de 1905 visait ni plus ni moins l'éclatement de la structure hiérarchique de l'Eglise. Le retrait de l'Eglise des affaires civiles a été obtenu au prix de grandes douleurs. L'école, qui était son affaire devenue laïque, s'est construite contre elle. Le décret-loi de 1937 interdit toujours toute proclamation d'appartenance politique ou religieuse ainsi que toute forme de prosélytisme dans les établissements scolaires.

Que disait M. Kessler, commissaire du gouvernement dans la première affaire Kherouaa en 1992 ? « L'enseignement est laïc non parce qu'il interdit l'expression des différentes fois mais au contraire parce qu'il les tolère toutes. Ce renversement de perspective qui fait de la liberté un principe et de l'interdit l'exception nous paraît également particulièrement important ».

La Cour européenne ne «garantit pas en toutes circonstances le droit de se comporter dans le domaine public de la manière que dicte [sa] conviction» (1).

La jurisprudence du Conseil d'Etat est faillible, Son enflure se nourrit justement du vide politique. Or la laïcité, son sens, son évolution sont des questions éminemment politiques. Si les musulmans sont particulièrement concernés par une telle loi [sur les signes religieux] c'est parce que tous les autres ou presque ont fini par se plier aux règles du jeu. Renoncer aujourd'hui c'est au contraire faire une grande injustice aux Français non-musulmans qui ont accepté de se plier à cette règle commune. Le Figaro 24/09/03

Le voile islamique, verre grossissant des problèmes de laïcité

AFP-Voilà 24/09/03

 

Extraits

La question du voile islamique, très présente durant les auditions publiques de la commission Stasi, y apparaît comme le "verre grossissant" de problèmes plus généraux liés à la mise en oeuvre de la laïcité dans la société, et particulièrement à l'école. “Il ne faudrait pas donner à croire que notre réflexion se limite au voile, et que le but de la mission est de voir comment s'opposer à l'islam", souligne son président Bernard Stasi. Le philosophe Henri Pena-Ruiz, pour sa part, a retenu le statut concordataire de l'Alsace-Moselle, les aumôneries de lycées, l'absence d'écoles publiques dans certaines communes bretonnes, ou les valeurs universelles contenues dans le concept français de laïcité. A titre personnel, il estime également qu'il n'est "pas possible de laisser les chefs d'établissement apprécier localement la conduite à tenir face à une offensive politico-religieuse qui, elle, est menée au niveau national". AFP-Voilà 24/09/03

Maintenir «l’équilibre» de la laïcité

L’archevêque de Paris

La Croix 23/09/03

Extraits

L’archevêque de Paris était auditionné mardi 23 septembre par la «commission Stasi» sur la laïcité. «Sous le mot de laïcité, vous êtes en train de faire une analyse de la conscience française» leur a-t-il dit. En effet, la laïcité, aux yeux du cardinal, c'est «un état de fait stable», une «construction jurisprudentielle» à laquelle on ne saurait toucher aujourd'hui. Ce compromis à la française, qu'il préfère plutôt définir comme une «laïcité apaisée» qu'une laïcité «ouverte», il ne faut pas y toucher : «c'est un compromis historique, loin d'une définition qui tomberait du ciel, et qui pourrait se parer d'une philosophie idéologique», «Nous pensons délibérément que nous ne pouvons pas toucher à ce compromis. Ce serait remettre en cause un équilibre fragile, et qui pourtant constitue le visage de la France aujourd'hui» Quant à l'islam «l'État est aujourd'hui déboussolé, désorienté» juge le cardinal. Et «l'on ne peut appliquer de force le processus bi-séculaire par lequel les autres religions déjà présentes en France sont passées : l'islam, seul, réformera l'islam». Mgr Lustiger s'est déclaré contre une loi sur le port du voile : «il ne faut pas prendre des mesures législatives qui ne peuvent être appliquées». Sur la laïcité, Mgr Lustiger a été rejoint par Jean Kahn, président du Consistoire israélite de France.

Pour Jean-Louis Borloo, ministre de la ville : «Soit on sous-traite à des communautés plus ou moins religieuses la gestion de la paix sociale dans les cités, et on fait un communautarisme à la française. Soit, on se donne les moyens de faire respecter le pacte républicain». La Croix 23/09/03

Commission Stasi et mission Debré sont d'accord
Lent cheminement vers l'interdiction du voile (mais sans loi spécifique)

Le Figaro 22/09/03

Extraits

Ils sont peu ou prou sur la même ligne, les vingt experts de la commission Stasi qui planchent sur l'application de la laïcité dans la société française. Comme les députés de tout bord, qui examinent la question des signes religieux à l'école, au sein de la mission présidée par Jean-Louis Debré. A quelques exceptions près, tous voudraient sanctuariser les salles de classe, mais sans pour autant en passer par une loi spécifique. Ils redoutent de heurter les religieux, notamment les musulmans. Et mettent également en doute la compatibilité d'un texte avec la Constitution ou les accords européens. Pour contourner cet obstacle, beaucoup proposent une charte ou un guide promouvant la laïcité. Un opuscule républicain... qui aurait le goût et la fonction d'une loi, sans en avoir la force coercitive.

«La plupart des enseignants appellent au secours et réclament un texte clair», affirme Eric Raoult, qui fait parti du bureau de la mission sur les signes religieux. Mais «ils peinent à fixer les interdits, sans tomber dans la discrimination», selon le député PS Jean Glavany, qui propose de déplacer la question du «juridique vers le politique, pour refaire de la laïcité un projet positif républicain».

M. Baroin, partisan d'une loi interdisant tous les signes religieux à l'école, et plus largement d'un code de la laïcité qui rassemblerait et toiletterait les textes existants, est rejoint par deux ténors du PS, l'ancien ministre de l'Education nationale, Jack Lang, et Laurent Fabius. Jean-Pierre Brard, PC, propose un texte législatif, prône l'absence de signes religieux dans l'espace public, mais aussi la construction de lieux de culte. «Il faut corriger l'inégalité historique et permettre le financement transparent des mosquées.» Le Figaro 22/09/03

L'écrivaine Chahdortt Djavann à la commission Stasi:
«Le port du voile doit être considéré comme un acte de maltraitance»

Libé 22/09/03

Extraits

L'audition de cette jeune Franco-Iranienne auteure de Bas les voiles ! par la commission sur la laïcité présidée par Bernard Stasi, a provoqué un mini-scandale. Sa demande que «le port du voile par les mineures soit considéré comme un acte de maltraitance physique, psychique, sociale et sexuelle» a suscité de l'agressivité, un rien de condescendance. «Je demande qu'au moins dans les pays démocratiques, le port du voile par les mineures soit sanctionné. Cela relève des droits de l'homme, de la protection des mineurs.» Libé 22/09/03

Elle a bousculé les experts de la commission
Le cri d'alarme de Chahdortt Djavann

Le Figaro 22/09/03

Extraits

Après un réquisitoire contre le voile pour les mineurs, qu'elle assimile, comme l'excision, à de la «maltraitance physique et psychique», la jeune femme a été malmenée par les questions de certains membres de la commission Stasi.

« Le danger est double : d'un côté, le Front national, qui surfe déjà sur ces «musulmans qui ne s'adaptent pas à la République». De l'autre, les islamistes qui ont banalisé l'idée, jusque dans les hautes sphères, que la religion pourrait compenser la perte de repères des enfants d'immigrés, qu'elle pourrait juguler la violence. Or celle-ci ne cesse d'augmenter. Nous sommes avant tout des citoyens, que nous soyons croyants ou non. La République ne doit pas abandonner les enfants de l'immigration aux fondamentalistes. » Le Figaro 22/09/03

Et voilà qu'on reparle de l'uniforme

Libé 18/09/03

Extraits

A une question qui lui était posée sur le sujet, mardi, par l'un des membres de la Commission sur la laïcité, présidée par Bernard Stasi, le ministre délégué à l'Enseignement scolaire, X. Darcos, a répondu que «la question de l'uniforme mériterait d'être posée». Ajoutant : «Mais je préférerais que ce soit vous qui la posiez.» Nicole Geneix, secrétaire générale du SNUipp-FSU (syndicat majoritaire dans le primaire) : «J'ai du mal à penser que c'est une proposition sérieuse. «Cette possibilité existe déjà dans une partie de la France, signale Georges Dupont-Lahitte, président de la Fédérations des conseils de parents d'élèves (FCPE). "Toute personne qui est allée aux Antilles ou en Guyane a pu voir que les écoliers y sont en uniforme.» « Plutôt que d'imposer une tenue, ou de promulguer une loi interdisant le foulard, il faut éduquer l'esprit critique de l'élève, lui expliquer que le port du foulard est un signe de dépendance.» dit Pierre Tournemire, secrétaire général adjoint de la Ligue de l'enseignement. Libé 18/09/03

Ministres : l’un est pour, l’autre contre

Extraits

François Fillon pour une loi interdisant les signes religieux à l'école

"Je suis favorable à une législation interdisant le port ostentatoire de tout signe religieux", a-t-il déclaré. "Les directeurs d'établissement ont besoin d'un cadre clair les épaulant dans leur tâche" ; il a estimé qu'il convenait d'asseoir la laïcité française sur "le postulat de la primauté du citoyen sur toute autre filiation".AFP-Voilà (cité par Le Café pédagogique)

M. Ferry: une loi pour "10 cas de contentieux par an, c'est peut-être lourd"

Le ministre de l'Education nationale a souligné son hostilité à toute "permissivité" sur ce sujet mais a plutôt souhaité que la future loi d'orientation sur l'école comporte un article "affirmant positivement le principe de laïcité", Luc Ferry a estimé à "une centaine par an" les cas de port de voile islamique "où on est obligé de faire une médiation", dont une dizaine faisant l'objet d'un contentieux. "Beaucoup de chefs d'établissements ont compris qu'il fallait régler les problèmes à bas bruit".AFP-Voilà (cité par Le Café Pédagogique)

Faut-il une nouvelle loi ?

Le Figaro 12/09/03

Extraits

La mission sur les signes religieux à l'école présidée par Jean-Louis Debré doit, elle, plus précisément statuer sur la nécessité d'une loi. Après une vingtaine d'auditions, les partisans d'un nouveau texte semblent avoir mesuré les difficultés d'ordre constitutionnel, européen, mais également social puisque les musulmans pourraient se sentir discriminés. «A l'inverse, ceux qui prônaient le statu quo ont compris le désarroi des professeurs». Le Figaro 12/09/03

Les députés de la mission Debré commencent à douter de la nécessité d'une loi interdisant le voile

Le Monde 10/09/03

 

Extraits

Bon nombre des 31 députés (19 UMP, 8 PS, 2 UDF, 2 élus du groupe communiste et républicain) composant la mission d'information de l'Assemblée nationale sur "la question des signes religieux à l'école", mise en place le 4 juin et présidée par le président de l'Assemblée, Jean-Louis Debré (UMP), paraissent avoir nuancé leurs positions sur le sujet.

Cette abondance de confrontations et d'informations n'a pas, loin s'en faut, clarifié le débat à droite ni même à gauche. Au PS, Laurent Fabius ou Jack Lang ont appelé au vote d'une loi interdisant le port de signes religieux, alors que Jean Glavany, membre de la mission d'information de l'Assemblée, est plus nuancé : "On est tous contre le port du voile à l'école. Mais les valeurs de la République se marient davantage avec la tolérance qu'avec l'exclusion." Le Monde 10/09/03

Nicolas Sarkozy se prononce
contre le voile à l'école

Nel Obs 10/09/03

Extraits

Le ministre de l'Intérieur estime dans un entretien au Monde des religions que "les musulmans de France doivent renoncer à ce qui est contraire aux traditions de la République".

"Quand je rentre dans une mosquée, je retire mes chaussures. Quand une jeune musulmane entre à l'école, elle doit enlever son voile". Il précise qu'il n'est "pas favorable à une loi sur les signes religieux (à l'école) comme point de départ", mais qu'il "peut y être favorable comme point d'arrivée d'un dialogue". "L'agressivité antireligieuse a sans doute diminué depuis le petit père Combes", estime-t-il encore, "mais celle qui demeure est symbolique d'une société française qui n'a pas assez de culture du dialogue, de l'écoute, du compromis et qui est porté par la violence". Nel Obs 10/09/03

Questions à Elisabeth Badinter
 « Porter le voile, c'est se soumettre à la violence »

Le Point 12/09/03

Voir aussi Le voile démasqué critique élogieuse de Jacques Julliard sur le livre "Bas les voiles" Nel Obs permanent 16/09/03

Extraits

« Le voile, hidjab, c'est le dogme islamique le plus barbare qui s'inscrit sur le corps féminin et s'en empare. » Née en Iran en 1967, voilée de 13 à 23 ans, la romancière Chahdortt Djavann, exilée à Paris, signe, avec « Bas les voiles ! » (1), un véritable réquisitoire contre le foulard islamique. l'auteur fustige tour à tour les intellectuels musulmans qui condamnent les atteintes au Coran mais pas les violences contre les femmes, les jeunes musulmanes françaises qui choisissent de s'aliéner elles-mêmes sous le voile et les responsables politiques qui, en bâclant l'intégration des immigrés musulmans, ont raté l'occasion de leur inculquer les valeurs de la République et le respect de la laïcité.

E. B. : J'étais hostile à une nouvelle loi. Aujourd'hui, je souhaiterais qu'il y ait enfin un grand débat au sein de la communauté musulmane, tant religieuse que laïque, sur la nécessité de se conformer aux lois de la République. Le port du voile, rappelons-le, n'est pas un impératif religieux ! Si on n'arrive à rien d'ici à six mois ou un an, je serai alors pour qu'on légifère. Le Point 12/09/03

François Hollande interrogé
par la commission Stasi

Nel Obs 09/09/03

Extraits

François Hollande s'est déclaré hostile à une nouvelle loi sur le port du voile. "La laïcité est en capacité de répondre à ces nouveaux défis dans le cadre juridique existant", a répliqué le patron du PS. Face aux "phénomènes sectaires", "ce n'est pas la loi laïque qu'il faut changer, c'est tout simplement la loi pénale qu'il faut appliquer" Il a cependant reconnu qu'il fallait "clarifier" la loi de 1905 "l'école, et a fortiori la salle de classe, est un lieu qui doit protéger et se protéger. Les signes religieux, qui constituent un acte de pression, qui peuvent même être des actes de provocation, de prosélytisme ou de propagande, ne peuvent y être acceptés".
Plutôt que de légiférer, François Hollande a donc suggéré la création d'une "charte de la laïcité" rappelant les droits et devoirs du citoyen.

La dérive communautariste ne menace pas seulement la laïcité...

« C’est l’identité nationale qui est en jeu »

Pour le porte-parole de l’UMP, F. Baroin, auteur d’un rapport sur la laïcité remis à Raffarin, il faut une loi pour proscrire tout signe ostentatoire religieux ou politique à l’école.

Nel Obs 03/07/03

En deux ans, mille filles ont renoncé au foulard

Ecole : la guerre du voile n'aura pas lieu

Nel Obs 15/05/03

Extraits

La guerre du voile n’aura pas lieu si l'école est mieux préparée à l'action juridique, si le Conseil d'Etat cesse d'annuler les exclusions, si les élèves musulmanes les plus radicales acceptent des compromis. Sinon...

N. O. ­ En somme, la situation est inquiétante.

H. Cherifi. ­ Effrayante si l'on ne parle que des irréductibles, comme vous le faites si souvent dans la presse, avec des titres flambants sur la « guerre du hidjab » ! Pas dramatique si l'on veut bien admettre que nos voilées ne sont qu'une poignée face à des milliers de femmes et de familles musulmanes françaises en voie d'intégration ou désireuses de l'être. Nel Obs 15/05/03

La troisième affaire du voile a commencé

Ecole : légiférer ou pas?

Nel Obs 15/05/03

Extraits

Paradoxe: c’est au moment où la question du foulard islamique en classe paraissait réglée que la querelle redémarre. Faut-il durcir la loi? A gauche comme à droite, l’idée séduit

Pour une affaire de voile à l’école qui défraie la chronique, des dizaines se règlent ainsi, à l’amiable, dans le bureau du proviseur. Jack Lang, qui, il y a quelques années, professait la tolérance, dépose une proposition de loi demandant que «tous les signes d’appartenance religieuse soient interdits dans le cadre scolaire». Le ministre de l’Education nationale, Luc Ferry, «personnellement défavorable au port du voile», craint des mesures «qui seraient prises par les musulmans comme une attaque».

La question, brûlante, avait déclenché une tempête il y a quatorze ans, lors de la première affaire de foulard islamique, à Creil, dans l’Oise. On s’en souvient: trois jeunes filles voilées entament une partie de bras de fer avec leur principal. Grève. Exclusion. Un avis du Conseil d’Etat de novembre 1989, puis la circulaire de Lionel Jospin, alors ministre de l’Education nationale, leur donnent raison.

En 1994, pour calmer le jeu, Hanifa Cherifi est nommée médiatrice «Le voile dans les écoles est maîtrisé, dit-elle. En 1994, au plus chaud de la deuxième affaire du voile, nous comptions 3000 incidents pour lesquels une médiation avait été nécessaire. En 2002: plus que 150. La plupart du temps, les problèmes se résolvent à l’amiable. Les jeunes filles acceptent de ne pas porter leur foulard en classe… » «L’adoption du voile renvoie à la montée d’un islamisme militant qui se développe dans les cités, comme une alternative à une intégration manquée», explique Hanifa Cherifi. «Plus cela va, moins on pourra traiter le problème par le dialogue, s’inquiète Philippe Guittet, secrétaire général du SNPDEN, qui représente 80% des chefs d’établissement. Nous avons besoin d’un texte fort pour résister à la pression des milieux communautaires.» Nel Obs 15/05/03

L’éditorial de Jean Daniel

Décidément, non au voile !

Nel Obs 15/05/03

Extraits

Artificielle, cette affaire de voile? Ne vous y trompez pas! Elle est lourde en symboles. Des musulmans français, hier silencieux, aujourd’hui le disent: c’est un test pour la République. Elle résiste ou elle cède. Et elle aura, alors, à céder sur autre chose. Bref, je suis absolument pour l’interdiction du port du voile à l’école et dans la fonction publique. Pour éviter à l’Etat de légiférer brutalement, je préconise qu’avant de promulguer une loi un délai d’au moins une année soit laissé aux chefs d’établissement scolaire et aux responsables civils et religieux de la société musulmane. Délai devant servir à informer, à expliquer et à convaincre. Car enfin de quoi s’agit-il, sinon d’enfants dans les écoles pendant le temps de l’enseignement, de citoyens dans les administrations de l’Etat pendant le temps du travail. Dans la rue, dans leur maison, partout, ils sont libres de faire ce qu’ils veulent de leur apparence. Mais on leur demande, à l’école, au travail, d’être nos égaux et nos frères. Nel-Obs 15/05/03

«Interdire tout signe religieux»

Jack Lang

L'Express 30/04/03

 

Extraits

L'ancien ministre de l'Education n'a pas toujours été contre le port du voile à l'école. Son mea culpa méritait explication.

En 1995, vous déclariez encore: «J'ai tellement confiance dans l'école de mon pays que je ne doute pas que ces jeunes filles finiront toutes par se soumettre à ses règles de vie.»

Ma position sur la question du voile a évolué parce que la situation nationale et internationale a elle-même changé. On ne peut pas ne pas constater que l'islamisme a progressé, notamment dans les ghettos, cet apartheid territorial et social que nous avons laissé se constituer, qui enferme des millions de gens dans la misère culturelle et que l'on appelle improprement le «communautarisme». L'Express 30/04/03

Quatorze ans de retard

L'express 30/04/03

 

Extraits

En 1989, s'abritant derrière le Conseil d'Etat, Lionel Jospin décidait de tolérer les élèves voilées. Aujourd'hui, comme Jack Lang, qui dépose une proposition de loi interdisant tout signe religieux en classe, les politiques de gauche et de droite s'indignent de voir reculer la laïcité. Trop tard?

Sous la pression de parents et d'élèves militants faisant de la surenchère, beaucoup de chefs d'établissement sont condamnés à la négociation et au compromis permanents, sous la contrainte de leur hiérarchie - pas de vagues! - et, en cas de procès, d'un désaveu quasi automatique des tribunaux, qui les obligent à réintégrer les élèves voilées. D'année en année, le grignotage religieux progresse et les concessions communautaristes gagnent, dans les cours d'histoire, d'éducation physique et les cantines. Depuis quatorze ans, des habitudes ont été prises, des privilèges communautaires acquis et, sur cet enjeu essentiel pour l'islamisme que constituent l'infériorité et la relégation des femmes, un retour à l'égalité rencontrerait de fortes résistances. Dans ce domaine comme dans bien d'autres, une loi française pourrait se voir contestée au nom du droit européen, qui a pris quelques longueurs d'avance en matière de communautarisme. L'express 30/04/03

«Invitons-les à devenir françaises»

Emmanuel Todd

L'Express 17/11/94

Extraits

La tolérance des Anglais repose, en fait, sur une mentalité «différentialiste», c'est-à-dire sur l'idée qu'il y a des races différentes et qu'il faut les séparer. A l'opposé, l'attitude française part d'un présupposé universaliste: si les gens ont un comportement semblable au nôtre, eh bien, ils sont les bienvenus ! Nous sommes pour le métissage, pour le mélange des populations. Et cela est incompatible avec la préservation de cultures immigrées.

Il y a en réalité deux France, qui fonctionnent de manière opposée et qui reflètent des structures familiales distinctes : de l'affaire Dreyfus à Vichy, la France centrale, égalitaire, a imposé l'émancipation des juifs ; la France périphérique, autoritaire, a nourri l'antisémitisme. Les plus grosses fièvres autour du voile se manifestent dans [la partie centrale] de la France égalitaire, dans le Bassin parisien, dans les zones révolutionnaires de l'histoire de France, là où la volonté universaliste est la plus forte et se heurte, de manière plus violente, à une volonté musulmane d'affirmer sa différence. Si les Français des milieux populaires éprouvent depuis toujours - et bien avant l'apparition du Front national - une hostilité envers les populations maghrébines, ce n'est pas à cause de la religion (dans le Bassin parisien ou face à la Méditerranée, ni les catholiques ni les musulmans ne sont très pratiquants), mais à cause de la différence des systèmes de parenté, dont le voile islamique traduit l'exaspération. Les enfants nés sur le sol français [sont] français, ce qui veut dire qu'ils [doivent accepter] nos valeurs, la laïcité, le statut de la femme française. Ayons un discours clair! Il faut dire aux enfants d'immigrés que c'est bien d'être français.

L'Express 17/11/94

À noter

Un site très nettement engagé dans la demande d'une loi : http://www.gaucherepublicaine.org/

La ligue de l'enseignement, dont l'engagement laïque constant peut difficilement être mis en doute demande, elle, Une laïcité pour unir et non pour exclure .

 

Le Parti Socialiste a déposé deux propositions de loi

SÉNAT

PROPOSITION DE LOI
relative au renforcement du principe de laïcité à l'école

 

Extraits de l'exposé des motifs

La laïcité est avant tout une protection pour chaque citoyen : elle garantit la liberté de croire ou de ne pas croire, de changer de religion, d'éprouver notre esprit critique aussi bien sur le plan politique, religieux que philosophique. l'application de l'avis du Conseil d'Etat du 27 novembre 1989 et la jurisprudence qui en découle [induit] des appréciations différentes selon les situations et donc des inégalités de traitement.

Le renforcement du principe de laïcité à l'école passe par l'interdiction du port de signes religieux, politiques ou philosophiques. Il implique également que la liberté d'expression reconnue aux élèves des collèges et lycées, conformément à la convention internationale des droits de l'enfant, respecte l'ordre public scolaire, la liberté et les droits d'autrui.

il convient parallèlement d'inscrire la formation à la laïcité dans le code de l'éducation Il convient [aussi] de donner une place à part entière dans le code de l'éducation à l'enseignement de l'histoire des religions.

L'article 2 pose le principe de l'interdiction du port de tout signe religieux, politique ou philosophique dans les établissements publics, la possibilité de sanction ne devant intervenir qu'en cas de récidive et après médiation. Texte intégral (14/11/03)

ASSEMBLÉE NATIONALE

 

PROPOSITION DE LOI

visant à interdire le port apparent de signes religieux, politiques ou  philosophiques à l'école.

 

Extraits de l'exposé des motifs

La jurisprudence du conseil d'Etat depuis l'avis du 27 novembre 1989 a eu le mérite de rechercher un équilibre entre liberté d'expression et neutralité du service public. Mais elle ne suffit plus. la présente proposition de loi a pour objet d'introduire une disposition législative brève et claire posant le principe de l'interdiction du port apparent de signes religieux, politiques ou philosophiques au sein de l'école publique. Il est urgent de lutter contre le communautarisme par la réhabilitation du modèle républicain et laïc d'intégration. Une Charte de la laïcité définissant un équilibre entre droits et devoirs citoyens, rappelant les règles communes dans l'ensemble de l'espace public et développant un guide de la citoyenneté doit être mise en œuvre. L'article 1er pose le principe de l'interdiction du port apparent de signes religieux, politiques ou philosophiques. Ne seront donc plus seulement prohibés les signes « ostentatoires » mais les signes qui se présentent immédiatement à la vue. Les établissements privés sous contrat ne sont pas visés les dispositions de cette proposition de loi. [Elles] n'ont pas lieu de s'appliquer aux départements du Haut-Rhin, du Bas-Rhin et de la Moselle

L'article 2 permet d'introduire la souplesse nécessaire à la mise en œuvre du principe d'interdiction La sanction ne pourra intervenir qu'une fois achevé le temps du dialogue, de l'explication, de la pédagogie et de la conviction. Texte intégral (17/11/03)